Enregistrement 3/3/2014, passage, semaine du
24/3/2014
RADIO DIALOGUE
(Marseille : 89.9 FM, Aubagne ; Aix-Étang de Berre : 101.9)
« LE BLOG-NOTE DE
BENITO » N° 122
Lundi : 10h45 et 17h45 ; samedi : 12h45
(P.S. : naturellement, je ne garde que pour indication les musiques diffusées)
L’ENSEMBLE MUSICATREIZE
Depuis le début de
cette année, naviguant entre les programmations musicales, la chronique de
disques, je me suis attaché à tenter de rendre justice à des ensembles musicaux
de la région, de Marseille en particulier, dignes de considération. Vous avez
pu juger que les ensembles baroques sont ici nombreux. Voici aujourd’hui un
ensemble qui, même s’il a collaboré avec Mars en baroque, s’il interprète aussi
cette musique magistralement, s'est fondamentalement voué à défendre et à
promouvoir la création contemporaine de la musique. En effet, se contenter de
faire vivre la musique du passé serait en rester à la muséographie passéiste si
l’on ne tentait aussi de créer, procréer la musique de notre temps pour les
temps à venir.
Parlons donc de
l’ensemble vocal et instrumental Musicatreize (53, Rue Grignan, siège et salle de répétitions et
de concerts), qui, de Marseille, rayonne et résonne dans le monde entier. Son
infatigable animateur, son âme, son fondateur est Roland Hayrabédian. À des études de chef d'orchestre, à une formation
éclectique, riche et variée, s’ajoute et s’affirme vite chez lui un goût
profond, méditerranéen, pour la voix. Mais non la voix enfermée dans les canons
ou carcans classiques mais une voix libérée, délibérée dans des expressions et
des formes ouvertes aux quatre coins des cultures les plus larges et les plus
différentes de la vocalité contemporaine. Il enseigne aujourd’hui dans notre
Conservatoire de Marseille à vocation régionale mais, dès 1978, il fondait le Chœur Contemporain d'Aix-en-Provence et, en 1987, à Marseille, l’ensemble
Musicatreize, vocal mais aussi instrumental formé de solistes très solides.
Très vite, Musicatreize
se fait connaître par la qualité musicale rigoureuse de ses interprétation et
une couleur vite reconnaissable et reconnue, a cappella, sans accompagnement,
ou avec orchestre, créant de nombreuses œuvres de grands compositeurs contemporains :
ses interprétations des oeuvres de Maurice Ohana, compositeur français d'origine espagnole né en 1913
à Casablanca, et mort le 13 novembre 1992 à Paris, sont remarquées. Ses enregistrements d’Ohana font
date et obtiennent de nombreux prix discographiques, notamment, le
fameux Syllabaire pour Phèdre,
qui va courir le monde. Les Victoires de la Musique Classique en 2007 le
couronnent comme meilleur Ensemble de l’Année.
Hayrabédian, s’il ne
dédaigne pas la musique lyrique baroque ancienne, comme Didon et Enée de Purcell qu’il dirige, le théâtre musical et la danse, puisque de sa
collaboration avec le chorégraphe Angelin Preljocaj naîtra une nouvelle version scénique des Noces de Stravinsky représentée dans le monde entier, à ces rares exceptions près ne met au
répertoire de Musicatreize, fait exceptionnel dans la programmation musicale,
pratiquement que des compositeurs vivants, ainsi, Betsy Jolas, Félix Ibarrondo,
Édith Canat de Chizy, Burgan, Kopelent, Hurel, Feron, Gagneux etc, et nos
concitoyens, Georges Bœuf, Lucien Guerinel, etc. De ce dernier, né en
1930, longtemps marseillais,
désormais habitant la Bourgogne, nous écouterons, tiré du disque Lyrinx (un label marseillais), un extrait de ses Fragments
d’Archiloque, le grand poète
élégiaque grec du 7e siècle avant notre ère, ici, son septième
fragment sur la houle du désir d’amour.
Le disque contient
aussi, quatre poèmes du poète italien Eugenio Montale (1896-1981), et des poèmes en allemand du IX e
siècle, éclectisme poétique de Guérinel, lui-même poète.
Malgré tout,
Hayrabédian ne se contente pas de servir des musiciens connus et beaucoup
reconnus, il suscite, par des commandes, des créations à d’autres qui, grâce à
cela, se feront connaître. De la sorte, Musicatreize est à
l’origine d’une soixantaine d’œuvres nouvelles, classées selon diverses
thématiques, dont les Cris
(Jannequin, Berio, Campo, Marti…), des cycles, les Sept contes, série ouverte en 2006 avec Les Sorcières d’António Chagas Rosa, et close en 2010 avec El
regreso d’Oscar Strasnoy, livret
d’Alberto Manguel, créé au Festival d’Aix-en-Provence. (Voir dans ce blog,
mercredi, décembre 24, 2008, L’Enterrement de Mozart). Ces pièces, signées par un auteur, un compositeur,
un metteur en scène, ont fait l’objet d’un enregistrement et d’un livre
illustré, aux éditions Actes Sud ; L’Autre rive, etc.
Écoutons un extrait
d’un disque d’œuvres vocales du compositeur basque Félix Ibarrondo, label MFA.
Puis écoutez le palmarès
national et international de notre Marseillais : chef invité de
l'Orchestre du célèbre festival de Spoleto en Italie, de la Cappella de
Saint-Petersbourg, des Chœurs de Radio France, de l'Orchestre Philharmonique
des Pays de Loire, de l'Orchestre Philharmonique de Lorraine, il collabore
aussi avec des ensembles comme les Percussions de Strasbourg, Musique Vivante,
Musique Oblique ou l'ensemble baroque Elseneur, tout comme avec notre Mars en
Baroque. En 2002, il est nommé directeur musical de l'Orchestre des Jeunes de
la Méditerranée, désormais intégré au Festival Lyrique d'Aix-en-Provence.
Et cette Méditerranée
lui va très bien : malgré les quatre horizons et continents qui le
réclament, Musicatreize, musique à 13 solistes d’abord, mais musique dans le
13, chez nous, et qui rime avec MP13, son port d’attache, son ancrage, est bien
Marseille, la Méditerranée. Ses programmes le proclament : il y a, entre
deux tournées, les séjours « à quai » ou « au large », « en haute mer ». Et
l’on n’aura pas oublié, l’an dernier, 2013, Marseille Capitale européenne de la
Culture, et le grandiose projet Odyssée dans l’espace, mêlant dans son titre Homère, la mer, et l’espace, et, sur la scène de l’Opéra, amateurs
et professionnels, chœurs et orchestres, issus de notre région. C’était comme
une apothéose, à grande échelle, de la dimension scénique et spatiale que donne
Musicatreize à ses concerts qui sont autant à voir qu’à entendre. Et comment
dire mieux cet amour de Marseille puisque c’est ici, dans cette salle de la rue
Grignan que s’élaborent les projets, que s’affinent les productions, qu’elles
se répètent en public, en toute simplicité et complicité. D’autres animations,
des ateliers d’écriture, des rencontres, créent et consolident ce sentiment
local d’appartenance marseillaise qui n’enlèvent rien à l’universalité
généreuse du propos.
Nous quittons ce
superbe ensemble marseillais avec l’ouverture de Gilles de Rais, œuvre vocale et théâtrale d’Édith Canat de Chizy,
disque MFA sur le terrible compagnon d’armes de Jeanne d’Arc, alchimiste,
sorcier, et sorte d’ogre assassin de centaines d’enfants selon la
légende.
www.musicatreize.org/ (tous les disques sur le site)
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