Enregistrement 25/2/2018, passage,
semaine du 12/2/18
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LE BLOG-NOTE DE BENITO » N° 303
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Semaine 7
Les musiciens & la Grande Guerre vol XXV Le Sacrifice, CD, Hortus
Commencée en 2014,
pour la commémoration du centenaire, la collection des éditions Hortus, Les musiciens & la Grande Guerre, Grande
(et chaque fois je m’indigne, je me demande, comment une guerre peut être
grande, sinon par la grandeur, disons l’immensité du désastre), bref, cette
collection en est à son vingt-cinquième CD. Cette année 2018 en verra la fin
avec la célébration de l’Armistice du 11 novembre 1918 qui mit fin à l’horreur
de ce conflit mondial. Ce cataclysme monstrueux fit dire à Valéry, « Nous
autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles. […] Et
nous voyons maintenant que l’abîme de l’histoire est assez grand pour tout le
monde. », pour engloutir, comme périrent les civilisations antiques, nos
cultures se croyant arrivées au plus haut point de civilisation, qui sombra
dans la barbarie.
Pourtant, en nous
secouant chaque fois de ce rappel, ces impeccables
CD dans leur sobre et belle jaquette grise, mais implacables par l’évocation de l’horreur, en explorant le rapport
entre la musique et cette convulsion qui ébranla les fondements de la société
de son temps à une échelle jamais connue jusque-là, c’est, finalement, un
message d’espoir, par l’art, par la musique, qui se dégage à leur écoute. Ce véritable
monument qu’auront dressé ces éditions Hortus à tous ces compositeurs, ces
musiciens morts ou blessés, ou restés vivants mais blessés mortellement en leur
âme, nous prouve que rien n’est jamais entièrement perdu pour les hommes de
bonne volonté qui, même dans le désespoir le plus absolu, misent sur la
musique, la quintessence fraternelle et communicable de l’art :
l’humanisme contre la barbarie.
Sacrifice, à juste titre, est le titre de ce vingt-cinquième recueil qui se recueille sur ceux que l’on nomma les « Rossignols perdus de la Somme », les compositeurs sacrifiés dans la
bataille. À quatre exceptions près, ils sont
tous anglo-saxons, de Grande-Bretagne ou d’Australie. Pour la plupart, ils sont
très jeunes et morts injustement dans cette bataille de la Somme. Chiffres
terrifiants qui font froid dans le dos : une dizaine de kilomètres gagnés par
les Alliés et le prix en fut 420 000 Britanniques tombés (60 000 le
premier jour !), 200 000 Français, et 500 000 Allemands,je les donne ici en chiffres car leur transcription en lettres (cinq-cents milles, vingt milles, etc) semble en atténuer l'horreur numérique.
Pour exorciser la
froideur impitoyable des chiffres, écoutons le ténor Andrew Goodwin chanter avec émotion cette bouleversante chanson de George Wilkinson, tué en juillet 1916,
son corps ne fut jamais retrouvé. Il chante
le lieu champêtre qu’il hante pour
rester sur les traces de la jolie Suzette aimée. L’amour contre la mort :
1) PLAGE 3
Le CD ouvre,
symboliquement, par la « Marche Funèbre » de Saul, oratorio de
Haendel, connue de tous les Britanniques : elle était jouée à chaque
enterrement, notes graves et profondes, dont on imagine l’effet qu’elles
pouvaient produire égrenées au quotidien, à moins qu’elles ne fussent
neutralisées justement par leur morne répétition journalière : le deuil comme quotidien…
Deux compositeurs allemands
figurent au programme : Walter Braunfels,
avec le prélude de son opéra Die
Vögel (‘Les Oiseaux’) dans un arrangement pour cordes et accordéon (qui
sera créé en 1920) et l'adagio de la
Sonate de Guerre de Botho
Sigwart. Du compositeur français Jacques
Ibert, intégré aux services sanitaires, on trouve un Noël en Picardie aux
notes lancinantes, une marche en avant inexorable comme une fatalité. Reynaldo Hahn, Vénézuélien naturalisé
français, ami intime de Proust, s’était engagé, mais, parlant plusieurs
langues, il échappa aux tranchées pour servir dans l’État-major. Sa mélodie, À Chloris, chantée avec de touchantes
nuances par le même ténor Andrew Goodwin,
exprime encore l’amour plus fort que la mort, sans doute le rêve de vie de tant
de ces jeunes hommes tombés dans la fleur de leur jeunesse.
En effet, pour ajouter à la révolte que nous inspire ce massacre, on
nous révèle que ces musiciens et les poètes qui servirent et
périrent sur la Somme, étaient de jeunes
volontaires engagés en bloc : ils faisaient partie pour la plupart à des Pals battalions, ‘Bataillons de copains’
d’une même usine, d’une une même entreprise, enrôlés dans l’enthousiasme de
bandes joyeuses, inconscientes de l’enjeu ; le fameux collège d’Eton, qui
donna tant de musiciens, perdit à lui seul 1000 de ses étudiants. Ainsi, le néo-zélandais
Willie Braithwaite Manson, fut fauché
par un obus le jour même de son anniversaire, à vingt ans. Nous écoutons un
extrait de sa chanson, When I came at last to Ludlow qui
apparaît terrible rétrospectivement, puisqu’il est question de deux amis
retrouvés, mais l’un enterré, l’autre gisant en prison :
2) PLAGE 4
Ce disque privilégie
la voix, l’instrument par essence humain et le rend plus déchirant avec deux
récitations de deux textes , l’un en anglais, par le ténor Andrew Goodwin et, en
français, par Christine Benoist. On
chante la vie en déplorant l’absurdité de la mort :
« Death is so blind and dumb, death
does not understand », ‘la Mort est si
aveugle, si muette, la mort ne comprend pas », écrit dans un poème John Masefield, mis en musique par Ivor Gurney qui, sans mourir
physiquement, finit ses jours dans un asile psychiatrique.
L'interprétation de
l'ensemble de musiciens The Flowers of
War, dirigés par le violoniste australien Christopher Latham, est d’une grande beauté.
On regrettera que les textes anglais des poètes ne soient pas traduits.
Nous nous quittons sur
la dernière pièce, sur des paroles traditionnelles, la retraite au clairon pour
ténor, cordes et accordéon.
4) PLAGE 20
Les musiciens & la
Grande Guerre vol. XXV Le Sacrifice,
CD, Hortus, The Flowers of War, de Christopher Latham, enregistré sur le
vif dans des églises où eurent lieu des commémorations.
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