Critiques de théâtre, opéras, concerts (Marseille et région PACA), en ligne sur ce blog puis publiées dans la presse : CLASSIQUE NEWS (en ligne), AUTRE SUD (revue littéraire), LA REVUE MARSEILLAISE DU THÉÂTRE (en ligne).
B.P. a été chroniqueur au Provençal ("L'humeur de Benito Pelegrín"), La Marseillaise, L'Éveil-Hebdo, au Pavé de Marseille, a collaboré au mensuel LE RAVI, à
RUE DES CONSULS (revue diplomatique) et à L'OFFICIEL DES LOISIRS. Emission à RADIO DIALOGUE : "Le Blog-notes de Benito".
Ci-dessous : liens vers les sites internet de certains de ces supports.

L'auteur

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Agrégé,Docteur d'Etat,Professeur émérite des Universités,écrivain,traducteur,journaliste DERNIÈRES ŒUVRES DEPUIS 2000: THÉÂTRE: LA VIE EST UN SONGE,d'après Caldéron, en vers,théâtre Gyptis, Marseille, 1999, 2000; autre production Strasbourg, 2003 SORTIE DES ARTISTES, Marseille, février 2001, théâtre de Lenche, décembre 2001. // LIVRES DEPUIS 2000 : LA VIE EST UN SONGE, d'après Calderón, introduction, adaptation en vers de B. Pelegrín, Autres Temps, 2000,128 pages. FIGURATIONS DE L'INFINI. L'âge baroque européen, Paris, 2000, le Seuil, 456 pages, Grand Prix de la Prose et de l'essai 2001. ÉCRIRE,DÉCRIRE L'AMÉRIQUE. Alejo Carpentier, Paris, 2003, Ellipses; 200 pages. BALTASAR GRACIÁN : Traités politiques, esthétiques, éthiques, présentés et traduits par B. Pelegrín, le Seuil, 2005, 940 pages (Prix Janin 2006 de l'Académie française). D'UN TEMPS D'INCERTITUDE, Sulliver,320 pages, janvier 2008. LE CRITICON, roman de B. Gracián, présenté et traduit par B. Pelegrín, le Seuil, 2008, 496 p. MARSEILLE, QUART NORD, Sulliver, 2009, 278 p. ART ET FIGURES DU SUCCÈS (B. G.), Point, 2012, 214 p. COLOMBA, livret d'opéra,musique J. C. Petit, création mondiale, Marseille, mars 2014.

lundi, février 29, 2016

SUR TOUS LES FRONTS DES ARTS ET DES MUSIQUES


                                    "Faire vivre toutes les musiques du monde"
                                                         Production | Organisation | Promotion
                          En mars, Arts et Musiques vous fait partager toutes les musiques du monde...




Sissy Zhou - Virtuose du Gu Zheng
Saint Martin de Crau - Le Galet
Mardi 8 mars 2016 - Tarifs : 9€ / 6€
> 21h : Concert
"Festival voix de femmes"


Lynda Kent - Jazz Folk & Blues> Marseille - Salle Municipale Mairie 2/3
Mardi 8 mars à 18h
> La Ciotat - Théâtre du Golfe
Samedi 12 mars à 20h30 - Tarifs 12€ / 9€ / 3€

Trio Besozzi - Musiques classiques et films
Venelles - Eglise
Dimanche 13 mars à 18h
Entrée tout public - Tarif : 11€ / 9€ / 5Infos : 04 42 54 93 10 / resa.culture@venelles.fr

 





Trio Les Voix de l'Alcazar - Opérettes
Saint-Chamas - Salle Municipale
Samedi 19 mars à 20h30
Entrée tout public - Tarif : 10€
Infos : Service Culture / 04 90 44 52 00


 Ensemble Calisto - 5 voix d'hommes a cappella

 Aix-en-Provence - Chapelle des Oblats
 Journée Européenne de la Musique Ancienne
 Lundi 21 mars à 20h
 Places 10 € / Gratuit jusqu’à 18 ans  
Réservations : ensemblecalisto@gmail.com
 

                                                     Fafa Carioca - Trio & Quartet
                                                Musiques et percussions du Brésil l                                               La Motte d'Aigues - Mardi 22 mars                                                         Pertuis - Vendredi 25 mars
                                             Animations pédagogiques en matinée
                                                                Défilé Carnaval 


 


              Trio Keynoad en Show Case - Samedi 19 mars 2016 à 14h30 - Stand Région Paca
                Arts et Musiques sera présent tout au long du forum / Stand Phonopaca


                  Rencontrons-nous ! contact@artsetmusiques.com / 06 07 65 48
54
 

Exposition Evénement - "Un Monde de Musique"
 Aurillac - Salle des Ecuries - Entrée libre
 Du 22 février au 3 mars 2016
 26 et 27 février : 2 visites tout public
 26 février : visite commentée seniors
 1er et 2 mars : 4 visites scolaires
 contact@artsetmusiques.com - 04 91 31 17 46
 Nouvelles Actions Educatives dans les Collèges

Arles, Rognac, La Ciotat, Marseille, Pélissanne, Istres, Gréasque, Vitrolles, Saint-Andiol, Martigues

André Gabriel · Des traditions populaires à l’orchestre symphonique
Rodolphe Stoitzner · A la découverte du galoubet
Mariannick Saint-Céran et Marc Campo · A la découverte du Blues
Mariannick Saint-Céran · Chant et musique du Brésil
Marco Becherini · Danse contemporaine   

                                                             + d'infos
Contactez-nous pour organiser votre événement...
Claude FREISSINIER
Directeur
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Chargé de diffusion
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Assistant Production et Diffusion


Arts et Musiques
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samedi, février 20, 2016

HAMLET VIENNOIS : L'AIGLON


L'AIGLON

DE

JACQUES IBERT ET ARTHUR HONEGGER

Drame musical en 5 actes

D'après la pièce d'Edmond ROSTAND adaptée par Henri CAÏN


Création au Théâtre de Monte-Carlo (1937)


Opéra de Marseille

Dernière représentation à Marseille, le 3 octobre 2004




Velléitaire Hamlet

      Il faut, symboliquement, que le Père meure pour que le Fils advienne. L’Aiglon n’avait aucune chance face à un Aigle de père mort mais immortel. Mais sa chance historique aura peut-être été de ne pas régner après lui, comme celle de la trois fois reine Marie Stuart dont la fin tragique lui a laissé une place dans l’Histoire que son histoire ne lui aurait pas accordée.

      Né de l’Autrichienne Marie-Louise et de Napoléon, proclamé Roi de Rome à sa naissance en 1811 à Paris, apogée politique et militaire de l’Empire de son père qui en fera son héritier à son abdication en 1815, l’Histoire ne nous dit pas grand chose de ce pâle jeune homme mort en 1832 sinon qu’en 1830, alors qu’une nouvelle révolution chasse encore les Bourbons de France et restaure, effaçant la Restauration, le drapeau tricolore, on mise sur lui des espoirs de rétablissement de l’Empire, occasion qu’il ne sut ou put saisir : exilé dans ce fantôme de Versailles de Schönbrunn, autre Sainte-Hélène, autre Elseneur pour cet Hamlet viennois, fasciné par l’action, il ne passera jamais aux actes, se rongeant aussi à rêver de venger son père, faute de le ressusciter. Un destin avorté favorable à la légende, d’abord forgée en collaboration par les poètes marseillais Auguste Barthélemy et Joseph Méry, course immobile à l’abîme entre ce qui fut et ce qui aurait pu être.

Intronisé duc de Reichstadt en 1818, il ne montera jamais sur le trône impérial que lui avait prévu son père, ni aucun autre par lignée maternelle, bien que le titre de Roi de Rome, dont le para habilement Napoléon, le désignât d’avance comme candidat à celui de Roi des Romains porté par les héritiers élus du Saint-Empire romain germanique, apanage des Habsbourgs, tel son grand-père maternel l’empereur François Ier. Et pourtant, en dehors des bonapartistes français, la Grèce libérée du joug ottoman, la Pologne et la  récente Belgique lui offrirent leur trône. Il avait été cependant proclamé officieusement Napoléon II après la seconde abdication de son père, à quatre ans, avant que Louis XVIII ne reprît la couronne royale : quinze jours. Même la série de ses prénoms, Napoléon François Charles Joseph Bonaparte, puisés dans ceux des deux familles, révèle l’enjeu dynastique et politique pesant sur l’enfant, par ailleurs petit-neveu, par sa mère, de Marie-Antoinette et de Louis XVI.

      Même s’il fut culturellement germanisé, il ne fut pas persécuté mais chéri dans sa famille autrichienne qui lui permit de réapprendre le français. Mais, son existence et sa filiation impériale étaient un potentiel facteur de troubles dans une Europe en paix qui se remettait lentement des désordres de l’épopée napoléonienne. Né pouvant avoir tout, il n’eut rien et le résuma lui-même avec une lucide amertume en mourant à vingt et un ans :


« Ma naissance et ma mort, voilà toute mon histoire. Entre mon berceau et ma tombe, il y a un grand zéro ».


L’ŒUVRE : AIGLE À DEUX TÊTES

       Contexte historique ambigu

      Si la fière fièvre cocardière de la géniale pièce de Rostand se comprend en 1900 après l’annexion germanique de l’Alsace/Lorraine, suite de la cuisante défaite de 1870, l’exaltation guerrière de l’opéra, des sanglantes victoires de Napoléon, alors que la Guerre d’Espagne bat son plein depuis 36, champ d’essai fasciste pour la Seconde Guerre mondiale, la création à Monte-Carlo en 1937, précédant d’un mois l’écrasement de Guernica sous les bombes nazies de la Légion Condor, nous laisse un peu songeur par ce contexte politique de danse sur un volcan. La pièce, dans son hagiographie impériale, oublie Vienne, bombardée sans pitié pendant deux jours en mai 1809 par Napoléon, deux mois avant le charnier de Wagram, sommet de l’opéra, Beethoven terré dans une cave. Le compositeur avait déjà déchiré sa dédicace de sa Symphonie héroïque à Bonaparte libérateur quand il se fit l’Empereur oppresseur, rouleau compresseur de l’Europe. La souffrance ne porte guère à aimer sa cause et l’on peut comprendre, même si elle n’est pas attestée historiquement, dans ce texte manichéen, la haine inexpiable que Metternich reporte sur le fils de l’Empereur, ce Fils de l’Homme du poème en duo Barthélémy/Méry qui lançait la légende, mais où il était néanmoins conseillé à l’héritier de Napoléon, de ne pas mettre encore à feu et à sang une Europe qui avait gagné la paix contre son père.

     Il reste que, au titre sinon d’Empereur historique vainqueur, de héros romantique vaincu, on adhère par la compassion à l’épopée rêvée de ce chlorotique jeune homme portée par le souffle indubitable du texte et insufflée par la beauté de la musique.

Remarquable livret

    Le livret de Caïn est remarquable : d’une pièce en six actes, à cinquante acteurs, il tire un livret concis en cinq actes, à quinze personnages. Sans doute eût-il raison de se plaindre de coupures abusives : avec trois forts héros essentiels, l’Aiglon, Metternich et Flambeau, le reste n’est qu’une foule de personnages sans personnalité, et l’on regrette au moins que, aussi bifide que l’aigle d’Autriche, Marie-Louise subisse la mouise de cette désincarnation : princesse autrichienne, Impératrice française, femme de L’Aigle et mère de l’Aiglon, elle méritait mieux que cette inexistence, d’autant que Metternich la soupçonne d’avoir remis le bicorne de l’Empereur à son fils. Les multiples autres rôles servent habilement de miroir réflexif au solitaire héros.

     Le texte est d’une grande beauté et, porté par la musique et la vivacité souvent de cette conversation musicale, il claque en répliques frappées comme des médailles napoléoniennes. Au jeune Duc de Reichstadt s’excusant ironiquement d’avoir foulé du pied une cocarde blanche, autrichienne, l’Attaché militaire français répond :

       Dois-je apprendre au fils de l’Empereur

       Que la cocarde en France a repris ses couleurs ?


métaphorisant de la sorte en deux vers la nouvelle situation politique de la France après la Révolution de 1830 qui abandonnait le blanc de la Restauration pour reprendre le drapeau tricolore de la Révolution, offrant un envol possible à l’Aiglon. La description symbolique des trois couleurs par le Duc est du registre poétique sublime :


     Moi, si je dois régner, c’est avec ce drapeau,

     Plein de sang dans le bas et le ciel dans le haut.


      Le texte abonde en bonheurs d’expression que la musique rehausse de son expressivité, comme le Duc debout pour écouter Flambeau ; il est riche en métaphores expressives : dans les chapitres de la grande Histoire des combats, les généraux sont les titres et les soldats (« les petits, les obscurs, les sans grades…) « les mille petites lettres » ;  le bicorne de Napoléon, « petite et sombre pyramide », « chauve-souris des champs de bataille »,  « fait avec deux ailes de corbeaux », etc. Il y a une grande volupté à écouter ce texte admirablement mis en relief et profondeur par la musique, sans ralenti, tout dans une sorte de course dynamique qui ne s’installe pas dans les stases commodes de l'extase de l'air ou de la description.

     Quant à la musique, on n’entrera pas dans la vanité du « Qui a fait quoi ? ». Les deux compères font la paire mais la musique demeure une et uniformément belle dans son aussi duelle beauté sans duel.

     Le rôle principal, créé au théâtre par Sarah Bernhardt, reste dans la tradition lyrique du travesti de la chanteuse en jeune homme, et cela sert le propos dramatique qui fait du héros non advenu à l’adulte viril, un adolescent  déjà écrasé œdipiennement par le Père, émasculé avec sadisme par Metternich,figure tyrannique de Parâtre.

RÉALISATION

    Ressuscitée à Marseille en 2004 par la volonté de Renée Auphan, alors Directrice de l’Opéra, l’œuvre semble frappée encore de dualisme : elle en confia, la mise en scène à Patrice Caurier et Moshe Leiser. Indisponibles pour cette reprise, Maurice Xiberras, l’actuel Directeur a passé le flambeau à Renée Auphan qui s’est chargée de remonter l’ancienne production qu’elle a fignolée avec amour et science à Lausanne et Tours. On ne cédera pas non plus à l’inanité insondable du « Qui a fait quoi ? », d’autant que la modestie et l’élégance morales et professionnelles de Renée Auphan lui font dire qu’elle a tenté de rendre le plus fidèlement possible la mise en scène admirée de ses prédécesseurs. Cependant, ne gardant pas un souvenir précis de la production initiale, on oserait dire, sans manquer de respect aux deux metteurs en scène initiaux, qu’on retrouve ici les qualités que l’on aime de cette grande dame de l’Opéra dans la justesse contrôlée des mouvements et du geste, le subtil travail d’acteur sensible dans le jeu de tant de personnages. Bref, on est reconnaissant à ce trio, ces trois mousquetaires dont une Lady, de la réussite qu’on peut dire, sans emphase ni flagornerie, exceptionnelle à tous niveaux du spectacle : cet hommage respectueux à cet opéra lui rend la dignité perdue de sa notoriété.

     Les décors de Christian Fenouillat sont d’une grande beauté et efficacité dramatique. Découpées en lames aiguës de guillotine géante par la lumière des cintres, sobres grandes parois du salon de Schönbrunn aux montants à peine torsadés d’un motif rocaille, baroque tardif germanique sur une surface plane néo-classique aux rehauts dorés. On dirait que leur vert (malice ?) est  celui souvent appelé vert Empire, c’est dire celui exercé en Europe par la France au sommet de son influence culturelle même au cœur, la cour, de ses ennemis. Les fauteuils, le tabouret sont aussi, certes non de style Empire, mais purement Louis XV, de même que le somptueux bureau-miroir de sépulcrale laque noire glacée (Napoléon III ?) comme son âme de Metternich, aux ornements d’angles en bronze qui pourraient être des sphinx… de retour d’Égypte. Les parois s’ouvriront en vastes portes sur un jardin nébuleux de ruines XVIIIe siècle pour une fête galante explicitement à la Watteau, revu par Verlaine, où dansent de fantasques masques et bergamasques de la Commedia dell’Arte. Et enfin, grandes ouvertes, seront la sombre plaine de Wagram hallucinatoire. Les magnifiques costumes d’Agostino Cavalca sont d’époque, dames en robes ballonnées, bouillonnées, bouffantes, à manches gigots, coiffure à l’anglaise et grand chapeau mousquetaire pour certaine. Seule Thérèse de Lorget, la lectrice française déroge à ces engorgements bouffis de tissus par une tenue simple, robe droite  à taille haute et courte veste qui tient plus de la mode Directoire ou Empire. Les hommes sont en uniforme en général, à l’exception de Metternich, immense jabot noir d’oiseau de proie et manteau sombre qui lui prête, sous les lumières dramatiques d’Olivier Modol (d’après Christophe Forey) une sinistre pâleur de vampire dans le caveau de son bureau ténébreux. Les valets aussi sont « à la française. »

INTERPRÉTATION

     La distribution est aussi soignée et couronne l’ensemble. Derrière les masques grotesques, on reconnaît le joli timbre de Caroline Géa, et on apprécie ceux des invisibles Anas Seguin, Camille Tresmontant et Frédéric Leroy sous leurs déguisements carnavalesques. La voix somptueuse de Bénédicte Roussenq rend plus cruelle la pauvreté en chant dévolue à Marie-Louise, la mère attachante du début et la touchante Mater dolorosa de la fin  On saluera à deux mains, dans le rôle de l’historique danseuse Fanny Elssler, ici agent secret du complot en faveur du Duc étroitement surveillé, la performance de la belle Laurence Janot, qui danse et chante sa partie sur pointes qui n’altèrent pas la rondeur fruitée de sa voix. En double du Duc venue l’aider dans sa tentative d’évasion, Sandrine Eyglier campe, d’une sûre voix de soprano, une virile et héroïque Comtesse Camerata qui fustigera durement la faiblesse velléitaire de cet Aiglon aux ailes rognées dans sa cage. La voix cristalline et pure de Ludivine Gombert, toute douceur et humilité en Thérèse de Lorget, lectrice amoureuse de l’Aiglon, semble justifier joliment le surnom de « petite source » dont la baptise le Duc ému.

      Le ténor Yves Coudray, complice de scène d’Auphan pour Manon, campe un menu, malicieux mais remuant et insinuant Frédéric de Gentz, âme damnée conseillère ou Spoletta malfaisant de ce Scarpia machiavélique de Metternich. Le ténor Eric Vignau se glisse avec noblesse dans la peau de l’Attaché militaire, mandé par le Roi de France, mais chatouilleux sur la grandeur française. Yann Toussaint prête sa belle voix de baryton au Chevalier de Prokesch-Osten, donnant une humanité un peu naïve au personnage d’instructeur militaire autrichien ami du  jeune Duc. Dans le rôle du Maréchal Marmont qui avait trahi Napoléon dans les dernières batailles perdues d’avance, Antoine Garcin fait passer dans sa sombre voix de basse toute la lassitude humaine de tous ces combats incessants.

     S’amenant la réplique, la riposte cinglante de Flambeau : «  Et nous, les petits, les obscurs, les sans grades… », morceau d’anthologie du registre populaire mais sublime, qui fait passer le frisson de l’épopée et de la revendication encore révolutionnaire sur nos échines par la ronde faconde de la voix de Marc Barrard, goguenard grenadier et grandiose grognard : c’est l’un des sommets émotifs de l’opéra, opéré par un chanteur et acteur  exceptionnel dont le personnage d’homme du peuple donne à son suicide face au peloton d’exécution, l’élégance aristocratique des Romains stoïciens.

     Metternich a l’allure vocale et physique du baryton Franco Pomponi,  raide, impassible, inflexible, distant, arrogant au début, encore grandi par des ombres géantes, par sa cape noire flottante comme ailes de vampire face à son bureau aux lignes à peine soulignées de lumière blafarde. La scène d’hallucination haineuse face à Napoléon réincarné par son bicorne est encore un sommet, qui rebondit, dans un paroxysme crescendo dans la scène avec le Duc, destruction systématique et sadique des aspirations de grandeur du valétudinaire et aboulique jeune homme par une image de Père effrayant ramenant le garçon immature aux jupes et à la lignée historiquement névrosée de la mère, au drame historique non dit de la dégénérescence consanguine des Habsbourgs.

       Troisième sommet de l’opéra, la scène de Wagram. Stéphanie d’Oustrac nous a tellement  habitués à l’excellence dans tout ce qu’elle nous donné à voir et à entendre, du baroque à la musique du XXe siècle, de Lully à Poulenc, qu’on a du mal encore à qualifier sa performance vocale et dramatique, que l’on en vient à la trouver toute naturelle venant d’elle : injustice touchant toujours les gens de qualité. On ne s’étonne même pas que cette belle jeune femme, la féminité incarnée, se glisse dans l’uniforme et la peau de ce blond jeune homme avec une justesse si confondante qu’on en vient à l’oublier. Bien dirigée et sans doute contrôlée, sans faire le macho, elle donne à sa démarche, à sa voix, une fermeté virile crédible sans rien appuyer : elle est le personnage, dans son élégance, son assurance mais aussi ses doutes, ses faiblesses et ce drame d’enfant terrorisé, écrasé par l’ombre d’un père et de Metternich : traduit par la partition et ce rôle écrasant, présente pratiquement de bout en bout. Tout repose sur ses épaules, et, sans repos, au climax de l’œuvre, sur celles des soldats morts-vivants de Wagram, scène d’hallucination qui devient comme le résumé épique du héros plausible qu’il aurait pu être et ne fut pas. Sa voix de mezzo, qui se plie aux nuances, sait faire des limites aiguës du soprano du rôle, des râles de douleur, des cris de détresse bouleversants de vérité. Mais quelle diction, quelle beauté du phrasé comme dans la dernière scène, dans un seul souffle, presque le dernier :

       J’assurerai d’abord de ma reconnaissance

       Le cœur qui, se brisant, a rompu le silence.


Alors, si les deux vers des Méditations de Lamartine lus par Thérèse s’adressaient à l’Aiglon :

      Courage, enfant déchu d’une race divine,

      Tu portes sur ton front ta superbe origine,

nous adresserons ces deux autres à cette race d’artistes qui nous font sentir la transcendance :

     Borné dans sa nature, infini dans ses vœux,

     L'homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux.


    L'Orchestre et le chœur (même en coulisses) de l’Opéra de Marseille étaient aussi au diapason de l’exception. La langueur voluptueuse des valses contraste avec la cadence martiale des marches, des hymnes patriotiques dont on ne niera pas les vibrations émotionnelles qu’ils éveillent en nous, rythmés avec panache par Jean-Yves Ossonce dont la baguette, osons virile, évite cependant le claquant clinquant cuirassé de cuivres outrecuidants masculins à la caricature. Il y a, dans sa direction, un drapé joyeux de drapeau qui joue sans jurer avec le soyeux voltigeant des voiles festifs dans ce tissu sans coutures trop voyantes entre Honegger et Ibert, ce cocktail finalement grisant. Oui, les accents de La Marseillaise, même dans un pudique lointain horizon fondu de chœurs (Emmanuel Trenque), comme un souvenir malheureusement délaissé, nous donne envie de nous lever et saluer et la confusion de n’avoir pas osé le faire. Les chansons enfantines de la fin de l’Aiglon mourant, nous serrent la gorge qui se dénoue enfin par l’acceptation de l’émotion par les larmes aux yeux.

    Les nations, sans mémoire, meurent. Sans être idolâtre de Napoléon —et beaucoup ne l’étaient pas qui lui rendaient hommage— même dans ses naïvetés, il nous faut reconnaître que cette œuvre remue de nécessaires souvenirs nationaux qu’il ne faut pas abandonner aux abusifs nationalistes, dans de superbes et frappantes images visuelles et musicales. À une France d’aujourd’hui qui souffre et doute, peut-être n’est-il pas mauvais de rappeler ses gloires d’autrefois : un peuple vit aussi d’images d’Épinal.

L'AIGLON
de Jacques IBERT et Arthur HONEGGER
Production de l’Opéra de Marseille
13, 16, 18, 21 février 2016.
Orchestre et chœur de l’Opéra de Marseille
Direction musicale : Jean-Yves OSSONCE.

Mise en scène : Renée AUPHAN d'après Patrice CAURIER et Moshe LEISER. 
Décors : Christian FENOUILLAT.  
Costumes : Agostino CAVALCA. 
Lumières : Olivier MODOL d'après Christophe FOREY.

DISTRIBUTION
L’Aiglon : Stéphanie D’OUSTRAC ; 
Thérèse de Lorget :  Ludivine GOMBERT ; 
Marie-Louise : Bénédicte ROUSSENQ
 ; La Comtesse Camerata : Sandrine EYGLIER
 ; Fanny Elssler : Laurence JANOT
 ; Isabelle, le Manteau vénitien : Caroline GÉA.
Flambeau : Marc BARRARD
 ; Le Prince Metternich : Franco POMPONI
 ; Le Maréchal Marmont : Antoine GARCIN ; 
Frédéric de Gentz : Yves COUDRAY ; 
l’Attaché militaire français : Éric VIGNAU
 ; Le Chevalier de Prokesch-Osten : Yann TOUSSAINT ; 
Arlequin : Anas SEGUIN
 ; Polichinelle, un matassin : Camille TRESMONTANT
 ; Un Gilles : Frédéric LEROY.

Photos © Christian Dresse :

1. Salon de Schönbrunn; 
2. Le Duc et Thérèse de Lorget (D'Oustrac, Gombert);
3. Le Duc et Flambeau (D'Oustrac, Barrard);
4. Metternich (Pomponi);
5. Le Duc et Prokesh (D'Oustrac,Toussaint);
6. Fanny Elssler et le Duc (Janot, D'Oustrac) ;
7. Mort de Flambeau;
8. Wagram;
9. La mort de l'Aiglon (D'Oustrac, Roussenq).

jeudi, février 18, 2016



Samedi  27 février  salle Armand-Lunel  bibliothèque Méjanes (Cité du Livre à Aix)

rencontre autour de la vie et de l’œuvre d’Henri Tomasi, le compositeur marseillais d’origine corse (1901-1971)
.
-        A 14 h 30, la projection du film Le Requiem perdu , de Jacques Sapiéga (Copsi), en présence du réalisateur. Un document de 52’ magnifique, passionnant et émouvant à la fois, tourné en 1996, qui, à travers le premier enregistrement, en juillet 1996, du Requiem pour la paix , écrit après la guerre, disparu ensuite et enfin retrouvé, éclaire un moment particulièrement important de la vie de son compositeur.
-        A 16 h 30, rencontre avec Jean-Marie Jacono et Lionel Pons, co-réalisateurs du livre :  Henri Tomasi, du lyrisme méditerranéen à la conscience révoltée  (Presses Universitaires de Provence), la première synthèse de la recherche musicologique sur Henri Tomasi ; rencontre suivi d’une  écoute musicale en présence de Claude Tomasi, fils et biographe du compositeur.

THÉÂTRE NONO

 
Photo Max Minitti
 
RÉPÉTITION PUBLIQUE
BAROKKO
LE 12 MARS I 20H30
réservez vite car vous êtes déjà nombreux à l'avoir fait

Nous vous convions à venir assister à la dernière répétition publique de notre création 2017 BaroKKo !

Cet opéra-théâtre, dansé, chanté, joué par 22 artistes, est en train de naître. Nous aimons que les spectateurs s’associent à cette élaboration. 

 Le spectacle jouera avec les codes du baroque, les détournera, croisera la transe des processions et la véhémence des corps dansés, l’émotion du chant lyrique et les splendeurs trompeuses de la liturgie, une parole d'aujourd'hui et les images énigmatiques d’un univers pictural.

A l'issue de la répétition, les spectateurs sont invités à participer à une rencontre avec les artistes.


ENTRÉE GRATUITE
Réservez vos places dès maintenant :
04 91 75 64 59 | reservation@theatre-nono.com

Possibilité de restauration à partir de 19h00

et après le spectacle sur réservation

 Au menu:                              Flan de courgettes et son mesclun
                                         Encornet ou daube et son riz camarguais
                                                   Moelleux au chocolat

Au plaisir de vous accueillir,

 Marion Coutris, Serge Noyelle
& l'équipe du théâtre NoNo



 

www.theatre-nono.com
 
 





mardi, février 16, 2016

Le songe ou (cauchemar) d’une nuit d’été

 

THE FAIRY QUEEN
D’HENRY PURCELL
Opéra Grand Avignon
10 février 2016 février 2016

  Présenté comme semi-opéra, The Fairy Queen est, plus précisément ce que la tradition anglaise, depuis le XVIe siècle, appelait masque ou mask, une suite de divertissements scéniques musicaux, qui deviendront des intermèdes à des pièces de théâtre parlé au cours du XVIIe siècle, et l’on connaît la qualité de ceux de Purcell. Ainsi, la pièce fameuse de Shakespeare A Midsummer Nigth’s Dream, ‘Le Songe d'une nuit d'été’, fut dotée d’un livret (Elkanah Settle ?) en résonance mais sans correspondance précise avec l’intrigue de la pièce principale, ce qui eût été une redondance avec le texte principal, qu’il mit en musique. La première eut lieu au Dorset Garden à Londres, en avril 1692. La partition, perdue deux fois au XVIIIe siècle (sans doute non imprimée) fut redécouverte en 1901.

RÉALISATION ET INTERPRÉTATION
    Depuis la Tétralogie de Chéreau à Bayreuth en 1976, déjà précédé par Ponnelle, depuis donc un demi-siècle, nous sommes habitués –ou résignés– au règne des metteurs en scène qui trouvent sans doute indigne de leur talent de  s’abaisser à respecter la volonté historique des auteurs et s’adonnent à la « modernisation » arbitraire des œuvres avec ce désormais académisme du prétendu non académisme dans une naïve surenchère de l’originalité de leur « relecture », devenue un lieu commun des plus communs sur tous les théâtres. Certes, on peut difficilement dater les fantaisies oniriques de Shakespeare et Purcell, A Midsummer Night’s Dream (entre 1592 et 1595) et The Fairy Queen (1692) qui en était des intermèdes : leur monde d’elfes et de lutins sans âge laisse de la latitude temporelle au metteur en scène. Tout en concédant la liberté créatrice inaliénable de l’interprète qu’est le metteur en scène, le bond, –ou le gouffre– que lui fait franchir la par ailleurs talentueuse Caroline Mutel est sidéral, sidérant, en situant The Fairy Queen, cette ‘Reine des fées’, durant la Grande Guerre, même couronnée par l’Armistice à drapeau victorieux au vent ou fraternisation du soldat à casque à pointe couronnée d’une aigrette avec le Français, casque du coquettement paré d’un plumet tricolore, trinquant allègrement. En sorte que, à deux ans des commémorations du centième centenaire de la Grande Guerre, ou en plein anniversaire de la bataille, dix mois, de Verdun commencée en février 1916, dans ce belliqueux contexte, le texte humoristique de la pièce ne prête guère à rire, ni même à un lourdingue Sourire d’une nuit d’été de Bergman et le Songe et sa féerique musique, dans un décor de ruines (Denis Fruchaud et Analyvia Lagarde), des costumes d’époque (Pascale Barré) où ne manquent ni l’infirmière des urgences inutiles ni le prêtre, pour l’extrême-onction sans doute, s’engouffrent ici  davantage dans le cauchemar de la terrible boucherie de 14/18.

    Ainsi, Le poilu, uniforme couleur horizon, arrivant par la salle, fusil à l’épaule (sans pacifique fleur), un fanal à la main (souvenir de la lune de Pyrame et Thisbé de la pièce originale ?), jouant ensuite, livre à la main, le poète ivre, désamorce par l’explicite connotation guerrière du personnage, non son arme mais la plaisante chanson bachique bégayée qui est supposée faire rire malgré toute la beauté du timbre sombre de Frédéric Caton (Poète ivre / Sommeil / Hiver / Hymen). On a l’impression que tout est construit, passerelle un peu surélevée pour le monde des elfes, qui descendent ou condescendent vers les humains, que tout converge sur le lamento magnifique « O, let me weep… », chanté de façon déchirante par la mezzo Sarah Jouffroy (Deuxième fée / Le Mystère) sur le casque du soldat disparu. Mais la déploration sur la perte d’un être cher est intemporelle et le drame individuel se relativise et s‘amoindrit  dans la tragédie collective ou les pertes se comptaient par millions. 
   D’autre part, le livret de Purcell est très loin du texte de Shakespeare, et la distance que prend Mutel de celui-ci nous en éloigne tant –d’autant que, pour compliquer l’affaire, presque tous les chanteurs interprètent plusieurs personnages– il faudrait une clé des songes pour décrypter qui est qui et ce qui se passe sur scène, ce qui devient, au critique un « cauchemar plein de choses inconnues » comme disait Baudelaire de Goya, et la nécessité laborieuse de recourir aux photos des « bios » du programme pour identifier les interprètes.
     Occupant un vaste espace du plateau, l’orchestre des Nouveaux Caractères est sur scène à jardin, trompette et percussions à cour, tournant court forcément les déplacements des acteurs dans un espace rétréci, ouvert sur le fond, avec inévitable perte sonore pour les chanteurs selon leur place, la musique,  et encore plus les voix, que le veuillent ou non les mises en scènes « modernes », étant toujours fatalement spatialisée. La fraîcheur du joli soprano de Virginie Pochon (première fée) en fait les frais pour sa projection ainsi que le contre-ténor Christophe Baska (Le Secret / Été) trop distant. Derrière un voile nocturne en fond de scène, plus puissante, Caroline Mutel (La Nuit / Première femme) déploie le charme d’un soprano rond et voluptueux, déroulant ses belles et langoureuses vocalises. Mieux servi en ses déplacements vers l’avant-scène, le ténor Thomas Michael Allen, d’abord en insolite soutane (Automne / Un Chinois), s’impose agréablement. La soprano dramatique Hjördis Thébault, campe une Seconde femme qui mérite d’être première par la force et la souplesse d’un timbre séduisant, fruité, et d’une virtuosité qui défie la vertigineuse dentelle de vocalises de sa partie.
   Corydon est le nom traditionnel des bergers de l’Arcadie poétique. Est-ce alors un souvenir malicieux du premier vers des Bucoliques de Virgile : « pastor Corydon ardebat Alexim », ‘le berger Corydon désirait Alexis’, qui nous vaut la seule scène vraiment plaisante du spectacle, ce mariage gay qui clôt joyeusement la série matrimoniale entre un l’hilarant ténor Julien Picard (Mopsa) et un fort en gueule et voix magnifique Ronan Nédélec (Corydon)? Singularisé par une seule apparition finale en Phoebus affublé d’un pectoral doré très aztèque, le baryton Guillaume Andrieux est rayonnant en souriant astre du jour.
     Si l’on discute cette mise en scène, sans féerie ni surtout la folie dont se réclame la metteur en scène dans sa Note d’intention, d’une partition et d’un texte qui nous promènent dans les lieux rhétoriques du baroque lyrique fixés par Cavalli et adoptés dans toute l’Europe, La Nuit, le Sommeil, le Secret, le Mystère, les Saisons, il reste, heureusement, la merveille, vraiment féerique, impalpable et si concrète de cette musique de Purcell qui se cite, comme l’amorce de la gamme descendante du lamento de Didon, tel jeu sur des mots privilégiés.   

   À la tête des Nouveaux Caractères, Sébastien d'Hérin dirige cet ensemble baroque, certes apparemment moins nourri que celui dont bénéficia Purcell pour la création, de manière à la fois souple et précise, assez nourrie cependant, répondant bien à la chair des voix des interprètes qui, malgré les handicaps soulignés de la scène, ne sont pas éthérées ou décolorées par une conception moderne bien erronée de la réalité de la vocalité baroque attestée en documents. Longue suite de danses, dont une somptueuse chaconne finale très développée presque symphoniquement sertie du joyaux de songs, peut-être une simple version concert eût-elle suffi à notre bonheur.
    Même si certaines images, on ne le niera pas, sont belles, dont le dernier groupe de mondains festifs, avec ces lumières ombreuses de Fabrice Guilbert, entre veille et rêve, qui jouent avec art à paraître un éclairage baroque « naturel », avec rampe, cette rêveuse Nuit en transparence, la lumière dorée baignant l’orchestre, caressant les instruments. Mais, rapporté au texte, le traitement scénique guerrier, sans être pour autant effrayant est effarant plus que féerique.

l'Orchestre des Nouveaux Caractères.
Direction musicale : Sébastien d'Hérin.
Mise en scène : Caroline Mutel. Décors : Denis Fruchaud et Analyvia Lagarde. Costumes : Pascale Barré.
 Lumières : Fabrice Guilbert.
Distribution :
Première fée : Virginie Pochon.
 La Nuit / Première femme : Caroline Mutel. 
Seconde femme : Hjördis Thébault. 
Deuxième fée / Le Mystère : Sarah Jouffroy.
Le Secret / Été : Christophe Baska.
Automne / Un Chinois : Thomas Michael Allen.
Mopsa : Julien Picard.
 Poète ivre / Sommeil / Hiver / Hymen : Frédéric Caton. 
Corydon : Ronan Nédélec.
 Phoebus : Guillaume Andrieux.

Photos fournies par l'Opéra grandAvignon

mercredi, février 10, 2016

LE MONDE EN MUSIQUES


Espace des Libertés - Aubagne
✦ Nabankur BHATTACHARYA & Maitryee MAHATMA [Tablas et danse indienne]

✦ Lévon MINASSIAN
[Musique d'Arménie & doudouk]

✦ Maria SIMOGLOU [Chants grecs]

✦ Ensemble SERAPHICA [Polyphonies corses]

✦ Dorsaf HAMDANI [Chant classique tunisien] avec l'aimable participation de Fouad DIDI

Programme sous réserve de modification
Durée : 1h40 environ

Retrouvez les tarifs et informations pratiques ici.




MASTER-CLASSES #2 | Du 8 au 19 février
Conservatoire d'Aubagne
Le concert #2 est organisé suite aux master-classes données par
ces mêmes artistes du 8 au 19 février au Conservatoire d'Aubagne.

À l'occasion de ces ateliers vocaux et musicaux, les artistes, les participants et l'équipe de l'IIMM se tiennent à la disposition des médias pour répondre à de courtes interviews, séances photos
ou séquences filmées.

mardi, février 09, 2016

ENFANTIN SANS ENFANTILLAGE



CONCERTANT CHEVALIER DÉCONCERTANT

LE CHEVALIER DÉCONCERTANT

Récit en musique de Raoul Lay
Livret de Raoul Lay et Charles-Éric Petit, d’après E. Raspe
Création 
Vendredi 5 février
 Bibliothèques Départementales Gaston-Defferre,
Marseille
            Moins déconcertant chevalier que concertant car tout concerte ici, musique, mise en scène et texte pour faire de ce Münchhausen en herbe, bavard baron, bavasseur bambin barré, bardé de bobards, de phrases, pris au mot, aux jeux de mots, non un concert sinon ce qu’au XVIIIe siècle, après Rousseau et son Pygmalion, on appellera, au sens strict du mot, un mélodrame, du théâtre déclamé entre et sur de la musique (le Tchèque Benda s’en fera une spécialité et même Mozart sacrifiera au genre avec Thamos, roi d’Égypte, le Pierrot lunaire de Schönberg en étant un moderne avatar).
         Mélodrame, mini drame de minots en l’occurrence, sans outrance minimisé grâce au charme d’un texte de Raoul Lay et Charles-Éric Petit qui sait jouer, sans emphase, de l’enfance sans infantilisme, déjouant le piège dramatique de la cruauté enfantine des cours de récré, des bancs impitoyables de l’école, où Rudolf, jouant malgré lui les têtes de turc, va devenir, par le jeu, la tête d’un groupe d’amis,Wolf, Bolto, Flynt et Owen, se jouant du harcèlement, des persécutions, résistant à l’agression par l’arme du verbe : les mots contre les maux. Plutôt que de devenir une grande âme d’avance trahie par la vie, il met de l’art, de l’imaginaire dans la vie.
         Les six musiciens arrivent (et repartiront) au grand galop désordonné d’écoliers turbulents dans la salle de classe quand la cloche sonne l’entrée et la sortie et les instruments deviennent faciles facéties, clarinette longue-vue, cordes pincées du clavier, bâillement de l’accordéon, miaulements, couinements, prélude forain étirant les tonalités, qui n’a pas oublié la valsante fête foraine de Wozzeck, comme la rythmique parfois cligne du coin de l’œil vers L’Histoire du soldat de Stravinsky. Directeur de l’Ensemble Télémaque voué à la musique contemporaine qui court l’Europe et créateur du PIC qui la reçoit (Pôle Instrumental Contemporain), le compositeur Raoul Lay, dont on sait la vaste culture musicale, nous offre en souriant ses citations amicales insérées dans son complexe tissu personnel musical, et dirige du piano, avec la minutieuse rigueur et la gestuelle géométrique qu’on lui connaît, ses musiciens ravis.
         Le texte s’amuse à être amusant et nous amuse, nous prenant dans son jeu, mais sans abus d’enfant ou d’enfantillage, semé de jeux de mots pas trop téléphonés : l’écrivain qui se livre »,  « le canard qui se confie », « le canard laquais », sur des cocasses caquètements cancannants de la musique, et les images plaisantes fusent : « le binoclard, têtard à hublots », « la meute des mâles », « l’agité du bocal ».
         C’est plaisant sans forcer la note, mais les notes suivent : onomatopées musicales, transcriptions sonores de bulles de bandes dessinées qui font partie d’un répertoire devenu aujourd’hui patrimoine moderne : coups de timbales, vibrations du vibraphone, pépiement de flûte, éclat décalé expirant de trompette comme un pneu qui se dégonfle. La musique dessine, anime par ses figures ces figurations de dessin animé.

         Tous les musiciens entrent dans un jeu autant réglé par la musique que par la mise en scène, pratiquement musicale, d’Olivier Pauls. Il est vrai qu’il joue et jouit d’un instrument exceptionnel avec la comédienne Agnès Audiffren, aussi à l’aise dans les grands rôles tragiques que dans cette comédie qui l’insère étroitement, chorégraphiquement, en musique, dans la musique et entre les musiciens. Chaussée de bottes,  chemise à jabot, jaquette dix-huitième siècle, affublée et offusquée d’une fantaisiste perruque bicolore, elle se glisse avec souplesses ou fausse maladresse garçonnière entre les musiciens, entre notes et mots qu’elle nous distille avec une grâce et un humour, irrésistibles, nous tenant en haleine pendant près de cinquante minutes, sans répit, avec un texte à une voix, paradoxale monodie polyphonique, unique par le narrateur impersonnel qui conte, et multiple par les personnages qui racontent, la bande des cinq, les cinq galopins attendrissants. Coulée dans la musique, admirablement dirigée, elle joue une partition physique, visuelle de tout son corps et de son mobile visage où passent toutes les émotions.
         Finalement, cette parabole, sans fariboles, s’envole, à son échelle modeste, du côté des grands fous dont la folle sagesse rachète la folle folie du monde : Don Quichotte au grandiose, poétique et éternel esprit d’enfance.
         Bon enfant mais non infantilisant, pour enfants et grands, inscrit dans le programme de Télémaque, Grandes musiques pour petites oreilles, ce récit musical nous invite sympathiquement à les ouvrir toutes grandes, même nous, qui ne sommes pas petits.

Photo ©ensembletelemaque : Agnès Audiffren

LE CHEVALIER DECONCERTANT
Création  - Récit en musique - à partir de 9 ans
Musique : Raoul Lay
Livret : Raoul Lay et Charles-Eric Petit, d'après E. Raspe
Mise en scène : Olivier Pauls
Comédienne : Agnès Audiffren
Musiciens : Charlotte Campana, flûte; Linda Amrani, clarinette ;  Gérard Occello, Trompette ; Solange Baron, accordéon ;  Christian Bini, percussions ; Raoul Lay, Clavier Electrique, samples et direction.

PROJET PÉDAGOGIQUE
Entre janvier et mai 2016, une centaine de collégiens - Henri Barnier (16ème), Jean Moulin (15ème), Darius Milhaud (12ème) - vont suivre des ateliers de pratique vocale et percussions pour donner, aux côtés des musiciens de Télémaque, une version « enrichie » du Chevalier Déconcertant en mai 2016 à l'Alhambra.

CALENDRIER DES REPRÉSENTATIONS
Jeudi 4 février à 14h30 au PIC – 16ème arr. (Séance scolaire)
Vendredi 5 février à 14h30 à la Bibliothèque Départementale Gaston Defferre – 3ème arr. (Séance scolaire)
Vendredi 5 février à 19h00 aux Bibliothèques Départementales Gaston-Defferre – 3ème arr.
Samedi 6 février à 15h00 au Château de la Buzine – 11ème arr.
Mercredi 10 février à 15h00 au Musée du Château Borély – 8ème arr.
Jeudi 11 février à 10h00 et 15h00 à l'Atelier des Arts – 9ème arr. (séance centres aérés).

PROGRAMME DU PIC (Pôle Instrumental Contemporain)
36 montée Antoine Castejon,
13016 MARSEILLE

Réservations : 04 91 39 29 13
13 mars 17h30
 : MALUCA BELEZA Quintet musique brésilienne - jazz
25 mars, 19h00 :
 CHŒURS DE FEMMES -Biennale des écritures du réel
26 avril 19h30 :
 ENSEMBLE TÉLÉMAQUE
 : Concert en partenariat avec la Casa de Velázquez
 de Madrid

31 mai 19h30 : 
COMME JE L'ENTENDS

Benjamin Dupé




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