Figurations fugitives sur les petits
formats
de Johanna Heeg
Théâtre Toursky,
9 décembre 2016
Sur
la forme contenue des brefs formats, sur des fonds foncés ou à peine éclairés
d’un frottement furtif d’un pinceau diluant les ombres, un foisonnement de
figures sombres, une farandole futile ou funèbre, figuration fantasque ou
fantastique d’une foule en mouvement, en action, surgie d’un horizon lointain
du temps, voulant déborder le cadre et s’épandre sur les murs, des faces dont
s’effacent les traits pour ne laisser subsister que l’expression, un sentiment : deux sœurs effrayées, une séduction effarée,
des passantes affairées, frimousses fraîches d’enfants ou faces fanées,
fantomatiques, frissonnantes d’effroi, de froid (?), pullulement d’un peuple
pressé ou oppressé, brossé, frotté d’un pinceau
à la pâte épaisse, on dirait, linguistiquement et musicalement,
« fricatif », au chromatisme obscur sur des fonds fluidifiés de bleu
ou d’un jaune timide, brusquement illuminé, comme un soleil, d’un orange
éclatant sur la brume d’un corps, une ombreuse palette où la tache colorée est
touche musicale, harmonie globale où la note, la couleur, se fond, se confond,
estompe les contours des formes, en semble effacer les frontières linéaires
pour les fusionner dans une génération, une germination, un engendrement
effervescent de vie aspirant, de la pénombre, au jour. Des regards pointus,
ponctuels : des points intenses qui tiennent lieu d’yeux, avides, pleins
d’angoisse, d’interrogation, d’interpellation, d’attente du nôtre. Sur des
visages vides, sur des rivages, des rives et des dérives du temps, ils sont pleins
d’une vie finie ou qui n’en finit pas de s’acharner à vivre aujourd’hui en
habits d’ailleurs et d’autrefois.
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