Enregistrement
19/12/2016, passage, semaine du 9-15/1/2017
RADIO DIALOGUE RCF
(Marseille : 89.9 FM, Aubagne ;
Aix-Étang de Berre : 101.9)
« LE BLOG-NOTE DE BENITO » N° 253
lundi : 12h15 et 18h15 ;
samedi : 17h30
La Bonne Chanson, David Lefort, ténor, Simon
Zaoui, piano, 1 CD Hortus
Semaine 2
Les
éditions musicales Hortus, qui se sont hautement signalées par leur immense
collection des Musiciens et la Grande Guerre, avec déjà plus de vingt volumes
et qui devrait se poursuivre jusqu’en 2018, centenaire de l’armistice du 11
novembre, n’en continue pas moins, par ailleurs, de sortir des sentiers battus.
En effet, explorant de nouvelles voies, des chemins, exploitant de nouvelles
voix comme dans cette parution, le label offre au ténor David Lefort un second disque avec son complice le pianiste Simon Zaoui, après leur CD Biondina, cycle rarissime de Charles Gounod. Il s’agit cette fois de
Paul Verlaine, La Bonne chanson.
Certes, Verlaine est un poète qui a beaucoup
inspiré les musiciens, sans doute moins parce qu’il se flattait d’une écriture
toute musicale, ne voulait-il pas, disait-il, « de la musique avant toute chose », que par le fait, pratique,
que sa poésie, bien modeste dans sa forme, sans grandes envolées lyriques ou
épiques, est essentiellement composées de formes brèves, de poèmes délicats et
charmants, des états d’âmes souvent, des paysages intérieurs qui se prêtent à
la mise en musique souvent plus sage qu’audacieuse, malgré les réussites
indubitables de son contemporain Fauré, qui semble respirer le même air, le
même air musical que lui, ou Debussy,
plus tardif et orfèvre en poésie musicale, ou encore, tout en nuances, Reynaldo Hahn.
Ainsi, ce disque, qui embrasse trois siècles,
le XIXe, le XXe et le XXIe inclut intégralement
le célèbre cycle de La Bonne Chanson de Gabriel Fauré (1845-1924),
rien de nouveau. Mais, à côté de ce classique, trois créations. d’Emile
Naoumoff (né en 1962) commandées pour l’occasion au compositeur Par
ailleurs, l’intérêt s’accroît des pièces
inspirées par le même recueil de Verlaine : quatre de Charles Koechlin (1867-1950), inédites, donc inouïes, et deux mélodies de Nadia Boulanger (1887-1979), dont une, inédite que nous écouterons.
Pour compléter le panorama de ces pièces à la filiation fauréenne délibérée,
non seulement vocales mais pianistiques, deux nocturnes pour piano solo de Fauré, le N° 6 en ré bémol majeur, opus 63 et le N° 7 en ut dièse mineur opus 74, et le Choral sur le nom de Fauré opus 73 de
Charles Koechlin, offrent
au pianiste Simon Zaoui,
accompagnateur attentif et brillant des mélodies, de donner toute la mesure soliste
de son talent.
Quelques mots sur ce recueil La
Bonne chanson, écrit par le poète entre 1869 et 1870 et paru en 1872.
Considéré aujourd’hui comme mineur par la critique, il était pourtant estimé
par Verlaine, sur la fin de sa vie, comme son préféré. Sans doute pour des
raisons autobiographiques qui lui donnent une place à part dans sa production.
Mais écoutons d’abord l’inédit de Nadia
Boulanger, tiré du recueil Sagesse,
qui figure ici. Je vous en lis trois strophes, soulignant juste les jeux de son, deux paronomases et deux allitérations :
Écoutez la
chanson bien douce
Qui ne pleure que pour vous plaire.
Elle est
discrète, elle est légère :
Un frisson
d’eau sur de la mousse !
La voix
vous fut connue et chère,
Mais à
présent, elle est voilée,
Comme une
veuve désolée.
Pourtant,
elle est encore fière,
Et dans les
longs plis de son voile
Qui palpite
aux brises d’automne,
Cache et
montre au cœur qui s’étonne
La vérité
comme une étoile.
Écoutons la délicate version musicale de Nadia
Boulanger par le ténor David Lefort accompagné par Simon Zaoui au piano :
1)
PLAGE 1
Verlaine (1844-1896) appelait
chansons les poèmes « naïfs », dit-il, de ce recueil qu’il destinait,
en cadeau de mariage à la jeune Mathilde
Mauté de seize ans qu’il rencontre en 1869, dont il tombe éperdument
amoureux et qu’il va épouser l’année suivante. Chaque poème d’amour tendre,
éperdu, dans la tradition lyrique du romantisme finissant, est un hommage à
cette jeune fille qui lui fait vivre un bref bonheur avant que ne s’abatte, à
peine un an après leur mariage, sur leur vie, leur demeure, la tornade Rimbaud,
la passion, la folie. Verlaine, abandonnant sa femme, battue et violée par leur
hôte —elle demande le divorce— part, s’enfuit donc avec le jeune et génial
Arthur, qu’il appelle « son époux
infernal ». Liaison tumultueuse qu’ils traînent de Londres à
Bruxelles, où un coup de révolver de Verlaine à son amant lui vaut trois ans de
prison.
Il est évident que,
rétrospectivement, La Bonne chanson
dut paraître au poète sombrant dans l’alcoolisme, dont il devait mourir à
cinquante et un ans, comme un épisode nostalgiquement heureux de sa vie
accidentée.
Mais écoutons un inédit de Charles Koechlin, son traitement
musical très expressif du poème descriptif « Le Paysage dans le cadre
des portières », d’un train :
2) PLAGE 18
Le ténor David Lefort, d’une voix
qui varie les couleurs, les volumes, vibrant ou détimbrant la voix, sans hésiter
aux forte et fortissimo, qui étonnent sinon détonent dans la tradition de la
bienséance plus pudique, plus retenue, arrache la mélodie à la maladie salonarde française qui tombe parfois dans
une mièvrerie donnée trop souvent en France pour le bon goût. Nous le quittons avec la
création d’Émile Naoumoff, « Soleils couchants », tiré du recueil des
Poèmes saturniens :
3) PLAGE 21
La Bonne Chanson,
David Lefort, ténor, Simon Zaoui, piano, 1 CD Hortus 132 – 72’43,
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire