Enregistrement
9/1/2017, passage, semaine du 30/1/4/2/17
RADIO DIALOGUE RCF
(Marseille : 89.9 FM, Aubagne ;
Aix-Étang de Berre : 101.9)
« LE BLOG-NOTE DE BENITO » N° 257
lundi : 12h15 et 18h15 ;
samedi : 17h30
Un CD Hortus : Schubert de l’unité au fragment
par Matteo Fossi .
Semaine 5
Les éditions musicales Hortus, je le disais
dernièrement, se sont signalées par leur immense collection des Musiciens
et la Grande Guerre, avec déjà plus de vingt volumes, qui devrait se
poursuivre, je le répète, jusqu’en 2018, centenaire de l’armistice du 11
novembre. Cependant, voici encore une preuve que cette mine immense n’épuise
pas sa veine, puisque, à côté de disques avec des pièces rares ou inédites de
musiciens modernes, le label explore aussi les sentiers de l’histoire de la
musique. Ainsi, ce CD Schubert de l’unité au fragment par Matteo Fossi, brillant pianiste italien.
Le premier morceau, c’est la célèbre Wanderer-Fantasie,
opus 15, D. 760 : je rappelle, opus,
signifie ‘œuvre’ en latin, c’est le mot qui sert à numéroter les ouvrages des
compositeurs et le D, c’est l’abréviation du nom de celui qui en a fait le
catalogue, Otto Erich Deutsch , comme pour Mozart Köchel, signalé par un
simple K. Donc, le pianiste Matteo Fossi
a composé ce disque en partant de ce morceau pianistique assez monumental
de Schubert, d’un seul tenant d’une durée de près de vingt-deux minutes, pour passer avec les trois autres opus qui suivent,
à des pièces plus courtes, fragmentées : à savoir Drei Klavierstücke D 946,
trois pièces posthumes, respectivement de neuf, onze et huit minutes environ,
témoignages probables d’un troisième cycle d’improvisations ou d’impromptus de
Schubert ; vient ensuite la Sonate D 840, dite « Reliquie »,
restée incomplète puisqu’elle ne compte que deux mouvements de quatorze et huit
minutes chacun, et enfin le disque s’achève sur la Sonate D 571, dont il ne
reste que six minutes, à savoir l’exposition
et un fragment de développement du premier mouvement.
C’est, en quelque sorte, un voyage que je dirais presque d’hiver, en référence au cycle de
lieder qui porte ce nom, écrit un an avant sa mort à trente et un ans, un
voyage intérieur comme si Schubert (1797-1828), entre 1817 et 1828 —l’éventail
chronologique de ces œuvres— se renfermait graduellement en lui-même, passant
de l’unité au fragment.
Le
premier morceau, la fameuse Wanderer-Fantasie en Do majeur, de
1822, est la seule de Schubert éditée de son vivant, en 1823, sûrement parce
que c’est est l’une des rares œuvres qu’il composa sur commande d’un pianiste
virtuose viennois, un aristocrate connu. Le nom vient d’un de ses lieder, Der Wanderer, de 1816, ‘Le promeneur’,
‘le voyageur’, dont il reprend le thème et en fait les variations. Cette
fantaisie est exceptionnelle par sa virtuosité qui fascinera et inspirera Liszt
car, même excellent pianiste, Schubert semblait douter de lui. Mais sans doute
voulut-il ici, avec un bel optimisme sensible, mettre en valeur les capacités
de son commanditaire. Cette fantaisie, d’un seul tenant, a quatre parties
enchaînées comme un souvenir de la forme sonate qu’elle n’est pas, mais elle
est l’exacte contemporaine de la célèbre Symphonie
no 8 en si mineur, dite justement « Inachevée »,
D. 759 , aussi de 1822, qui ne dure qu’une demi-heure environ. Écoutons un
extrait de la Wanderer-Fantasie, un martèlement vigoureux, presque
joyeux :
1) PLAGE 1
Le morceau qui lui succède, c’est Drei
Klavierstücke D 946, ‘trois pièces pour piano’, posthumes. Elles furent
ainsi nommées par Brahms qui les édita en 1868 et s’en inspira. Elles ont été
composées par Schubert en 1828, six mois avant sa mort. Nous allons écouter un
bref extrait de la première, un mouvement allegro, en rondo, c’est-à-dire avec
un thème qui revient comme dans une ronde :
2) PLAGE 2
La Sonate
pour piano en ut majeur D. 840 est clairement une sonate inachevée.
Elle fut surnommée « Reliquie », ‘Relique’, par le premier éditeur,
en 1861, sans doute pour toucher la corde sensible des éventuels interprètes
acheteurs de la partition, car le pauvre Schubert eut après sa mort un succès
qu’il n’eut pas de son vivant, et il la présenta comme sa dernière sonate,
inachevée à coup sûr par le malheur. L'autographe est cependant clairement daté
d'avril 1825.
On ignore pourquoi Schubert la laissa inachevée.
Elle ne comporte que deux mouvements, un Moderato et un Andante, le Minuetto et
le Finale, qui auraient fait les quatre parties de la sonate canonique,
n’existent que sous la forme de vagues ébauches. Le premier mouvement, Moderato
est très développé et l’on peut imaginer que Schubert envisageait peut-être de
donner à cette sonate des dimensions comparables aux ultimes sonates, D 959 et
D 960. Le premier mouvement, Moderato, est inquiet, étrange, l’Andante en ut
mineur qui suit est sombre, baigné de nostalgie , nous en écoutons un
extrait :
3) PLAGE 6
Ce beau CD qui
nous promène dans l’âme de Schubert, se clôt par la Sonate no 8
en fa dièse mineur, D. 571.
Elle est de 1817, une année où Schubert semble subir une crise, un creux de son
inspiration. Il n’en reste que ce fragment du premier mouvement de quelque six
minutes. Et pourtant, quelle étrange et prenante poésie que ce début ! Dans
le grave du piano, une figure obstinée de cinq notes brèves, des croches, en
arpège ascendant, qui semblent hésiter, qui ne font pas une mélodie, comme
impossible à souder entre elles, trouées par un silence, telles des vaguelettes
obsédantes, infimes mais aspirant à un infini qui soudain déferle en vague aux
deux mains, le grave et l’aigu s’unissant, déferlant sur l’espace. Nous nous
quittons sur ses accords prenants :
4) PLAGE 7 : FIN ET FOND
Un CD Hortus : Schubert de l’unité au fragment
par Matteo Fossi .
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