VIOLETTES IMPÉRIALES
(1948)
Opérette de Vincent Scotto
Livret de Paul Achard, René Jeanne
et Henri Varna
21 mai 2017
Comme dans les feux d’artifices, ce
spectacle, joli bouquet final, aura couronné brillamment la belle gerbe
d’opérettes et de récitals lyriques dans ce temple du chant et du jeu qu’est
devenu l’Odéon, dignifiant d’opéra l’opérette.
Déjà La Veuve joyeuse de Franz
Lehár nous avait laissés la joie à cœur et à jardin ensuite fleuri par ces
violettes embaumées : déjà une équipe de chanteurs acteurs remarquables
des premiers aux derniers rôles, tous solidairement soudés par une mise en
scène réglée au cordeau d’Olivier
Lepelletier, tous dignes d’éloges et trop nombreux pour être cités.
Même pari réussi par cette dernière
floraison, sous la baguette badine de Bruno
Conti pour la fosse et la férule fleurie de Jack Gervais pour le plateau. On sourira, en touriste, de cette
Espagne de carton-pâte, plate carte-postale, si l’on peut rire, en espagnol, de
ces « Madonna ! » italiens et en rien hispaniques et cette
impensable et impossible église romane à Séville. En guise d’autres décors,
d’accord, de simples toiles peintes, pimpantes (Loran Martinel), quelques souvenirs de Goya dans de vagues tableaux.
Bon, rire, sourire, mais pas de ricanement : les temps sont durs pour les
décors en… D’autant que la fastueuse débauche de costumes, si l’on passe sur
les chemisiers des hommes de l’acte I, plus propres du Carnaval de Rio que de
l’austère Andalousie, est souvent d’une grande beauté et d’une grande justesse
et raffinement à la fois hispanique et historique, jusque dans la teinte parme,
violette, de ceux situés au cœur du Paris du Second Empire et ses robes à crinolines
et tournures bien tournées qui font des femmes des fleurs corolles retournées à
tourner les têtes dans les valses. La Maison
Grout qui les fournit mérite des applaudissements pour son bon goût.
Le thème de la vendeuse de
violettes, qui vivra un conte de fée, était à la mode depuis la chanson
espagnole La violetera de José Padilla (1914), popularisée par la
chanteuse et actrice Raquel Meller,
mélodie si célèbre mondialement que Chaplin
l’inclut dans ses Lumières de la ville
(1931). L’intrigue, de l’opérette corse la banale historiette d’amour en la recoupant
avec la grande Histoire, la prédiction, semble-t-il authentique, faite à
Eugénie de Montijo (à Grenade et non Séville) qu’elle serait un jour « plus
que reine » : Impératrice donc. Ici, la gitane du légendaire présage
est en fait une modeste vendeuse de violettes sévillane séduite par un
aristocrate local, la bergère et le Prince. Leurs amours, traversées par
l’intransigeante mère de l’amant (une Simone
Burle méconnaissable en altière douairière inflexible) seront enfin
couronnées grâce à une Eugénie à couronne impériale reconnaissante envers sa
prophétesse.
Dépits amoureux, un comte, des comptes à régler, prises, surprises
et méprises, travestissements et autres facéties : comme dans un bon
vaudeville, tout le monde, amants mécontents, manants, aristos, filous et
filature, se retrouvera à Paris, chez la généreuse Eugénie (la délicieuse Perrine Cabassud) ayant épousé Napoléon
III (Cyril Cosson, rôle muet). C’est
simple mais sympathique et drôle et drôlement joué par une troupe menée tambour
battant par le chef et le metteur en scène, sans un temps mort, remarquable
prouesse eu égard aux nombreux changements de costumes, au rythme soutenu, sans
un temps mort même avec les nombreux passages dansés, chorégraphiés avec grâce
et culture par Estelle Lelièvre-Danvers,
qui sait même passer avec élégance de la danse du peuple andalou à cette danse
andalouse popularisée enfin dans les nobles salons : séguedilles,
fandangos et boléros, même danse classique pour l’épisode parisien, servi par
une admirable troupe de danseurs, dont elle-même à pied, à point, à pointe
d’œuvre.
Cette opérette
est une espagnolade sans malice, une musique savamment peuple de Vincent
Scotto, enchaînant des airs entraînants, une marche pour la marchande
(« Qui veut mon bouquet de violettes ? »), un chœur de
l’anisette, du Guadalquivir, les couplets de l’amoureux (« C’est pour toi
que je chante ») et un tourbillon de valses au milieu des espagnoles, même
un chahut-cancan parisien (danse en fait dérivée de la cachucha d’Espagne interprétée par la danseuse Fanny Elssler qui fit sensation à Paris en 1836) dont les danseurs
se tirent encore, jonglant avec ces styles, avec une tonique virtuosité et
rivalité qui n’a sans doute rien à envier aux célèbres Goulue ou Valentin le
désossé immortalisés par Toulouse-Lautrec.
Violeta est
campée, cambrée avec grâce par Cécile
Arbel, souple soprano, qui s’offre le luxe de chanter, distribuant au
public ses violettes, en parcourant la salle, sans perte de timbre dans
l’acoustique pourtant ingrate d’une vaste salle feutrée de moquette et
fauteuils veloutés. Don Juan, est le solide et chaleureux baryton Lionel Delabruyère : couple crédible
et bien audible de jeunes premiers. Mais, en jeunes seconds de comédie, le
couple Rosette et Loquito, Julie Morgane,
délicieuse en robe de petite fille modèle d’abord, et son amoureux, Grégory Juppin, sont dignes de la
comédie musicale américaine, jouant, chantant, et joliment, mais, en plus
dansant mieux que bien, acrobatiques.
Tous les
comparses sont à citer : Sabrina Kilouli, Pepa, la morgue des
mères nobles (Simone Burles et Silvi Abovici, en Madame de Montijo
pincée —qui fut maîtresse de Mérimée…), Michel
Delfaud. De Serafina, Jeanne-Marie
Lévy fait un solide rôle de grande comédie, drue et drôle, faisant Comte et
mécompte et finalement fière paire, beau numéro, avec le Picadouros toujours
irrésistible de Dominique Desmons.
Quant à Claude Deschamps, Estampillo
multiforme, aux multiples travestis mais toujours égal à lui-même, son visage,
sa voix, ses gestes, en à peine quelques répliques, une expression, une
inflexion, un mouvement, sans même se poser ni chercher à s’imposer, il est
comédie, théâtre.
De grands
artistes qui prouvent qu’il n’y a pas de grande et petite œuvre, opéra ou
opérette, mais des spectacles dignifiés par le travail et le talent.
Violettes impériales
de Francis Lopez,
Marseille, théâtre Odéon,
20 et 21 mai
Direction musicale : Bruno
CONTI
Chef de chant : Caroline OLIVEROS
Mise en scène : Jack GERVAIS
Assistant mise en scène : Sébastien OLIVEROS
Chorégraphie : Estelle LELIEVRE-DANVERS
Chef de chant : Caroline OLIVEROS
Mise en scène : Jack GERVAIS
Assistant mise en scène : Sébastien OLIVEROS
Chorégraphie : Estelle LELIEVRE-DANVERS
Distribution
Violeta : Cécilia
ARBEL
Eugénie : Perrine CABASSUD
Sérafina : Jeanne-Marie LÉVY
Rosette : Julie MORGANE
Madame d'Ascaniz : Simone BURLES
Eugénie : Perrine CABASSUD
Sérafina : Jeanne-Marie LÉVY
Rosette : Julie MORGANE
Madame d'Ascaniz : Simone BURLES
Don Juan :Lionel
DELBRUYERE
Picadouros : Dominique DESMONS
Estampillo : Claude DESCHAMPS
Loquito : Grégory JUPPIN
Macard : Michel DELFAUD
Napoleon III : Cyril COSSON
Picadouros : Dominique DESMONS
Estampillo : Claude DESCHAMPS
Loquito : Grégory JUPPIN
Macard : Michel DELFAUD
Napoleon III : Cyril COSSON
Chœur Phocéen, chef de chœur :
Rémy LITTOLFF
Orchestre du Théâtre de l'Odéon/
Orchestre du Théâtre de l'Odéon/
Photos :
Christian Dresse
1. Danses sur la place ;
2. Danses de salon ;
3. Les travestis (Desmons, Lévy, ) ;
4. Chanteurs, danseurs (Morgane, Juppin) ;
5. Couple impérial et couple d'amoureux (Cosson, Cabassud et Arbel, Delbruyère) ;
6. Saluts.
1. Danses sur la place ;
2. Danses de salon ;
3. Les travestis (Desmons, Lévy, ) ;
4. Chanteurs, danseurs (Morgane, Juppin) ;
5. Couple impérial et couple d'amoureux (Cosson, Cabassud et Arbel, Delbruyère) ;
6. Saluts.
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