UN CRÉPUSCULE À LA ROQUE
XXXVe FESTIVAL INTERNATIONAL DE
PIANO DE LA ROQUE DʼANTHERON
24 juillet au 21
août 2015
Estival
se cache sous festival. Par la vertu de la consonance, on ferait presque des
synonymes de ces mots. Mais on en ferait encore un autre avec le Festival de Piano de La Roque
d’Anthéron tant la gageure initiale du premier, dans le cœur battant du parc du
château de Florans, il y a trente-cinq ans, comme un caillou lancé dans une
onde calme, a étendu ses palpitantes ondes telles les harmoniques d’une note de
plus en plus larges jusqu’à un infini de silence et de rêve charmés, dans une
diversité de musiques et de lieux.
Le piano et ses lieux
Des lieux où la
musique a trouvé, tout harmonieusement, le sien. Car le Festival, éclos à
Florans, a essaimé harmonieusement et fleuri à l’ombre des divers clochers des
jolies petites villes et villages d’alentours, Cucuron, Lourmarin, Rognes,
Lambesc, jusqu’aux aux verts bocages aquatiques de l’étang des Aulnes de
Saint-Martin-de-Crau, en passant par lʼAbbaye de Silvacane et les pudiques
paupières de son cloître, dans de hauts lieux du patrimoine culturel ou naturel
provençal comme le Théâtre des Terrasses de Gordes, et, désormais, à
Aix-en-Provence, le Grand Théâtre de Provence ou à Château-bas de Mimet.
On n’en retiendrait
que deux, naturels, et l’on saluerait la pari gagné de ce festival multiple en
un, déjà ancien mais toujours nouveau : les carrières de Rognes et l’Etang des
Aulnes, la pierre dorée et l’eau argentée. Coupée à angles vifs dans le beurre
calcaire de la colline, la carrière étage ses cubes creux de ville géométrique
virtuelle, dont les surfaces virent du jaune à l’or, au roux, dans la lumineuse
patine progressive des crépuscules d’été. Des pins hirsutes griffonnés sur leur
crête, quelque brouillonne broussaille tombant avec des nonchalances de
chevelure, adoucissent la rigueur géométrique des lignes pures. Ici règne
souvent le jazz mais, cette année, aussi le tango.
Les Aulnes se nichent
dans un creux de la Crau, à Saint-Martin. Longue ligne de lauriers-roses, de
peupliers verticaux au bout, le plan d’un vaste pré, une inflexion douce du
relief et, en contrebas, un étang buvardant de ses eaux plates les teintes
mourantes du soleil, lumineux miroir ensuite à un astre pour nous disparu. A
gauche, une belle bastide restaurée ; à droite, une grange aménagée où la
musique est chez elle, comme de toute éternité.
Réduire le Festival de Piano de La
Roque d’Anthéron à un feuillet, c’est résumer la forêt à un arbre et l’arbre à
une feuille : plus de soixante et dix concerts en un mois, divers en lieux et
en horaires.
Il y a une heure, au
crépuscule, où les choses brillent mieux, surtout à la charnière d’août et son
jour déjà déclinant tamisé par la frondaison heureuse des grands arbres. Parc
du Château de Florans : le doigté végétal de la nature en écho visuel à la
touche délicate du piano. Le ciel, lentement rougi par le couchant, à travers
les ramures sombres des arbres du parc, c’est une amoureuse chair rosie sous la
dentelle noire de la soie. Avec l’ombre avancée à petits pas, les cigales
déchaînées mettront une progressive sourdine au profit des grenouilles apaisées
du parc et les oiseaux, étonnés, entonneront des chants nouveaux pour le jour
tout neuf des proches projecteurs nocturnes. Mais, pour l’heure, sous la conque
acoustique, nid inversé fait de coquilles d’œufs géants, posé sur la scène,
grand oiseau noir prêt à l’envol, le piano ouvre son aile luisante de corbeau
striée par les cordes brillantes. Une vague lueur du couchant reflétée, des
gradins, se love dans le creux déjà ombreux du piano où se niche encore
discrètement la nuit.
Au jour et sans
lumières, ces concerts de 18 heures, pendant toute la durée du festival, sont
une occasion vespérale non seulement d’entendre les plus grands pianistes du
monde, révélés souvent ici et révérés, mais de rêver des révélations de jeunes
solistes dont on aura le bonheur de suivre ensuite la carrière. Ainsi, comment
ne pas s’attendrir et s’émerveiller de découvrir, le jeudi 20 août, comme
autrefois Hélène Grimaud, Alexander Malofeyev, un prodige de treize ans, applaudi
sur les plus grandes scènes de Russie et lauréat en 2014 du Premier Prix du
Concours International Tchaïkovski pour Jeunes Artistes. À l’assaut ici de
Tchaïkovski, de Liszt et de Stravinsky !
Un festival ouvert en
lieux, programmes, horaires, mais aussi en public grâce à des prix dont il faut
saluer l’éventail judicieux. La volonté de s’ouvrir au plus grand nombre a
guidé le choix d’un tarif préférentiel pour ces concerts de fin
d’après-midi : proposés au tarif unique de 16 euros, c’est une belle incitation offerte
aux jeunes, d’autant qu’une entrée pour les moins de 16 ans est offerte pour toute entrée adulte achetée,
belle invitation à venir en famille.
Avant les concerts de
la nuit, la vaste pré de Florans, délimité par la majesté placide des platanes,
prenant des allures de Glyndebourne démocratique, se fleurit de nappes de
spectateurs se régalant d’un pique-nique avant les concerts nocturnes de 20 ou
21 heures. On peut aussi bien assister aux concerts de 18 heures et en faire
autant ensuite, tout en entendant encore, par la générosité des feuilles
sonores d’arbres qui ne sont pas des frontières, les accents poétiquement
estompés du piano de la nuit : avant l’heure grise et grisante des
concerts nocturnes, l’heure exquise des concerts crépusculaires.
Suite et fin des concerts de
18h00 à La Roque
Dimanche 9 août, Beatrice Rana, étoile montante du piano italien : Bach Partita
n°2 en ut mineur BWV 826 ; Chopin : Sonate n°2 en si bémol mineur opus 35, « Funèbre » ; Ravel : La Valse.
Mardi 11 août, Miroslav Kultyshev : Chopin Vingt-quatre Préludes opus 28
Mercredi 12 août, Duo Jatekok : Borodine
: Danses polovtsiennes, extraits de
l’opéra Le Prince Igor ; Ravel
: Rhapsodie espagnole, La Valse, version pour deux pianos ; Brahms :Variations sur un thème
de Haydn opus 56b.
Jeudi 13 août, Marie-Catherine Girod : Chopin : Ballade n°1 en
sol mineur opus
23 ; Fantaisie
en fa mineur opus 49 ; Ballade n°4 en fa mineur opus 52 . Trois Nocturnes opus 9 ; Andante spianato et
Grande Polonaise brillante opus 22.
Vendredi 14 août : Professeurs des Ensembles en résidence : Trio Wanderer trio avec piano : Olivier Charlier, violon, Yovan Markovitch, violoncelle, Claire Désert, piano, Emmanuel Strosser, piano, Christian Ivaldi, piano.
Dimanche 16 août, Yuri Favorin :
Chopin/Liszt :
Six Chants Polonais opus 74 : Chopin : Andante spianato et Grande Polonaise
brillante opus 22
. Deux Mazurkas posthumes . Sonate n°2 en si bémol mineur
opus 35, « Funèbre ».
Mercredi 19 août, Mami Hagiwara : Mozart : Neuf Variations sur un menuet de
Duport K. 573 ;
Fantaisie en ré mineur K. 397 ; Chopin :
Grande valse brillante en mi bémol majeur, opus 18 ; Valse en ut dièse mineur opus
64 n° 2 ; Valse
en ré bémol majeur dite du petit chien, opus 64 n°1 ; Sonate n°3 en si mineur opus 58.
Jeudi 20 août,
Alexander Malofeyev : Tchaïkovsky/Pletnev : Suite du ballet Casse-Noisette ; Doumka, opus 59 ; Liszt : Rhapsodie hongroise n°2 ; La Campanella ; Consolation n°2 en mi majeur ; Méphisto-Valse 1 ; Stravinsky : Le Sacre du
printemps, première
partie.
TARIF D :
16,00 € (une entrée moins de 16 ans : gratuite pour une entrée adulte
achetée)
Mais aussi, ailleurs,
autres concerts au crépuscule :
Lundi
10 août 18h30, Cloître de l’Abbaye de Silvacane ,
Nathanaël Gouin, piano : Haydn : Sonate n°31 en la bémol
majeur Hob. XVI. 46 ;
Brahms : Variations sur un thème original opus 21 n°1 ; Schubert : Sonate pour piano n°21 en ut mineur
D. 958.
Mardi 11 août , 18h, Temple
de Lourmarin : Florent Boffard ,
l’éclectique :
Janácek, Sonate ; Chopin, Barcarolle en fa dièse majeur opus
60, Extraits des Vingt-quatre
Préludes opus 28 ; Berg : Sonate
opus 1 ; Boulez Sonate n°3.
Lundi 17 août, 18h30,
Cloître de l’Abbaye de Silvacane, Pierre Hantaï clavecin (Hændel, Bach).
Mercredi 19 août,18h30, Cloître de l’Abbaye de Silvacane, Bertrand
Cuiller clavecin (Couperin, Rameau,
d’Anglebert, Royer).
Site du
Festival : www.festival-piano.com
Covoiturage
: www.covoiturage.autoclubaix.com
ou : www.festival-piano.com
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