KANOM NOUEL
Chantons Noël
Par le chœur d’enfants de Bretagne
Éditions Hortus
https://open.spotify.com/intl-fr/artist/2MRVdFsK0btt2r3qNIQ3Lo
La Nativité célèbre un enfant né dans une pauvre crèche, dépourvu de tout, sauf de l’amour de ses parents et de la compagnie d’un âne et d’un bœuf, qui l’enveloppent de leur chaleur. Les Rois Mages viendront plus tard lui offrir des présents. Nous avons fait de ce Noël une fête des enfants auxquels nous offrons des cadeaux. Mais voici un beau cadeau que nous font des enfants à l’occasion de Noël.
Sous la direction de Jean-Michel Noël, au nom prédestiné, qui dirigeait la Maîtrise de Bretagne, avec la participation du ténor Kaëlig Boché, de François Gouthe à la bombarde, de Soizig Chouinard à la harpe, de Maïna Guillamet aux percussions et de Pascal Tufféry aux orgues, ce CD de Noël se veut une douce veillée du temps décompté de l’Avent ou de son apothéose de Noël.
On connaît la forte personnalité de la Bretagne, longtemps indépendante, comme la Provence, avant d’être rattachée, comme elle, au royaume de France, 1481 pour cette dernière, 1532 pour la Bretagne. Mais si la Provence, Province romaine bien avant la conquête des Gaules par Jules César, était par son voisinage latinisé bien ancrée dans l’empire romain, la Bretagne, cette fin de terre européenne, ce Finistère avancé dans la mer, en contact marin avec la Grande-Bretagne, a conservé un puissant substrat celte, dont la langue, éloignée de notre latinité. En effet, le breton appartient au groupe des langues celtiques dites brittoniques, apparenté au cornique (de Cornouaille) et au gallois, du Pays de Galles), langues toujours pratiquées au Royaume-Uni.
En musique, la tradition bretonne est donc le carrefour de nombreuses influences des différents peuples venus s’installer en Bretagne. Les fêtes religieuses, chrétiennes, ou bien encore païennes, et leur musique, leurs danses, facteur d’unification, scandaient la vie des diverses populations. Comme ailleurs, elles accompagnaient les métiers, des champs, évoquaient des paysages, ici, évidemment, ce sont des bocages, des landes et, bien sûr, la mer toujours présente dans ce peuple de marins, avec ces navires et ces hommes partant vers des courses lointaines, des pêches, sans être jamais sûrs de revenir… De génération en génération s’est transmis et conservé un patrimoine toujours bien vivant.
Ce disque en propose un parcours atypique par ces jeunes voix qui interprètent en français, breton, latin et occitan, une veillée de Noël, imaginaire et contrastée, qui fait découvrir de nouvelles richesses d'un répertoire de la Nativité que l'on croit déjà tant connaître tant il est forcément ressassé annuellement. Savourons la saveur médiévale de ce Kanom Nouel, ‘Chantons Noël’, traditionnel breton, arrangement de Jean-Michel Noël, le bien nommé, qui ouvre et donne son nom au CD. On s’attendrait à de vénérables et vieilles voix de moines, mais ce sont des timbres frais d’enfants qui colorent doucement le chant :
1) PLAGE 1
Les auteurs du disque apportent une belle pierre à l’édifice de ce patrimoine breton. Ils ne font pas que le perpétuer en l’interprétant : ils font aussi œuvre de préservation et d’enrichissement de ce legs du passé en collectant d’autres reliques de ces musiques, et ils font aussi travail de créateurs, donnant à ces chants tout nus, sans accompagnement parvenu jusqu’à nous, le halo musical d’une harmonisation. Ainsi, dans un beau parcours de la Bretagne, ils nous font entendre des chants du pays de Vannes, de Rennes, de Redon ou de Dol, accompagnés de noëls traditionnels et réarrangés par Joseph Roucairol, Christian Couchevellou, Jean Langlais et Jean-Michel Noël.
Quant aux jeunes interprètes, ils sont issus du Chœur d'Enfants de Bretagne. La Manécanterie du Chœur d'Enfants de Bretagne fut créée en 1985 par l'abbé Jean Ruault. Une manécanterie était un chœur d'enfants d'abord composé de garçons, rattaché à une cathédrale, aujourd’hui élargi aux filles, et à des chants plus seulement sacrés. Mais au-delà de la participation à une entreprise musicale, le Chœur d'Enfants de Bretagne s'est donné pour mission de réaliser les fonctions ancestrales des manécanteries européennes : chanter et célébrer la beauté, offrir à tout enfant l'opportunité et les moyens de s'élever socialement, humainement et spirituellement. Chanter dans un chœur, c’est dépasser l’individualisme pour s’intégrer dans une œuvre, un projet collectif, et il faut évidemment, par définition, écouter l’autre, les autres, pour faire naître l’harmonie.
Écoutons ces petits Bretons chanter maintenant un air traditionnel occitan :
2) PLAGE 17 : Per noun langui long du camin
‘Pour faire un bon et long chemin, chantons sur la musette, le fifre et tambourin, disons la chansonnette, chantons Noël…’
À côté des chants bretons, on trouve dans ce CD des airs en occitan, français et latin, comme ici du grand compositeur allemand Michael Praetorius (1571-1631), Quem pastores laudavere : « Il est né le Roi de Gloire, celui que les bergers devaient louer, à qui les Anges dirent : « N’ayez plus peur. »
3) PLAGE 14
C’est des pans entiers d’un patrimoine méconnu que l’on redécouvre aujourd’hui de compositeurs et compositrices de musique savante ou classique de la Bretagne ; ou bien, comme dans ce disque qui les fixe, par la voix des enfants, des chants de simple tradition et transmission orale, dont certains risquaient de disparaître. Il représente donc un modeste mais précieux relais entre ce patrimoine ancestral conservé en faisant vivre la substance et les harmonies de ces chants locaux sans pour autant fermer les frontières culturelles et linguistiques et dédaigner des chants venus de plus loin, accueillis, adoptés, adaptés, devenus de la sorte également un patrimoine commun. Et c’est par un air de Noël connu partout en France que nous quittons ce disque délicieux :
4) PLAGE 4 : Les anges dans nos campagnes
ÉMISSION N° 714 DE BENITO PELEGRÍN
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire