Enregistrement 22/11/2019
RADIO DIALOGUE RCF
(Marseille : 89.9 FM, Aubagne ; Aix-Étang de
Berre : 101.9)
N° 403, semaine 46
Noémi
Boutin et le Quatuor Béla, D’Adamo Sur vestiges,
Schubert : Quintette en ut majeur,
D. 956, un CD NoMadMusic. Voici un disque séduisant et dérangeant.
Séduisant, car il a à son programme le bouleversant Quintette en ut majeur, D. 956, immense quintette à cordes composé
par Schubert durant l'été 1828, deux mois avant sa mort : il ne l’entendit
jamais exécuter. Dérangeant car, pour y arriver, il faut se laisser immerger,
submerger, emporter par Sur vestiges, que le quatuor Béla, ces
quatre garçons dans le vent, ont commandé au compositeur contemporain franco-argentin Daniel d’Adamo, né en 1966 : un autre quintette pour permettre d’adjoindre à leur formation, deux violons,
alto et violoncelle, le violoncelle de Noémi Boutin. Inversant la chronologie,
cette œuvre puissante devient en sorte un douloureux prélude d’aujourd’hui à
cette musique d’hier et de toujours. Cela faisait partie d'un concert spectacle que nous n'avons pu voir, malheureusement. Mais l'impression en est forte à la seule audition, sa finalité après tout. Nous n'en pouvons exprimer les sensations, fortes, troublantes, en sons plus qu'en sens.
Sur vestiges
De quel monde enfoui émergent ces
vestiges ? Frissons, frémissements, froissements, frôlements feutrés,
feulements de fantômes : c’est une confuse effusion affolée de cordes et jamais
cordes frottées ne méritèrent mieux leur nom. Pincements, trilles, trémolos qui
font trembler, sombres grondements, glissandi glauques, angoissants, aveuglés,
soudain de tutti lumineux finissant dans le fugato, la fuite effrénée, éperdue, d’un
univers de ruines qui débouchera sur la lumière diaprée de Schubert. Écoutons
un extrait trop court de ce palpitant Vestiges
de Daniel D’Adamo :
1) PLAGE 1
Quintette en ut majeur
Comme après un cauchemar ou la marche
angoissée dans une étouffante forêt touffue on débouche sur une lumineuse
clairière, le quintette de Schubert. Cordes cordiales, cordes sensibles,
accordées plein cœur, touchant le nôtre par le quatuor Béla et Noémi Boutin. Ce
léger motif caressant du premier mouvement semble fuir sur les ailes du rêve ;
il en émane un allegro joyeux mais
que le ma non troppo, ‘mais pas
trop’, teinte, modère de mélancolie, avant la course fiévreuse de présages
d’orages et le retour déchirant du motif. Un extrait, bien trop court :
2) PLAGE 7
Le second mouvement, c’est l’adagio, un lent, un impondérable rideau
de soie s’ouvrant, émergeant du silence ou des songes, ponctué des pizzicati du
second violoncelle comme des pas menus sur la pointe des pieds, une indécise
brume flottante, impalpable musique venue d’un ailleurs très lointain, on en retient
sa respiration comme on retient un rêve évanescent qu’un souffle pourrait
évanouir. Un extrait :
3) PLAGE 8
Les troisième et quatrième mouvements,
seront comme un réveil joyeux où Schubert, souriant dans la détresse, semble
vouloir effacer d’un revers de corde l’indéfinissable nostalgie, la mélancolie
du précédent mouvement, et nos jeunes interprètes s’en donnent à cœur joie,
pour la nôtre. Mais nous les quittons sur les accords nostalgiques du second
que leur jeunesse a su si bien traduire :
4) PLAGE 8
Noémi
Boutin et le Quatuor Béla, D’Adamo Sur
vestiges, Schubert : Quintette
en ut majeur, D. 956, un CD NoMadMusic
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