Leçons d’un confinement
J’avais
commencé ce journal par un passage de Pascal qui estimait que tout le malheur
de l’homme venait de ne pouvoir rester en repos dans une chambre. Je ne sais si
tout le monde y a trouvé bonheur et repos mais à coup sûr, ce confinement, cet
isolement forcé, seul ou accompagné, nous a forcés, sinon à un examen de
conscience, à une prise de conscience du dedans, du dehors, ce dehors où règne
le virus mortel ; conscience aussi de soi et des autres : séparés des
autres, nous avons sans doute pris conscience de leur prix ; la parole pour
soi, parole de la solitude, monologue, soliloque, renforce le besoin de
dialogue, du partage de la parole, et même, de nos fenêtres, de balcon à
balcon, partage avec des voisins inconnus des applaudissements envers nos
héroïques soignants.
Je crois que, depuis la joyeuse révolution
sociale de 68, où les gens, enfermés, renfermés en eux, sinon chez eux, depuis
si longtemps, avaient appris, réappris à se parler, et même les murs parlaient
alors, depuis 68, on n’a pas connu un tel désir de communiquer, qui est aussi communier.
Comme effaçant, écartant les murs de notre logis confiné, notre confinement a créé
en nous une soif de communication, a fait éclore un échange extraordinaire par
internet, de poèmes, de textes et de dessins humoristiques, de vidéos qui sont
autant que des récréations, de vraies créations artistiques. Une création de
vie alors que nous la sentons si fragile et si menacée, pour nous mais surtout
pour ceux que nous aimons.
Une fois tirés de cette épreuve, sans doute nous faudra-t-il en tirer les leçons, sûrement dures,
cruelles. Mais sans doute aussi, si nous nous en tirons, faudra-t-il rendre grâce à la vie, plus forte que tout. Et
c’est pourquoi je vous invite à vous laisser bercer par la douce litanie de
cette chanson de la ChilienneVioleta Parra,
(morte en1967), Gracias à la vida,
qui est un hymne à la vie, humble et puissant, un chant d’espoir dont je vous adapte
quelques strophes :
Merci à la vie, qui m’a donné tant,
Qui m’a donné la gamme et donné l’alphabet,
Les mots par lesquels je pense et
décline
Mère, frère, ami, et lumière
éclairant
Le chemin de l’âme et de l’être
aimé. […]
Merci à la vie, qui m’a donné tant,
Qui m’offrit le cœur qui bat bien
plus fort
Quand je vois le fruit du cerveau
humain,
Quand je vois le bon si loin du
méchant,
Quand je sens ta main qui cherche ma
main.
Merci à la vie, qui m’a donné tant,
Qui m’offrit le rire et m’offrit les
larmes,
Ainsi, je distingue bonheur et
douleur,
Les deux matériaux qui font que je
chante,
Le chant de vous tous qui est le
même chant,
Et le chant de tous qui est mon
propre chant.
Merci à la vie, qui m’a donné tant…
RCF DIALOGUE , VENDREDI 12H20
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