samedi, mai 05, 2007

IDENTITÉS

DISQUES

DU SUD AU NORD : IDENTITÉS
N’en déplaise aux esprits étriqués, maladivement et dangereusement centrés sur leur petit nombril nationaliste, l’identité, aujourd’hui, à l’heure du village mondial, ne peut être le repli sur soi mais l’ouverture des frontières mentales à l’Autre, pour étrange ou étranger qu’il soit, quelles que soient ses différences, ses préférences. L’identité n’est pas un habit de carnaval qu’on endosse en sortant et dépose au vestiaire en rentrant. C’est quand on n’est pas très sûr de soi qu’on redoute l’Autre et qu’on affiche des identités ostentatoires. Mais assuré sur son identité, on se nourrit toujours de l’Autre et de l’Ailleurs. En témoignent deux magnifiques disques, divers et proches.

MICHÈLE FERNANDEZ : COMO UN SOPLO (comme un souffle). Voici cette jeune Marseillaise, bien campée en France, qui trouve un souffle, une inspiration et une aspiration dans l’Espagne de ses parents. Tendresse, rêverie, sans nostalgie délétère, elle rend un hommage d’ici, d’aujourd’hui, à leur Espagne d’hier : des chants traditionnels de toute la Péninsule, elle fait une belle chanson d’amour gravée chez nous avec des complices Marseillais pour les instruments, oud (luth), percussions, guitare, violoncelle, accordéon, flûte et même les cornemuses du Centre Gallego (galicien) de Marseille. Instrumentation en parfaite harmonie avec les textes poétiques et les musiques, arrangées souvent par elle-même.
De la Catalogne au pays Basque, en passant par la Galice et l’Andalousie, c’est toute une Espagne musicalisée, stylisée, avec délicatesse et goût, toute la richesse diverse d’un pays qui passe dans la richesse variée de la voix fruitée de Michèle Fernandez : du murmure à la véhémence, du soupir au cri, de la gravité à l’allégresse, modulant les couleurs, le volume, du grave chaud à l’aigu léger, c’est toujours avec la même justesse qu’elle créée un climat et recréée un pays : des paysages de l’âme.
http://milleetunemusiques.free.fr

ERIK TRUFFAZ QUARTET. ARKHANGELSK (Blue Note)
Du sud de l’Europe, nous passons à l’extrême nord sibérien, avec le même bonheur. C’est une sorte de terre inconnue à explorer que nous propose l’Erik Truffaz Quartet dans son dernier album qu’il est venu nous découvrir à l’Espace Julien : « Arkhangelsk », ville d’au-delà du cercle polaire. De notre Méditerranée si bleue, il nous invite au voyage, à naviguer au travers des vagues évanescentes du rêve, vers les rives lointaines de la Mer Blanche, vers les rivages nuageux de cette ville au nom étrange de songe. Entre des vapeurs de sommeil, entre veille et rêve, la trompette brumeuse de Truffaz, soulève suavement de nébuleuses gazes de brume, paresseusement, langoureusement, comme on s’étire d’un engourdissement moelleux, voluptueux. Le son, sans aspérités, sans arêtes, éthéré, s’appuie et se dore parfois tel un soleil au milieu du brouillard, mais sans que rien, même la pulsation plus fébrile des percussions, ou une basse obstinée lancinante, ne vienne perturber le poétique climat d’un ailleurs géographique ou mental, auréolant la voix feutrée d’Ed Harcourt, nimbant celle de Christophe, donnant du fondu aux scansions du rappeur Nya. Poésie en jazz.

http://www.myspace.com/truffaz (des extraits du disque sur ce site)
Erik Truffaz. (Crédit : Isa'l Photography)



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