mardi, octobre 29, 2024

AMY BEACH, prodige empêchée

 

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AMY BEACH (1867-1944)

Une prodige empêchée

Jennifer Fichet, piano

Un CD label Hortus

Nous ne comptons plus, dans cette émission, à la faveur de la sortie de disques, le nombre de Dames compositrices, mal servies, ou desservies par l’histoire de la musique, dont nous voudrions nous faire chevaleresquement led chevalier-servant redresseur de torts. On ne nous accusera donc pas de caresser, je ne dis pas dans le sens du poil, mais de la belle chevelure, la mode féministe, ou plutôt la juste révolte des femmes contre le patriarcat, dont nous ne cessons de rougir à la découverte que nous faisons des dégâts qu’il a pu causer ancestralement, sans états d’âme, sur la moitié ou plus de l’humanité, la part féminine du monde —la plus belle pour nous osons-nous à peine avouer, tant on a voulu sa beauté muette et bête.

Encore un CD dira-t-on qui met en lumière une femme ensevelie dans l’ombre de l’oubli, ou laissée dans la pénombre de la mémoire, comme celles peine éclairées par de brillants compagnonnages masculins, maris, amants, mécènes, des vocations et des talents féminins qu’on découvre ou redécouvre à peine aujourd’hui : ne revenons pas sur les Fanny Mendelssohn, brutalement contrariée par père, et même frère, le grand Félix qui l’utilise froidement dans son œuvre, en riant de sa vocation, confinée au rôle germanique  des traditionnels KKK (Küchen, Kirchen, Kinder, ‘Cuisine, Église, Enfants’), Clara Schumann, subordonnée servante de l’œuvre de son époux, Alma Mahler, peintre, compositrice, poétesse, sacrifiée au sien par lettre qu’on dirait patente, patente de son égoïste misogynie qu’il fait signer abusivement à sa jeune fiancée comme condition expresse du mariage. Objet décoratif, la femme à vocation artistique, était cantonnée, au mieux, dans les Arts décoratifs.

Voici aujourd’hui une enfant, une jeune fille, une femme, l’Américaine Amy Beach, qu’on redécouvre, première compositrice reconnue aux États-Unis, la première à y être jouée par un orchestre symphonique, à la brillante carrière, y fondant des écoles de musique comme une généreuse compensation à tous les empêchements personnels subis dans sa proche famille, pourtant cultivée, qui ne parvint pourtant pas à étouffer sa vocation, trop manifeste pour n’être pas suspecte, d’abord, paradoxalement, cruellement, aux yeux ou oreilles, peut-être jalouses, de sa propre mère, pourtant musicienne et chanteuse.

Son talent musical est manifeste dès sa première enfance, attesté par des témoignages admiratifs. En effet, à deux ans, la petite fille improvise des contrechants pour accompagner sa mère, chanteuse ; à quatre ans, pendant les vacances, elle compose de tête des valses, qu’elle joue ensuite sur le piano familial retrouvé et, à six, elle donne son premier récital. Et pourtant, au lieu d’en être émerveillée, sa mère, lui refuse tout enseignement musical, par peur de perdre son autorité avance Jennifer Fichet qui signe aussi le riche livret qui accompagne le disque. Malgré l’envol d’un récital à succès donné en 1881, à quatorze ans, son impitoyable famille lui coupe les ailes, refusant les propositions qu’on lui fait. 

Le mariage est parfois une libération pour les jeunes filles brimées, corsetées par le carcan familial. Hélas, si Fanny Mendelssohn, confinée à son rôle décoratif de jeune fille de salon par ses injustes père et frère, eut la chance d’un époux éclairé qui comprit la vocation et le talent de sa femme qu’il aida à s’épanouir, Amy n’a pas cette chance : l’année même où sa première composition est éditée, l’homme qu’elle épouse en 1885, à dix-huit ans, de plus du double de son âge, tolère qu’elle compose, mais ne lui concède que deux concerts caritatifs par an, excluant tout contact artistique extérieur, et encore moins voyages et apprentissage, avec des pianistes reconnus. Autodidacte par la force des choses, et la surdité forcenée des siens, finalement, Amy se formant toute seule ne devra ses réussites qu’à elle-même.

En 1904, elle compose Variations sur des thèmes des Balkans op. 60, qu’elle révisera en 1936. Le motif principal est une mélodie folklorique bulgare assez mélancolique, qu’Amy Beach fait suivre d’onze variations. Écoutons le thème :

1) PLAGE 5 

Avant que nous n’en perdions la perception, voici ce qu’il devient à la 2e variation :

2) PLAGE 7

Puis à la 3e :

3) PLAGE 8 

Composées en une semaine, elle écrira une version orchestrale de ces variations en 1906, une édition piano révisée en 1936, puis une autre pour deux pianos en 1937, bref l’art de varier les variations !

Malgré ces traverses, ces entraves familiales, Amy arrive à composer et faire jouer un concerto et nombre de pièces pour piano. La réussite de la création de sa symphonie à Boston en 1896, ne change rien pour elle dans son inflexible famille maritale.

La libération pour les femmes, du moins dans les classes aisées, était le veuvage. Amy, sacrifiée par mère et mari doit attendre le décès de son mari en 1910 et de sa mère en 1911, pour pouvoir enfin se mouvoir librement. Elle peut alors se déplacer aux Etats-Unis, parcourir l’Europe et rencontrer les milieux musicaux. Malgré son éloignement jusque-là des grands centres musicaux, sa musique, sans connaître les avant-gardes de la musique européenne de la fin du XIXe siècle et du début du XXe, forcée à la singularité de sa solitude séduisit de grands interprètes européens de son temps tels Josef Hofmann, le plus novateur Ferruccio Busoni ou Rosenthal, qui mirent des pages d’Amy Beach au programme de leurs concerts. 

La pianiste française Jennifer Fichet, formée à Lille et à Paris, lauréate de plusieurs concours, a fait une carrière d’accompagnatrice avant d’enseigner la pratique au CNSMD de Paris. Elle est titulaire d’une classe de piano au CRD d’Issy-les-Moulineaux. L’anthologie qu’elle propose court sur quarante-cinq ans de la vie d’Amy Beach qui décédera à New-York en 1944, laissant un catalogue varié, dont, évidemment, un grand nombre de pièces pour le piano. Sauf les Variations balkaniques, d’une vingtaine de minutes, le programme du CD offre des pièces de durée moyenne : une joyeuse Valse-Caprice (1889), une Ballade (1894), qui n’a pas oublié Chopin et Liszt, deux Sketches (1892) plutôt schubertiens.  Une jolie vignette, The Old Chapel by Moonlight, et une la mélancolique berceuse de la mère solitaire Cradle Song of the Lonely Mother, sur laquelle nous nous quittons :

4) PLAGE 21

 


Émission N°772 de Benito Pelegrín 

 

lundi, octobre 14, 2024

 

Salon du livre métropolitain - Métropole Aix-Marseille-Provence (ampmetropole.fr)

 

CONFÉRENCE

Benito Pelegrín

De la maîtrise de soi à la conquête des autres :

Art et Figures du succès (Oracle manuel)

de Baltasar Gracián (1601-1658) ",

Livre de poche Points Seuil, 7€

 

SALON DU LIVRE MÉTROPOLITAIN

Du vendredi 25 au dimanche 27 octobre 2024

la Citadelle de Marseille, (Fort Saint-Nicolas),.

Entrée gratuite.

 

Le vendredi 25 octobre, de 14 à 15 heures, à la Citadelle, Cour du haut fort, Atelier résidence gauche, la première « Rencontre » est confiée à Benito Pelegrín, traducteur et écrivain. Spécialiste du Baroque, il a traduit aux éditions du Seuil l’œuvre complète de Baltasar Gracián, couronnée par un Prix de l’Académie française.


Le jésuite espagnol Baltasar Gracián (1601-1658), utilisé de La Rochefoucauld à Nietzsche, traduit par Schopenhauer, dans son art de la réussite en 300 aphorismes, semble avoir pressenti la société d’aujourd’hui :

—la transparence du politique : « Notable doublement qui note qu'on le note et qu'on l'annotera. Il sait que tout se sait, que les murs ont des oreilles et que la noire action aspire à voir le jour » (297) ;

—« N'est pas fautif qui fait la faute mais celui qui, une fois faite, ne la sait pas farder. […] Le crédit réside plus dans le secret que dans le fait et si vous êtes lubrique, ne soyez pas rubrique » (126) ; 

—le délit de faciès : « De rien ne sert d’avoir raison avec un visage qui a tort » (99) ; 

—l’auto-promotion : « Savoir vendre sa marchandise » ; « Valoir et savoir le montrer, c’est valoir deux fois » ;

—l’esbroufe médiatique : « C'est une grande adresse du savoir-vivre que de savoir vendre du vent. » (267) ;

—« Savoir sonder » ; « lancer des sondes » (291, 164) ;

—« Recevoir les informations avec méfiance » (80) ;

—« Sans mentir, ne pas dire toutes les vérités » (181) ;

—« Donner d'avance comme un cadeau ce que l'on devra donner ensuite comme un salaire. » (236) ;

—La démagogie : « Penser avec la minorité, mais parler avec la majorité .» (43) ;

« Ne pas condamner seul ce qui plaît à beaucoup. »(270) ;

—« Il vaut mieux être fou avec tous que sage tout seul. »(133)

 

    ÉCHOS DE PRESSE

 

TRAITÉS POLITIQUES, ESTHÉTIQUES, ÉTHIQUES

DE BALTASAR GRACIÁN

 

TRADUITS, PRÉSENTÉS ET ANNOTÉS PAR

BENITO PELEGRÍN

ÉDITIONS DU SEUIL, 940 PAGES

 

« Étoile de première grandeur » selon Lacan à côté de La Rochefoucauld (qui l’utilise comme plus tard Nietzsche), dans la tradition des moralistes européens, Baltasar Gracián (1601-1658) est surtout connu pour sa réflexion subtile et profonde sur les arcanes de la vie sociale et pour les conseils de comportement, toujours actuels, qu’il donne à ceux qui veulent réussir, dont l’homme politique ou le professionnel d’aujourd’hui peuvent tirer beaucoup de profits.

Pour la première fois, le lecteur de langue française trouvera rassemblés dans ce volume la totalité de ses Traités, dans une traduction nouvelle (depuis les XVII e et XVIII es siècles) ou la première traduction mondiale (Art et Figures de l’Esprit), empreinte d’une vraie beauté littéraire. Il pourra ainsi prendre toute la mesure d’une œuvre majeure qui, à travers les différentes figures que sont « l’honnête homme », « l’homme de cour », ou « le héros » ou le « Bel Esprit », s’interroge sur la destinée de l’homme, son rapport à la société, à la langue et à Dieu.

 

Benito Pelegrín, Professeur émérite des universités, écrivain, dramaturge, traducteur, est un des spécialistes européens les plus connus du baroque et de Gracián, qu’il a amplement traduit et commenté et auquel il a consacré un Doctorat d’État. Ses nombreux articles sur le sujet font. Il a consacré à Gracián plusieurs ouvrages, de nombreux travaux, quelques 5000 pages répertoriées déjà en 2001 par la bibliographie établie par Mme E. Cantarino qui en font, selon la critique italienne gracianesque, « il capo lavoro degli studi graciani », le chef de file des études gracianesques.

 

 EXTRAITS DE PRESSE

 

PRESSE NATIONALE

 

Gracián, le héros de la ruse…la plus belle leçon de cynisme et d’ambiguïté de l’histoire européenne. depuis presque quatre siècles, cette oeuvre n'a cessé de fasciner […] Un nouveau destin l'attend sans doute, avec cette première édition française, en un seul volume [des traités complets] de Gracián par Benito Pelegrín, qui depuis plus de trente ans a consacré un travail considérable à cet auteur et à son époque. On trouve ici tous les traités du maître de la ruse, à commencer par son coup de tonnerre initial, El Héroe (Le Héros), publié en 1647. (Roger-Pol Droit, Le Monde)

 

Gracián, le chant du cynique. Un des moralistes les plus modernes qui soient.  [l’Oracle manuel] est un des ouvrages majeurs de la pensée occidentale. La Rochefoucauld, La Bruyère, Voltaire, Chamfort, mais aussi Pascal, tous l’ont lu et s’en sont inspirés, de façon plus ou moins ouverte. La traduction qu’en propose aujourd’hui Benito Pelegrín donne un nouveau sens à ce livre, plus proche des intentions initiales de son auteur. (Patrice Bollon, Le Figaro)

GRACIAN, LE CHANT DU CYNIQUE

« On comprend pourquoi Gracián a également influencé Guy Debord : avec trois siècles d'avance, il fait sans le savoir une critique radicale des effets du capitalisme démocratique, spectaculaire et marchand ». (Philippe Lançon, Libération)

 

« Vous ne pouvez vous passer de l’édition des Traités de Baltasar Gracián, ce jésuite de génie » (Philippe Sollers, Le Journal du Dimanche)

« Schématiquement, les mouvements de masse synthétisent deux modes psychologiques de contrôle social : la fascination et la séduction. Dans les deux cas, la formule du philosophe espagnol Baltasar Gracian (1601-1658) reste valable : « Pour séduire, il faut réduire. » (Alexandre Dorna, Le Monde diplomatique).

PRESSE RÉGIONALE

« De la même trempe que Machiavel » (Jean Boissieu, La Marseillaise)

« Une résurrection. Le lecteur […] prendra un plaisir extrême à redécouvrir, grâce à Benito Pelegrín, l’une des œuvres les plus difficiles et les plus extraordinaires de la littérature espagnole. » (Jacques Lovichi, La Marseillaise)

« L’Art de la ruse […] A lire avec délectation. » (Corsica)

MAGAZINES ET REVUES

 « Sacré jésuite ! voici : Baltasar Gracián (1601-1658) enfin rassemblé et magnifiquement traduit et annoté par son connaisseur hors pair : Benito Pelegrín. […] Ce bouillant homme d'Eglise espagnol publia, au  XVII e siècle, des traités de morale d'une modernité saisissante. Ils ont inspiré La Rochefoucauld, Schopenhauer et Nietszche. Un régal ! » (Philippe Sollers, Le Nouvel Observateur) .

« Une bombe arrive, discrètement, attention, elle peut vous exploser à la figure à tout moment. Elle date du XVII e siècle ? Oui, mais elle est fraîchement réactivée, réamorcée, redoutablement efficace (…) elle a déjà explosé, elle explosera encore, elle traverse le temps.[…]  Pour (re)traduire l’ensemble, l’annoter et l’introduire,  nous avons droit au meilleur spécialiste de Gracián en France, Benito Pelegrín. » (Olivier Renault, Art Press)

« Le Machiavel espagnol. […] l'un des grands mérites des nouvelles traductions proposées par Benito Pelegrín est de rendre toute leur richesse et leur subtilité à des textes volontairement oraculaires et d'un laconisme extrême. » (Jean Blain, Lire)

« avec la première édition française de l'intégralité des traités politiques, esthétiques et éthiques de Gracian, traduits et présentés par Benito Pelegrín […] s'ouvre avec cette édition déjà indispensable une nouvelle ère de réception d'un projet grandiose d'édification morale, dont l'unité conceptuelle n'a pas fini d'éblouir ceux qui veulent voir clair dans l'existence.( Stéphane Floccari, Magazine littéraire)

« …je ne saurais trop vous recommander la lecture réjouissante des Traités polmitiques, esthétiques, éthiques de Baltasar Gracián, retraduits de manière épatante par Benito pelegrín. Ce classique de la littérature date de quatre siècles mais il n’a pas pris une ride. » (Patrick Poivre d’Arvor, Marie-France

« Ce qui importe, c'est de savoir comment réussir dans la société, comment exprimer pleinement ses dons, devenir ce que l'on est. Dans ce discours de la méthode [c’est le] sujet de ses principaux livres. » ( Claude Jannoud, Marianne)

« …Benito Pelegrín, avec une érudition sans faille, décortique l’œuvre « politique, morale, rhétorique, casuistique et psychologique, saluant au passage (et en allitérations) « la voltige verbale vertigineuse », soulignant l’ambiguïté du message de Gracián » (Jacques Lovichi, SUD)

« Machiavel de la vie sociale. […] Quatre fois centenaires, les brillants écrits de Gracián sont toujours d’actualité. » (Sean james Rosse, Numéro).

AUDIO-VISUEL

Télévision

« Benito Pelegrín, je lis ce que vous avez fait » [depuis 25 ans] . « Vous lui [à Gracián] redonnez vie […] On dira à quel point il peut être utile aujourd’hui. » (Jean-Pierre Elkabbach,  Bibliothèque Médicis, LCP, Canal 32, Clermont 1 ère, TLP Lubéron, TV5,  TV5 Monde (15 passages)

Radios  

«Esprit ambidextre» et qui sait toujours «discourir sur deux versants», Gracian est à la fois l’héritier des sophistes et de Machiavel ou Castiglione, mais l’idéal humain qu’il propose est universel, et ce «gouvernement de soi» il le veut à la portée de tout le monde. Pour cet art de la réussite et de l’efficacité, qui est l’enjeu principal de son oeuvre dans un monde où il faut user « des moyens divins comme s’il n’y en avait point d’humains et des moyens humains comme s’il n’y en avait point de divins», Gracian multiplie préceptes et paradoxes, aphorismes et maximes dans ce style concis, condensé, dans des jeux de langue et de sens (Francesca Isidori, France-Culture)

PRESSE ÉTRANGÈRE

Une étoile du baroque européen
. D’une étonnante modernité (…) l'écrivain et universitaire Benito Pelegrín (…) nous gratifie par ailleurs d'un passionnant appareil critique et d'une biographie. (Le Soir de Bruxelles).

Pour la première fois, le lecteur de langue française trouvera rassemblés en un volume la totalité des traités de Baltasar Gracin (1601- 1658), admirablement traduits et introduits par Benito Pelegrin, un des meilleurs connaisseurs du baroque européen et grand spécialiste de Gracián, à qui il a consacré un doctorat d'Etat. (Jacques Franck , Libre Belgique).

« La presse française dit des merveilles de Baltasar Gracián. La publication des Traités politiques, esthétiques, éthiques (Seuil, 940 pages) qui réunit les essais du jésuite aragonais a déclenché une avalanche d’éloges. » (La Vanguardia, Espagne)

ARTICLES EN LIGNE SUR LE NET

« Benito Pelegrín, spécialiste du baroque… a donné à Gracian « sa voix française tout en lui gardant son accent espagnol » (Pierre Assouline, La République des livres, Weblog du Monde)

« …je salue avec un enthousiasme majeur la publication d'une anthologie des essais politiques de Baltasar GRACIAN. (…). Il y a urgence à relire cet auteur qui nous en apprend plus sur nous mêmes que bien des penseurs contemporains. (All-Zebest)

CHAT

Philippe Lançon : «Gracián est un homme moderne»

Le journaliste de «Libération» a répondu jeudi 8 décembre aux internautes. Sujet du chat : les «Traités» de Baltasar Gracián, jésuite espagnol de l'âge baroque (XVIIe siècle), à qui l'ouverture du dernier supplément Livres était consacrée. (LIBERATION.FR )


 « Benito Pelegrín, qui se plaît à souligner que cet ouvrage serait un favori des milieux d'affaires et de la finance new-yorkais, reprend aujourd'hui cette traduction, qui fut la première en France depuis le XVIIème siècle, dans une nouvelle version, regroupée, revue et corrigée, au plus près de la langue originale et du style de Baltasar Gracián. » (Freud-Lacan.com)

« Remercions Gracián d’éclairer l’un des charmes des écrits situationnistes : un français classique, donc clair ; puis, abrupt, un frénétique farfouillis de dialectique, soudain terminé par une phrase si lumineuse, si intelligente, qu’on refuse de croire absurde le magma qui la précède. » (Traimond, Jean-Manuel, La littérature, arme situationniste).

« Du côté de Gracián... un penseur et un écrivain de génie (…) d'une actualité et d'une modernité brûlantes (…) Un régal ! » (Weblog Toccoli)

«  le dr.Cavaco est allé à Paris. Non pour visiter la Cinamathèque, non pour visiter le Louvre mais pour acquérir les fameux Traités politiques, esthétiques, éthiques de Baltasar Gracián… » (Baptista Bastos, Opinião)

 

dimanche, octobre 13, 2024

Roberto Alagna 60

Avec le Morphing Chamber Orchestra, directionGiorgio Croci,

un CD Aparte

         À un public encore sous le charme des ondes de son dernier disque, Seigneur, paru le printemps dernier, chez le même label Aparte, nous en avons parlé ici, le jour même de l’automne, inversant le rituel des anniversaires, pour ses soixante ans, c’est Roberto Alagna au lieu de le recevoir, qui nous offre généreusement un cadeau, un nouveau CD que je dirais printanier par la fraîcheur pratiquement intacte de sa voix et par la jeunesse d’une palette lyrique qui renouvelle bien largement le répertoire vocal auquel il nous avait jusqu’ici habitués.

Certes, de ses débuts d’amateur dans les bars, cabarets et restaurants parisiens, le jeune Roberto, chantant un répertoire léger de variétés au gré de publics divers et cosmopolites dont il fallait capter l’attention, qu’il fallait contenter, accrocher, avait conservé cette faculté, devenue facilité, d’adaptation vocale et thématique au cadre, aux gens souvent distraits même au milieu des repas. Sans doute un rude apprentissage dont il a tiré une indubitable expérience d’accommodation aux répertoires les plus internationaux capables de charmer des auditeurs de tous horizons par la grâce solaire sa voix.

Au sommet de sa carrière mondiale de chanteur lyrique indiscuté depuis quarante ans et d’une vertigineuse discographie, comme le précédent Cd, Seigneur, fervent de dévotion intime, de reconnaissance aux cadeaux de la vie, dont on ne sait jamais les lendemains, disque de réflexion sur l’existence, celui-ci est un reflet de sa personnalité mobile, curieuse du vaste champ, le champ chantant, enchanteur, d’une vocalité sans frontières qui ne lui est jamais étrangère.

Ainsi, du grand opéra italien et français, de l’opérette à la musique religieuse, de la chanson traditionnelle sicilienne et internationale, du goût compréhensible pour la généreuse vocalité hispanique aux créations, parfois les siennes et de ses frères, Roberto Alagna chante et enchante dans tous les genres de répertoires. Ce dernier Cd est donc un éventail de ses goûts, offrant le cadeau de morceaux qu’il n’avait pas enregistrés ou de répertoires et langues jamais ou rarement abordés jusqu’ici. Venu tard à Wagner, mais interprété lors d’une mémorable diffusion d’un Löhengrin pendant la pandémie, prudemment mis en scène sans attouchement corporel des chanteurs, comme déjà un rêve distant, le voici dans l’air du mystérieux chevalier au cygne venu d’un lointain pays des rêves : « Mein Lieber Schwan ». Wagner avait forcément des chanteurs de bel canto italien pour ses opéras que n’avait pas grossis, enflés, le mauvais goût ultérieur qui n’était pas le sien. Alagna chante ce passage comme un véritable et poétique lied confidentiel flottant en extase dans la brume du rêve d’Elsa :

1) PLAGE 6 

 Accompagné, presque auréolé parfois par le Morphing Chamber Orchestra, délicatement dirigé par Giorgio Croci, le chanteur propose ici un programme à son image, personnalisé à sa voix toujours belle et rayonnante, toujours riche et colorée, avec des demi-teintes à faire rêver de tout jeunes chanteurs, fruit d’un long travail à l’évidence, de toute une vie. Il expose son talent admiré en terrain connu de l'opéra français (Gounod, Massenet, Thomas, Adam, mais se lance aussi dans Meyerbeer), de l’opéra italien (Verdi, Leoncavallo), s’inaugurant dans le baroque napolitain de Pergolèse. Mais on le découvre en territoires et styles différents, allemand (deux airs de Löhengrin de Wagner, mais aussi Flotow), polonais (Moniuszko) ou russe (Tchaïkovski, l’air bouleversant de Lenski avant le duel qui verra sa mort dans Eugène Onéguine, et Rimski-Korsakov). Mais c’est dans ce dernier que nous l’entendrons, un extrait de son opéra légendaire, Sadko (1896) chanté, murmuré presque dirais-je, en français, : « Les diamants chez nous sont innombrables », aux mélismes orientalisants :

2) PLAGE 9 

Et puisque nous sommes dans des œuvres rares sinon inconnues, dans ce français à la diction exemplaire de Roberto Alagna le Sicilien de Paris, voici un air d’un compositeur italien bien oublié aujourd’hui, Riccardo Drigo (1846-1930) qui fit surtout carrière en Russie dont rappelons que la langue de la bonne société était pratiquement toujours le français. Voici donc, dans le même registre de la richesse imaginaire, la Sérénade, extrait Les millions d’Arlequin :

3) PLAGE 14 

Nous le retrouvons interprétant en polonais un air très nostalgique tiré de Halka, un opéra de Stanislaw Moniuszko (1819-1872) : 

4) PLAGE 7  

Naturellement, chez ce déjà ancien adepte du « cross over », l’on ne manquera pas de trouver un air en anglais le fameux Be my love, et en espagnol, le célèbre Ay, Ay, Ay !, du Chilien Osmán Pérez Freire, une aubade, chanson de l’aube pour réveiller la belle mais que notre ténor ralentit tellement, et en donne tant de délicates nuances, que ça en devient plutôt une berceuse qui rendormirait plutôt que réveiller la bien-aimée. Peu emporte, c’est très charmeur et, dans ce registre hispanique, on goûte, en italien, une espagnolade, La Spagnola, un populaire boléro autrefois interprété par Gina Lollobrigida dans le film La Belle des belles où elle incarnait une cantatrice. Mais comme notre ténor a un sens très vif de la famille, une autre pochade espagnolisante des trois frères Alagna, David, Frederico et Roberto lui-même, L’Andalouse, dont on s’étonnera, en Espagnol, qu’on lui prête un sein bruni tant on connaît l’horreur du soleil des femmes de ce pays, surtout autrefois.

Nous quitterons ce sympathique et talentueux ténor qui, à ses soixante ans, se souvient du jeune compositeur de vingt ans qu’il fut, composant cette chanson si solairement italienne, Sognare, ‘Rêver’, songer, ce rêve d’une vie à chanter en pleine liberté, à pleine voix, qui n’a pas été un songe vain pour lui :

5) PLAGE 20 : FIN

https://open.spotify.com/intl-fr/album/72K6qjV8XerxiLahjlnKQ1

Roberto Alagna 60

 

Émision N°769 de BENITO PELEGRÍN, 29/09+2024


 

lundi, octobre 07, 2024

DE LA NORMA DE SOUMET À CELLE DE BELLINI

 

NORMA (Milan, décembre 1831)

musique de Vincenzo Bellini

Livret de Felice Romani,

tiré de Norma ou l’Infanticide (Paris, avril 1831)

de Louis-Alexandre Soumet

Opéra de Marseille,

dimanche 29 septembre

 

         La première française de Norma eut lieu à Marseille en 1835, mais nous ne l’avions plus revue depuis le 14 octobre de 2006. Elle nous revient en toute splendeur vocale, même affligée, alourdie de collages parasites par la mise en scène.

Critiquée souvent, la musique de Vincenzo Bellini (1801-1835), toute vouée à la voix, quelle qu’en soit la pauvreté harmonique et orchestrale, c’est un flux mélodique continu, de larges arabesques moulées sur la parole, une sorte de conversation en musique, poétique ou dramatique, qu’admirait Chopin, se rêvant d’être le Bellini du piano, et dont Wagner n’oubliera pas la leçon dans sa mélodie continue. Bizet, à qui on l’avait proposé, se refusa d’orchestrer la partition pour en remplir les vides harmoniques de peur d’en faire perdre la magie.

Vierges sacrées

Le sujet des amours maudites d’une religieuse était à la mode. Le néo-classicisme du XVIIIe siècle finissant et de l’aube du XIXe, entre retour à l’Antique gréco-latin ou celte, avait fantasmé sur ces prêtresses vierges sacrées consacrées au culte de dieux, jaloux de leur chasteté, dont on leur faisait cruellement payer la perte. Selon Plutarque et Suétone, la vestale reconnue coupable par un procès, était en grande pompe, funèbre naturellement, enterrée vivante dans une chambre souterraine avec quelques vivres et une lampe. L’amant, battu publiquement à mort.

Spontini avait fait verser des larmes sur sa lyrique Vestale (1807) qui s’en tire bien ; le lubrique et peut-être incestueux Chateaubriand, attelé aux pudeurs d’Atala (1801) et aux pudibonderies des Martyrs (1809), avait aussi rêvassé sur une gauloise prêtresse d’Irminsul, Velléda, rendue célèbre par Les Martyrs, dont Felice Romani avait déjà tiré un livret pour Pacini en 1817.

Vient ensuite la pièce de Louis-Alexandre Soumet (1788-1845) qui triomphe à l’Odéon avec Mademoiselle George Norma ou l’Infanticide (6 avril 1831) qui ajoute, à l’infraction sacrilège des vœux de la religieuse, le fruit maudit de ces amours, les enfants, innocents, mais forcément criminels. Soumet, donnant à son héroïne le titre d’Infanticide, inscrivait sa druidesse Norma dans la veine inépuisable des nombreuses Médée de l’opéra baroque et de Cherubini (1797) mères criminelles, tueuses de leurs enfants pour se venger du mari volage.

I. L’INTRIGUE

Le sujet est simple mais fort : Norma, druidesse gauloise et prophétesse, non seulement enfreint ses vœux de chasteté par une liaison avec le proconsul romain Pollione, mais en a clandestinement deux enfants, commis aux soins secrets de Clotilde. En plus, elle trahit son peuple en lui intimant la paix avec l’occupant romain contre lequel ils sont prêts à se soulever. Imaginez, durant l’Occupation, une Française ayant des amours et deux enfants avec l’occupant allemand. On comprend que, déchirée entre amour et patrie, elle veuille la paix. Alors que les Gaulois attendent de la Grande Prêtresse qu’elle donne le signal du soulèvement contre les Romains, elle en arrive à dissuader, décourager la résistance à l’ennemi. C’est sa poétique et fervente prière à la lune, « Casta diva », chaste déesse, non comme elle, qu’elle implore d’apporter la paix sur terre.

Mais Norma est trahie par son amant, amoureux d’une autre prêtresse, Adalgisa, avec laquelle il prétend fuir à Rome.

Bafouée, la prophétesse aveugle sur son destin, ira jusqu’à délivrer de ses proches vœux sa jeune rivale Adalgisa pour qu’elle puisse épouser le perfide et élever ses enfants avec lui, leur père, en fuyant à Rome. Mais Adalgisa, scandalisée par la trahison du Romain Pollione qui a séduit deux druidesses, profanant ainsi le temple sacré, ne veut pas du sacrifice de Norma et refuse de partir avec lui.

Mais voilà que le Romain amoureux, prêt à enlever Adalgisa, est découvert dans le temple, capturé par les Gaulois qui ignorent encore quelle druidesse a trahi ses vœux. Son sort dépend de Norma qui exige de lui le serment de fuir Adalgisa, de ne pas l’arracher à l’autel qui la condamnerait au bûcher et de partir pour Rome : bravant la fureur de la grande Prêtresse, il refuse héroïquement de monnayer sa vie par le renoncement à l’amour. Dans un tragique duo, Norma, telle une autre Médée, pour se venger du volage amant, lui avoue qu’elle serait capable de tuer leurs deux enfants.

La tragédie fera qu’elle-même, noblement, sans dénoncer Adalgisa, dénonce le sacrilège du Romain et le sien et demande le supplice pour tous deux. Pollione, reconnaissant sa grandeur d’âme, lui demande pardon et l’accompagne dans la mort : bûcher sacrificiel des amants réunis dans les flammes d’un amour condamné d’avance. Mais auparavant, Norma, qui n’a pas tué ses deux fils, demande en secret à son père Orovèse de ne pas leur faire payer le sacrilège de leur mère, ce qu’il finit par accepter tandis que les amants marchent au supplice.

II. De la Norma de Soumet à celle de Bellini : crépuscule du paganisme

         1. Quelle Gaule ?

En ai-je vu des Norma, et toujours la frustration, dans ma curiosité à approfondir les œuvres, de n’en pas connaître l’époque exacte car enfin, la Gaule et Rome, c’est une longue histoire. Prodigues en textes, en Notes d’intentions, rien chez les metteurs en scène d’une chronologie plus ou moins précise.

Anne Delbée, dans le livret du programme, nous offre, en avant mais hors propos, une intéressante glose, mais sans référence de sources, sur des mythes celtiques tout à fait étrangers à l’histoire, le Grand cerf blanc, le Bag-Noz, le pays Sid, etc., alors que, historiquement, l’on sait qu’on ne sait pratiquement rien sinon de seconde et tardive main sur les Celtes, très divers en cultures, diversement répandus en Europe. Par ailleurs, comme souvent chez les metteurs en scène, elle prête au seul compositeur, Bellini ce qui est à son librettiste Romani, ignorant, comme tous les autres, la pièce originelle de Soumet d’où est tiré l’opéra. [1]

Nous ne sommes pas dans la conquête de la Gaule entre 58 et 51 avant JC par Jules César —qui en distingue trois et différentes— les Romains ne sont pas des « envahisseurs » comme dit à tort le résumé du programme, ni des occupants contre lesquels les Gaulois veulent se soulever, Pollione n’est pas un de ces « conquérants au casque dur séduisant des jeunes filles consacrées ». Nous sommes dans une société depuis longtemps gallo-romaine, une didascalie nous présente la chambre de Norma avec « un lit romain ». À lire Soumet, je peux situer l’action entre 313 et 391 après JC.

2. Motifs de la révolte des Gaulois : paganisme et christianisme

En 313, l'édit de Milan de l'empereur Constantin, pour  mettre fin à la persécution du christianisme, avait accordé la liberté de culte à tous les habitants de l'Empire mais les manifestations des cultes païens, magie, haruspicine, sacrifices, sont lentement réprimées avant que toutes les pratiques païennes soient finalement interdites et poursuivies à partir de 391 par Théodose Ier qui, en 380, avait proclamé le christianisme unique religion de l'Empire.

Or, dès la distribution, on lit Clotilde, « Nourrice chrétienne ». Au nom de ce Dieu sur la croix, sa piété s’exprime dans ses conseils de pardon amoureux à Norma et de pitié filiale à la mère traversée du désir monstrueux de tuer ses enfants. Sans doute fait-elle le catéchisme aux enfants, puisqu’on la voit rassurer l’aîné Agenor troublé d’un songe d’infanticide, quelle dit impossible à des parents. Mais le gamin lui objecte un exemple :

Agenor

Mais ne m’as-tu pas dit qu’Abraham à l’autel

Était prêt à frapper son fils du coup mortel ?

Son fils !

Clotilde

                Dieu l’éprouvait.

Agenor

                                           Ah ! cette épreuve amère,

Pourrait-il la tenter sur le cœur d’une mère ?

Ses ordres n’auraient pas sans doute été suivis ;

Quelle mère jamais immolerait son fils !

Notre mort coûterait trop de larmes amères.

Oui, la mort des enfants brise le cœur des mères.

Nous faisons tout l'orgueil de la nôtre et toujours

Son amour tutélaire a veillé sur nos jours.

Agénor à Clotilde

Mais quelle image encore adores-tu tout bas ?

Clotilde

Une mère portant son enfant dans ses bras.

Comme un exorcisme, il s’agit, bien sûr, de la Vierge à l’Enfant, qui est déjà l’image de la Mère idéale, opposée à Norma tentée par le meurtre des fils pour se venger du père dont elle pressent l’abandon. Mais, tout en posant le thème de l’infanticide, mais aussi celui du sacrifice final du Fils, la scène révèle l’image d’une famille : Pollion, père attentif à sa descendance, rend visite à ses enfants que, pour les protéger des Gaulois et préserver l’honneur de Norma, il a confié sans doute aux soins secrets d’une servante d’une Rome chrétienne et sans doute l’est-il aussi.

2. Pollion, chrétien ?

À son confident Flavio, qui veut le ramener à la raison et à ses promesses à Norma, mère de ses enfants, il exprime toute sa dérision des dieux locaux et sa répulsion des superstitions religieuses des Gaulois et de Norma, une terminologie discriminatoire qui est moins dans la tolérance religieuse du décret de Constantin de 313 que dans l’esprit intolérant postérieur de Théodose. On apprend aussi que Norma a vécu trois ans à Rome. Peut-être y avait-elle connu Pollion, nommé Proconsul en Gaule, c'est-à-dire gouverneur et avec lequel elle envisage en tous les cas, avec leurs enfants, de rentrer à Rome. La prêtresse païenne (avant ou après son retour en Gaule?) connaît sûrement la nouvelle religion monothéiste qui s'impose à Rome, sinon officielle et obligatoire, près de l'être. Dans son interrogatoire final, pour exiger son serment, c’est par son Dieu singulier et non par des dieux pluriels du paganisme (« dei » en italien) que Norma veut le faire jurer par son Dieu, par ses enfants, alors que la symétrie grammaticale pouvait mettre en facteur commun le pluriel des dieux païens et des enfants :  

« Pel tuo Dio, pei figli tuoi… » ('Par ton Dieu, par tes enfants')

C’est le Gaulois Sigismar, poussant Orovèse à presser sa fille à décréter le soulèvement contre les Romains, qui exprime la raison profonde de la révolte : contre l’esclavage religieux, l’imposition tyrannique d’un nouveau culte étranger. Les Romains ont longtemps pris librement des dieux de toutes les contrées conquises, les faisant adopter à leurs conquêtes, mais désormais ils semblent vouloir en imposer un seul :

Et poussés chaque jour d'un paganisme à l'autre,

Nous mourons pour leur foi, sans vivre pour la nôtre.

Prolétaires martyrs de deux cultes rivaux,

Voulez-vous, d'Irminsul désertant les drapeaux,

Quand on peut dans la gloire en laver les outrages

Laisser périr son culte entre deux esclavages ?

3. Norma tyrannique et terrible maîtresse

Si dans l’opéra c’est simplement parce qu’il aime désormais Adalgisa qu’il veut quitter Norma, telle une épouse dont on s’est fatigué à la longue après une liaison de l’ombre qui s’use par la durée, puisqu’ils ont deux enfants, dont l’un assez grand à entendre ses raisonnements, c’est un portrait plus noir et terrible que brosse d’entrée Pollion à Flavius pour expliquer son désamour, son désir vital de « briser [ces nœuds] maudits ». Il n'est pas seul à la redouter. Norma est

Prêtresse du tonnerre,

Les Gaulois à genoux tremblent sous sa colère.

À Flavius qui lui reproche son ingratitude, il convient qu’elle l’a déjà sauvé et favorisé, mais elle le lui rappelle sans cesse, de façon humiliante, comme une dette :

À qui dois-tu le jour, ta gloire, tes lauriers ?

Quelle voix jusqu’ici maîtrisa nos guerriers !

Tu n’es rien, j’ai tout fait. […] » (II, 4)

Tyrannique, possessive, elle le harcèle et menace, faisant peser sur lui le poids de ses propres remords :

Le seul bruit de ses pas vient me glacer d’effroi.

Chacun de ses bienfaits m’apporte une terreur ;

Son dévouement pour moi ressemble à la fureur. […]

Il semble qu’on ne puisse exister que pour elle.

Et s’éloigner d’un pas, qu’on ne soit infidèle.

Mettant toujours le ciel en tiers dans ses transports,

Elle m’a saturé de l’ennui des remords.

Honteuse dans le cœur d'un amour qu'elle blâme,

Elle jette sur moi le fardeau de son âme,

Et d'un rêve de crime envenime mes jours.

La fièvre de ses traits passe dans ses discours ;

Son orgueil insultant, même quand il supplie,

Donne à ses passions le cri de la folie. (I, 1).

Pollion pressent et annonce déjà la folie meurtrière qui va s’emparer de cette amante que l’on dirait aujourd’hui « toxique ». À Flavius qui lui conseille de l’amener à Rome avec les enfants, il répond :

Que ferais-je à la cour d’un spectre tyrannique,

Qui ne lit que ma mort dans son livre mystique ?

Elle se prophétise un manquement de foi,

Et son poignard jaloux veille toujours sur moi.

Cependant, Norma en espérant le mariage, la régularisation dirait-on  de son humiliante situation d’épouse et mère de l’ombre, le supplie humblement de l’amener à Rome avec les enfants, impatients de partir en famille :

Moi, je t'aime encor quand je songe à mes fils.

Quand je songe aux périls de ces tendres victimes.

Oui, je sens que je t'aime et pardonne à tes crimes.

Ne me donne ton nom que par amour pour eux ;

Épouse, amante, esclave, esclave si tu veux...

Emmène avec tes fils leur mère qui t'implore,

Et qui te bénira quoiqu'elle pleure encore.

Pollion, mélange de lâcheté, tramant dans l’ombre sa fuite avec les enfants et Adalgisa, tout en craignant la femme, ne craint pas la mort dont elle le menace : tombé entre ses mains, il affronte avec un panache romain la prêtresse assoiffée de vengeance. Orovèse donne à sa fille le poignard sacré pour le tuer. Norma a des hésitations qui sont un souvenir du célébrissime récit d’Armide de Lully, repris par Gluck, qui s’apprête à tuer Renaud endormi mais ne le peut :

Enfin, il est en ma puissance […] Je vais percer son invincible cœur.

Pollion voit que Norma hésite, il remarque, la provoque :

La prêtresse a tremblé mais non pas la victime.

Sois calme comme moi.

 

Norma semble se reprendre et trouve une excuse à son impuissance :

Quoi! je puis me venger, et j'hésite, oh non, non;

Ce fer...

Je te méprise trop pour t'arracher le jour.

Pollion :

Frappe, qu'aucun remords ici ne te retienne. 

 

Norma, réclamant le supplice a cet aveu public de ses crimes :

J'ai levé vers le ciel mes adultères mains,

J'ai d'oracles menteurs protégé les Romains.

En y cachant les fruits d'une flamme exécrable,

J'ai profané des dieux l'asile impénétrable

Je vous atteste tous, autels, rameau sacré.

Le génie de Romani, par rapport à la pièce de Soumet, est la dernière scène de duo entre Norma, qui veut sauver Pollion contre son renoncement à l’amour d’Adalgisa, le fier refus du Romain ; le chantage de Norma au supplice de la jeune druidesse, au meurtre de ses enfants et, finalement sa propre dénonciation qui la condamne à mort, l’admiration de Pollione pour sa générosité sacrificielle, et, envers cette « femme sublime » son retour de flamme, littéral, puisqu’il vont monter unis au bûcher, assurés de l’acceptation d’Orovèse d’épargner les enfants.

Encombrée d’un cinquième acte de la convention de la tragédie française, dans la pièce de Soumet, on n’exécute pas sur le champ les amants : Norma n’est qu'arrêtée, reléguée dans une grotte en attendant le châtiment. Pollion s’est enfui. Il revient en force pour sauver cette femme qu’il aime encore. Mais elle est devenue folle et tue ses enfants et se suicide, sous les yeux horrifiés de Pollion qui est épargné mais Orovèse lui prophétise une vie pire que la mort :

Tu vivras en proie à sa démence

Son supplice finit ; Romain, le tien commence.

Romani et Bellini nous épargnent une de ces scènes de folie dont ils avaient lancé la mode en 1827 avec Il pirata et son héroïne passant de la passion à la démence, qui a son sommet avec la Lucia di Lammermoor de Donizetti en 1835.

III. MISE EN SCÈNE ET INTERPRÉTATION

          Le décor (Abel Orain / Hernàn Peñuela) hésite entre le symbolisme premier de panneaux latéraux blancs, pendillons tombant des cintres, barbouillés de vagues feuilles vertes qu’on dirait Art Déco, encadrant un sombre plan incliné, dalle de tombe ou autel de sacrifice, et l’abstraction beaucoup plus parlante dans sa nudité, de pans triangulaires, coupés tels des lames, menaçantes de leur épure affutée, prêtes à trancher, à s’abattre sur le grouillement brouillon de ces Gaulois en braies et vareuses blanches, tablier et foulard gris, sur un sol en miroir.

Le confident Flavio et Pollion ont des cuirasses romaines de cuir et d’acier, ce dernier drapé dans une vaste cape rouge à galon d’or, emblème d’imperator (costumes : Mine Verges), c’est-à-dire du chef (et du mâle) victorieux, dont le déploiement, quand il l’enlève, est d’un bel envol contrastant sur l’ensemble d’un noir marmoréen, tout comme, à l’inverse, la blanche tunique de la vierge Adalgisa, toute de rouge au moment de la passion avouée comme si les roses rouges de l’amour l’avaient abreuvée, imbibée tout entière. Norma, femme fatale et prêtresse de mort, est sobrement vêtue de noir, mais revêtue d’un manteau argenté, enveloppée parfois du nuageux emballage du Cerf, oublions ici le déballage cornu.

         Discret mais subtil signe scénique au milieu d’indiscrets et gros effets, le bouquet de roses rouges come sa cape que Pollione arbore, sans doute offrande d’amour ardent pour Adalgisa, qui gît, jeté au sol, dont la jeune vierge ramasse une fleur, puis Norma, comme un passage de relais, la contagion amoureuse entre les trois héros, et sang inévitable par les pétales effeuillés, éplorés sur le noir général de la dalle sacrificielle.

         Les lumières variées de Vinicio Cheli, réalisées par Jacopo Pantani, habilleront dramatiquement cette austère géométrie qu’on imagine plus facilement dans une linéaire Égypte, ou un lieu imaginaire, que dans le gribouillage buissonnier d’une forêt gauloise.

         Le Grand Cerf, volant à volants

Justement, à défaut de plantes, d’arbres, de forêt sacrée argentée par la lune que chante Norma, nous avons les ramures, les bois dorés d’un cerf, avec agrandissement occupant le devant de la scène comme un trône incongru et menaçant de cornes pointues pour Norma, si obsédant et omniprésent qu’à tant de corne soumise, la mise en scène en devient multicornue ou, au moins, biscornue.

Pourtant, nous lui devons les plus belles images sur fond de marbre noir : tiré d’on ne sait où, de supposées légendes celtiques, ce Cerf pourrait bien être littéralement un vrai cerf-volant à tant de volants éployés et voiles déployées dans un possible envol de mousseuses mousselines pour voilure, un envol nébuleux enveloppant Norma dans sa laiteuse et lunaire nuée.

Et le voilà qui parle ! En français sinon gaulois ou gaélique, et même sur la musique italienne de Bellini, bien sûr omni-langues car universelle. Par la voix non chantante mais créative du méritant Valentin Fruitier, c’est la récréation : nous contant des légendes qu’on nous dit celtiques, il nous distrait du drame terre à terre de ces pauvres humains en nous ouvrant les portes surhumaines, célestes, des mythes et légendes, les dissolvant à cette échelle cosmique où se perdent, dans l’insignifiance, les tracas et scènes du ménage à trois de ces fourmis humaines.

Pour finir, belle ombre fantomatique blanche à la noire Norma, il ne la couronne pas de gui ni de verveine magique, mais de la martyrisante couronne d’épines de ces bois, immense ramure dorée qui, au risque d’écorcher celui de l’héroïne, accrochant l’œil, décroche l’oreille du spectateur admirant le tableau. Bref, c’est un constant et consternant parasitage de l’œuvre, un remplissage insultant à la concision tragique de la trame tissée avec tant de finesse par Romani.

Pour finir, à nous qui détestons la chasse, et plus la chasse à courre, on inflige ce spectacle : la pauvre bête, qu’on croyait au moins sacrée, est massacrée sans qu’on chasse pourquoi, peut-être pour nous prouver que la dalle tombale n’est pas que dalle mais bien un autel de sacrifices.

À défaut de ce pauvre cerf cruellement trucidé sans raison explicite, nous aurons l’image de deux chevaux blancs surgis inexplicablement du fond de scène, superbe autant qu’énigmatique présence, témoins piaffants du bûcher invisible des amants maudits signifié à grand renfort de fumigène rougi par les projos.

Pourtant, hors ces gros effets discutables, nous nous serons attendris aux images projetées de ces petits princes enfants, l’un à la fleur, riantes frimousses à frémir quand on sait que leur mère envisage de les tuer dans leur sommeil. La peau nue d’un homme, c’est toute la douleur et la nostalgie sensuelle de la femme délaissée par l’amant au profit d’une autre, plus jeune.

Anne Delbée a raison d’invoquer Phèdre dans la somatisation du désir, de l’amour qui fait rougir, frémir et dans les remords et le désir d’expiation de Norma. Mais, pour tous les héros, on peut évoquer une générosité au sens cornélien du terme, une grandeur, une noblesse d’âme : malgré sa jalousie, Norma n’implique pas Adalgisa, veut sauver Pollione ; la jeune druidesse, malgré son amour pour le Romain, n’accepte pas le marché en sa faveur qu’elle lui propose. Quant à l’homme, objet du litige, par son héroïsme final, refusant le salut contre son amour, suppliant pour Adalgisa et non pour lui, demandant la mort pour lui seul se reconnaissant coupable (de désamour, d’amour ?), acceptant le supplice, montre que, finalement, il était digne de ces femmes exceptionnelles. Même quand Norma lui dit qu’elle peut le sauver, noblement, il répond : « Tu nol dêi », ‘Tu ne le dois pas’, conscient des devoirs de la prêtresse qu’elle enfreindrait encore pour lui.

D’entrée, dès la première battue, à la tête de l’Orchestre de l’Opéra de Marseille qu’il enflamme comme prédiction sonore du bûcher final, le jeune chef Michele Spotti donne aux musiciens, à cette musique, une impulsion une pulsion, une pulsation, une fièvre vraiment tragique, dont on a même peur qu’il ne soit victime tant il semble faire corps avec cette partition passionnelle.

Le rideau se lève, sur un sombre grondement menaçant du chœur, pratiquement masculin des Gaulois surgis de l’ombre, en blanc, sur lequel s’élèvera, tonnera du haut de la dalle piédestal, la puissante harangue d’un Orovèse de taille, hiératique statue de Commandeur, campé avec grandeur en tous sens du mot et de voix par la basse Patrick Bolleire.

Planté ce décor vocal impressionnant, escorté de son confident Flavio, un Marc Larcher qui, en quelques brèves phrases claires impose un personnage net qui pourrait en dire long sur l’ombreuse intrigue de son maître Pollione, un Proconsul d’Empire qui n’en a plus aucun sur lui, usée sa longue prudence et patience de son occulte liaison avec Norma dont il a deux enfants, saisi d’une nouvelle fièvre amoureuse, jetant au vent sa noble cape de dignitaire romain, insensible à ses devoirs militaires et politiques, de père, d’amant, en proie au seul désir impérieux, risquant tout sur la folie sacrilège de vouloir arracher à l’autel une jeune druidesse et de fuir avec elle et ses enfants à Rome. Avec ses aigus puissants, arrachés, dirait-on, à corps et âme, acérés comme des lames d’un glaive, lancés comme ces imparables javelots de légionnaire, Enea Scala sculpte un héroïque guerrier de la dure grandeur romaine plus qu’un amoureux adepte de l’Art d’aimer d’Ovide, dont seul le bouquet de roses qu’il arborait tendrement et maladroitement à la main pourrait être un lointain souvenir, vite réduit à l’effeuillage, voué à faner irrémédiablement comme son amour pour Norma, comme tout amour en fait.

Les chanteurs, c’est dire leur qualité, se plient à ces tempos si vifs imposés par le chef, si haletants malgré les parties difficiles qui sont le lot, le flot courant de cette musique souvent incandescente de ports de voix inverses, gammes ascendantes, descendantes, de sauts, fusées, mais aussi balancée de languides phrasés rêveurs empreints d’une mélancolique poésie.

Après ce dynamisme viril presque brutal, la stase, presque l’extase, c’est la parenthèse mélancolique, onirique, lunaire, la prière à la lune de Norma, « Casta diva ». C’est une longue cantilène, une déploration opposant, à l’esprit de guerre, une imploration de paix sur terre comme au ciel mais aussi pour son cœur et son corps. Et c’est très justement que Karine Deshayes, la commence comme un murmure, comme un vœu personnel, intime, avant de l’intimer, comme le silence aux clameurs guerrières, aux Gaulois dont le chœur (Florent Mayet et Clément Lonca) respectueusement attentif, semble une douce toile de fond nocturne à cette aérienne aria, sinueuse, rêveuse, au souffle qu’on dirait infini, doucement semée de vocalises scintillantes comme de discrètes étoiles auréolant discrètement la lune.

La ligne bellinienne, si bien suivie, est un chemin fleuri d’ornements qui ne sont pas seulement de folles acrobaties techniques concédées aux caprices et audaces de cantatrices virtuoses mais restent au service de l’expression, les vocalises n’ayant jamais perdu complètement l’empreinte religieuse, mystique, de leur origine. Plus que chez Meyerbeer, Karine Deshayes, récente Norma après avoir chanté Adalgisa, me semble ici chez elle : la douceur de son timbre, au moelleux parfois maternel me rend encore plus cruel et impossible le passage à l’acte de l’infanticide dont elle rêve ou cauchemarde. Comme le voulait Callas, elle sait, parfois, prendre des risques de sons brutaux expressifs dans les imprécations.

         Digne rivale et complice, la soprano géorgienne Salome Jicia, remarquable Norma sur de nombreuses scènes, s’impose ici en Adalgisa, opposant le satin doré de sa voix à la soie brillante de celle de Deshayes et sa silhouette juvénile et fragile à la force hiératique de la grande prêtresse empêtrée dans son rôle qui l’empêche de vivre, qu’elle veut épargner à la jeune druidesse. Grande chanteuse virtuose, c’est une parfaite actrice, légère, visage mobile, une voix large, égale, à l’épreuve des aigus tout aussi tendus que ceux du rôle-titre. Leur premier duo où la jeune conte à l’aînée comment naît l’amour que l’autre sent disparaître chez l’homme tout en en revivant, à ce récit, les débuts, est bouleversant. Le second, je le disais à Karine Deshayes rencontrée en toute simplicité le lendemain à la Criée, en dehors de l’enjeu dramatique, m’a semblé d’une rare beauté musicale : même si les vocalises des deux cantatrices sont souvent conjointes, ou à peine délicatement décalées, c’était comme si l’or et l’argent respectif de leur voix tressaient une tendre union, avec l’illusion, dans la strette finale, que les notes piquées argentées de Karine se clouaient en douceur sur le tissu doré de Salome Jicia.

         On ne saurait rendre justice à toute une troupe nous apportant un tel plaisir sans saluer la toute féminine Laurence Janot campant ici une vraisemblable virile gauloise guerrière de campement mais aussi gardienne farouche des enfants à sa garde confiés par Norma et sans doute aussi Pollione, soucieux de leur progéniture.

         Et comment ne pas applaudir encore le chef Michele Spotti, payant sans doute son implication passionnelle dans sa direction, sa fougue, d’un malaise, relayé sans hiatus, presque imperceptiblement, par son assistant Federico Tibone, puis reprenant vaillamment la baguette après l’entracte. Beauté et fragilité du spectacle vivant.

Opéra de Marseille, NORMA, Vincenzo BELLINI

Production Opéra national du Capitole de Toulouse

Direction musicale : Michele SPOTTI

Assistant direction musicale : Federico TIBONE

2e assistant direction musicale : Giorgio D'ALONZO

Mise en scène : Anne DELBÉE

Collaboration artistique : Émilie DELBÉE

Décors : Abel ORAIN / Hernán PEÑUELA

Costumes : Mine VERGES

Assistant costumes : Maxime FONTANIER

Lumières : Vinicio CHELI

Réalisation lumières : Jacopo PANTANI

Sculpteurs :Vincent LIÉVORE / Augustin FRISON-ROCHE

Régisseur de production : Jean-Louis MEUNIER

Régisseuse de scène : Alexandra BEIGNARD

Surtitrage : Richard NEEL

Régie de surtitrage : Qiang LI

Distribution

Norma : Karine DESHAYES

Adalgisa : Salomé JICIA

Clotilda : Laurence JANOT

Pollione : Enea SCALA

Oroveso : Patrick BOLLEIRE

Flavio : Marc LARCHER

Grand cerf : Valentin FRUITIER

Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille

 Chef de Chœur Florent Mayet

Clément LONCA :

Pianiste, cheffe de chant : Fabienne DI LANDRO

Photos Christian Dresse :

1. Le Grand cerf ;

2. Norma ;

3. Le Grand cerf investissant Norma ;

4. Des chevaux incongrus ;

5. Flavio et Pollione, bouquet à la main ;

6. Norma, Adalgisa, Pollione ;

7. Clotilde.

 

 



[1] J’en ai trouvé le texte sur un site anglophone, mais  très mal scanné avec beaucoup de trous.