mardi, avril 21, 2015

MARS EN BAROQUE (JEAN-MARC AYMES)


RADIO DIALOGUE (Marseille : 89.9 FM, Aubagne ; Aix-Étang de Berre : 101.9)
« LE BLOG-NOTE DE BENITO » N° 168

                                  (Les exemples musicaux sont absents ici)
MARS EN BAROQUE 2015 (3)
PORTRAIT DE JEAN-MARC AYMES
Photo Marie-Ève Brouet
    Des yeux rieurs, un sourire d’enfant, une dégaine, une allure d’éternel adolescent : on a du mal à croire que Jean-Marc-Aymes, qui sonne comme « aime », un nom qui le définit bien, depuis près d’un quart de siècle, s’est imposé comme une évidence, une « audience » devrait-on dire si ce terme était pour l’oreille ce qu’évidence est pour les yeux, dans le paysage musical marseillais. De même, ce globe-trotter, qui parcourt le monde sur les ailes de la musique semble a priori si marseillais, même dans le soleil de son accent, qu’on peine à imaginer qu’il n’est pas de chez nous, de Marseille. Bon, il n’est pas de très loin, de Narbonne, voisine méditerranéenne, et il a vécu à Port-la-Nouvelle avant de jeter son ancre permanente près de notre Vieux-Port après tant d’escales musicales.

   Originaire de l’Aude, de l’intérieur des terres, sa famille ancienne va rejoindre les bords de la Méditerranée ouverte à tous les horizons où travaillent son père dentiste et sa mère, pianiste et organiste, qui accompagne des offices et encourage le petit garçon dans une vocation précoce, qui manifeste un vif besoin de musique très tôt. À cinq et six ans, il adore Beethoven dont il écoute en boucle les symphonies, dévore des dictionnaires des grands musiciens. Réussissant le concours d’entrée du Conservatoire, grâce à des horaires aménagés, il poursuit de belles études classiques et, à seize ans, se retrouve autonome à Toulouse. C’est là qu’il a la chance de tomber sur un professeur d’Histoire de la musique, spécialisé dans la danse, mais qui lui révèle cette musique baroque, déjà redécouverte pendant les années 60, mais qui connaît un renouveau musicologique puissant dans les années 70 grâce à des ensembles comme la Chapelle royale et les Arts florissants qui sont désormais, si l’on peut le  dire pour des "baroqueux", des classiques dans l’histoire de cette musique sinon de notre temps, pour notre temps.

     Dans l’atmosphère plutôt conservatrice des Conservatoires de cette époque, cette ouverture sur le Baroque, la musique de la fin du XVI e siècle jusqu’à plus de la moitié du XVIIIe, est une fenêtre ouverte sur l’air frais et un horizon nouveau. Bac en poche et Prix de piano en main, notre jeune Jean-Marc se lance en 1980 dans l’étude passionnée du clavecin, l’instrument-roi de cette musique, mais aussi de l’orgue. Et, à partir de là, il ne va cesser d’explorer, d’exploiter, ce continent longtemps perdu de la musique baroque, de défricher et déchiffrer ses terres redevenues vierges à force d’un silence forcé de près de deux siècles et d'une résurgence un peu forcenée à notre époque.
    La pointe de la musicologie baroque d’alors se situe dans les Pays-Bas. C’est encore la chance : la rencontre d’un professeur hollandais auquel il tient à rendre hommage, William Jansen, qui le met sur la piste de Girolamo Frescobaldi, musicien italien (1583-1643) dont il entreprendra l’enregistrement intégral de la musique pour clavier. Frescobaldi est donc une rencontre qui le marque et à laquelle il laisse sa marque : ainsi, le quatrième et dernier volume (Fantasie, Recercari & Canzoni Franzese, Fiori musicali), se voit décerner un Diapason 5 étoiles. Et l’ensemble de cette intégrale a d’ailleurs reçu un accueil enthousiaste de la critique internationale : deux diapasons d’or et 5 Goldberg (volumes 1 et 3), Joker de la revue belge Crescendo pour le volume 1).


    Mais, revenons en arrière : après une maîtrise sur le compositeur contemporain Ligetti, et un projet de thèse, malheureusement non mené à terme sur la rhétorique musicale, nous retrouvons le jeune Jean-Marc Aymes à Bruxelles pour un diplôme supérieur de clavecin. Revenu à Toulouse, il joue avec l’ensemble La Fenice fondé par  Jean Tubery, condisciple au lycée Saint-Sernin. Il y rencontre des personnalités  françaises illustrant le baroque, la soprano Isabelle Poulenard mais aussi notre Aixoise Sylvie Mocquet, gambiste, et notre marseillais Roland Hayrabédian, fondateur de Musicatreize, qui défend la musique contemporaine, avec lequel Aymes collabore toujours. En effet, la musique moderne, au XXe siècle renoue avec le clavecin, instrument ancien redécouvert comme nouveau pour ses possibilités expressives, et, portant avec une attention aiguë à l’interprète, créant de la sorte  de fructueuses rencontres musicales.
Photo : Catherine-Peillon

     Autre rencontre décisive, toujours à Toulouse, grâce à Jean Tubery, celle de la soprano argentine María Cristina Kiehr, qui a déjà une belle carrière de chanteuse baroque, avec de nombreux disques à son actif. Installé à Marseille en 1991 sur un coup de cœur, avec également le concours de Sylvie Mocquet, ils s’apprêtent pour un concert, et fondent leur ensemble, désormais célèbre dans la galaxie baroque, Concerto soave. Ils préparent un disque et Michèle Doucet, des Musées de Marseille, pour l’enregistrement, leur donne asile au Palais Longchamp. Ses merveilleuses fontaines deviennent donc les eaux baptismales marseillaises d’un ensemble qui fait rayonner, par ses concerts dans les plus grands festivals et ses enregistrements, le nom de notre ville dans le monde entier.
Concerto soave 
    À Marseille, Jean-Marc Aymes intègre le CRAB, Centre Régional d’Art Baroque dirigé par la mezzo Mireille Quercia, par ailleurs membre de Musicatreize. Ils montent des opéras baroques remarquables au théâtre Gyptis, l’Incoronazione di Poppea de Monteverdi, Orlando de Hændel, mis en scène respectivement par Andonis Vouyoucas et la regrettée Françoise Chatôt, et Il Mondo della luna de Haydn par Richard Martin au Toursky, avec de brillants jeunes solistes du riche vivier intrnational du CNIPAL, Centre National d'Insertion Professionnelle d'Artistes Lyriques, longtemps fleuron du prestige lyrique marseillais dans le monde, malheureusement disparu aujourd'hui par le lamentable désintéressement des institutions. Hélas, les moyens ne suivent plus. Le Festival mars en Baroque prend le relais du CRAB et Mireille Quercia lui en passe la direction en 2007. 
     En septembre 2009, Jean-Marc Aymes est nommé professeur de clavecin du Conservatoire Supérieur de Musique et de Danse de Lyon et passe de la sorte son expérience et sa culture à des disciples, invités cette année avec d’autres jeunes dans le cadre du 13 e Festival Mars en Baroque 2015. 

      Site de Mars en baroque : www.marsenbaroque.com

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