Vingt-troisième Concert des Classes préparatoires
du
Lycée Thiers
8 mars 2013
Le Lycée Thiers, auquel on ne reprochera que son nom, de cet Adolphe
déjà, premier Président de la Troisième République et boucher de la Commune,
est un fleuron pédagogique indiscutable de Marseille. Non seulement on connaît
son enseignement traditionnel de qualité, mais celui, pointu, spécialisé,
affiné, raffiné, dispensé au sein des fameuses classes préparatoires aux
grandes écoles (CPGE). Ce sont ces filières d'enseignement supérieur au cœur du
collège et lycée, ces fameuses « classes prépas » ou familièrement
simplement « prépas », littéraires, scientifiques, économiques et
commerciales qui, par un travail intense, forment, préparent de brillants
bacheliers aux plus hauts concours d'entrée des grandes écoles de commerce,
d’ingénieurs, des écoles normales supérieures aux écoles militaires, qui en
feront les cadres, les techniciens et, pour certains poussant plus loin, les
futurs serviteurs ou dirigeants de l’État.
Mais ce Lycée s’honore,
sonore, d’une belle tradition musicale de près d’un quart de siècle : le
concert offert justement par ces jeunes « préparationnaires » à guère
plus d’un mois du début de leur fameux concours. Au Théâtre du Gymnase jouxtant le lycée, tohu-bohu de bahut : dès
l’entrée, comme dans la foulée d’une joyeuse sortie de cours, concours de foule
au moins, pour sinon concourir, courir saluer, soutenir ces préparationnaires, potaches guère potiches, prêts à entrer en scène, à monter sur scène pour montrer non un savoir
livresque et théorique au tournant duquel on les attend bientôt, mais pour
démontrer que, tout jeunes intellectuels qu’ils soient, ils ne sont pas
seulement, des forts en thème enlunettés, des têtes chercheuses dans les
froides nuées des plans de carrière, mais également des artistes attentifs à la
musique de toujours et à celle de leur temps.
On ne cachera pas le bonheur de découvrir dans ces étudiants d’élite
qu’on croirait pâlis et blanchis sous le travail, cheveux longs ou courts,
tignasses ébouriffées ou crête naissante, un large éventail de musiciens et
d’instrumentistes, chanteurs, accomplis ou encore à accomplir, timides,
angoissés, anxieux ou décidés, saisis par le trac ou des traces défensives de
fous rires en coulisses sensibles sur scène. On se ridiculiserait à chipoter
musicalement sur un petit ratage, un décalage, face à l’abattage, au courage
qu’il faut malgré tout pour se montrer sur un plateau de beau théâtre quand on
n’est pas un musicien professionnel, mais on ne résiste pas à l’ardeur
communicative et on baisse les armes devant la qualité tout de même remarquable
de ce concert. Et l’on imagine aisément que, considéré le travail accaparant et
obsédant des cours de prépas aux concours, nos jeunes artistes "préparationnaires" n’ont guère disposé de
beaucoup de loisirs pour se préparer pour cet unique concert!
Quant aux
arrangements des musiques choisies par eux, pour leurs ensembles d’instruments,
classiques ou modernes, on ne peut qu’en admirer la belle tenue et
l’inventivité : sacré travail pour se produire en un lieu consacré et
juste pour quelques minutes en soliste ou en groupe, sans tirer à soi la
couverture des applaudissements pour laisser la place aux suivants. On remarque
aussi les sympathiques tenues vestimentaires, certains, filles et garçons, en
bretelles sur chemise blanche, sous un feutre badin et gamin ou Stetson style
cow boy. Certes, si les niveaux sont inégaux selon l’inégalité d’études
musicales de chacun, et il serait trop long de les citer individuellement, tous
ont un engagement communicatif qui mérite sympathie et respect, offrant
sérieusement leur talent sans se prendre au sérieux. Salut, les artistes !
Même les profs préparateurs paient de leur personne et de leur
talent en jouant à jeu égal avec leurs élèves : trois d’entre eux, Laurent
Barbaza, Christian Garing et Jacques Turner, sans rage ni ravage, sans tapage, se partagent à
six mains le clavier d’une Romance
de Rachmaninov ! La soirée est présentée avec simplicité et chaleur par
l’organisateur Christian Garing
qui peut en être aussi fier que de ses élèves.
Hors concours, le pianiste Bernard d’Ascoli, invité exceptionnel de ce concert sympathiquement
exceptionnel, ouvre d’autres portes du rêve avec le poétique Impromptu, opus
90 N°3 en sol bémol, d’un Schubert que rappellera Schumann dans ses Dichterliebe. On admire ses traits aériens, virtuoses,
vertigineux dans La leggierezza de Liszt qui défie la pesanteur,
l’héroïsme pacifique de la Grande polonaise, opus 22 en mi bémol de Chopin et on le remercie des bis gratifiants,
étude et valse nostalgique du même Frédéric. Belle et heureuse soirée.
Tous les vœux de réussite pour ces « préparationnaires »
prometteurs.
Photos offertes par des parents heureux et fiers à plus d'un titre :
1. Cohue de bahut ;
2. Remonter les bretelles ;
3. Se tenir à carreau ;
4. Saluts et applaudissements;
5. Solitude sonore de l'artiste : Bernard d'Ascoli.
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