MARSEILLE SOUS LES ÉTOILES (2)
À propos de la
programmation du théâtre Silvain, j’avais déjà conseillé le concert original de
l’ensemble marseillais Una Stella du 27 juillet sur les Huit saisons, celles de Vivaldi doublées de
celles d’Héctor Piazzolla. Je signalais aussi que, le 6 août, Una Stella se
joindra à Michel Legrand et son trio pour un autre concert atypique.
Mais je me devais de
présenter cet ensemble composé de musiciens solistes de prestigieux orchestres
de divers lieux qui du singulier sont passés au pluriel unis par la volonté de
mettre en commun leurs compétences en un lieu unique d’élection, Marseille. Una
Stella, cette
étoile une, mais constellation de talents réunis sous la houlette souple et
souriante de Philippe Spinosi et d’Anne-Garance Fabre dit Garrus, est autant
animé par le désir musical que par l’amitié qui unit ses membres. Si leur
berceau musical est le Baroque, on a vu qu’ils explorent en toute liberté des
répertoires diversifiés en formation de chambre. Pour célébrer ses trois années
passées à Marseille, Una Stella a fondé une saison de trois concerts : « Perla
Mediterranea », musiques baroques… d’orient et d’occident en l’église St Eugène d’Endoume.
Dans la superbe acoustique de St Eugène, Vivaldi, Monteverdi ou Albinoni, résonnent
en échos aux compositeurs espagnols issus de l’époque médiévale
arabo-andalouse, auxquels répondent parfois leurs lointains cousins d’Amérique
latine contemporains tel que Villa Lobos et, on l’a entendu la dernière fois,
H. Piazzola. Cordes frottées, pincées, percussions et voix volubiles vibrent
pour un voyage d’une rive à l’autre de la méditerranée grâce à cette étoile qui
traverse les époques.
Fin juin
dans le Temple Grignan, les musiciens d’Una Stella, entourant le contre-ténor Pascal
Bertin,
avaient donné un remarquable concert pleinement baroque. On retrouvait, les
oreilles charmées, le lumineux Arcangelo Corelli, d’un baroque trempé qui se
tempère par une mesure déjà classique, un Albinoni solaire. Mais on découvrait
la gaîté très Commedia dell’ Arte du rarissime Uccelini, au nom de volatile
chanteur prédestiné, à la musique fantasque très masque et bergamasque
carnavalesque, thème obsédant plein de pizzicati tels des pépiements d’oiseaux, d’échos et
crescendos festifs.
Il revenait à Pascal Bertin de tenir la part chantante de la soirée, avec des airs
de Purcell, de Haendel, qu’il interprétait avec la rondeur d’un timbre égal sur
tout son registre, une voix souple, colorée, une ligne bien tenue, un legato
exemplaire, un art sobre mais sûr de l’ornementation et, surtout, une
expressivité sans laquelle cette musique ne serait que virtuosité sans âme si
elle ne servait les affects. Surtout quand il s’attaquait, avec une émotion contenue et beaucoup
de noblesse, au magnifique Stabat Mater de Vivaldi, et, pour finir, au Salve
regina
auréolé de grâce de Pergolèse.
OPÉRA THÉÂTRE POUR
TOUS (OPT)
Il faut
signaler maintenant, en août deux événements importants encore dans ce théâtre
de verdure niché près de la mer, le théâtre Silvain.
En effet, en collaboration avec la ville de
Marseille et la compagnie OPT, l’Opéra théâtre Pour Tous, présente un récital lyrique le 1er
août et un opéra, Madame Butterfly de Puccini, les 11 et 13.
Fondée par
l’obstination têtue de l’excellent baryton marseillais Cyril Rovery, l’Opéra théâtre Pour Tous est une compagnie lyrique qui se
donne pour but d’être un centre d’insertion professionnel et promotionnel actif
de jeunes chanteurs sélectionnés sur concours et de monter en suite avec eux
des spectacles accessibles à un large public.
La sélection des
jeunes interprètes s’effectue, depuis des années, lors de masters classes qui ont lieu, en partenariat avec
le pôle ORL de l’hôpital de la Timone, à l’amphithéâtre de l’Hôpital Saint-Joseph. Ces classes de
perfectionnement sont reconnues par l’AFDAS (Fond d’Assurance Formation des
Secteurs de la culture, de la communication t des loisirs). Une phoniatre, le
Docteur Marie-Noëlle Grini-Grandval prodigue ses conseils et soins aux jeunes stagiaires, la
metteur en scène Karine Leleu dispense ses cours de théâtre et, enfin, des
artistes lyriques de rang international assurent la partie vocale de ces
classes de travail. Ainsi, on a vu des artistes prestigieux se succéder, selon
l’opéra étudié et travaillé : Véronique Gens, Mireille Delunsch, Marie-Ange Todorovitch,
Jean-François Lapointe, et
Leontina Vaduva, la marraine, que l’on retrouvera au théâtre Silvain, qui a
chanté avec Placido Domingo, Alberto Kraus, Roberto Alagna.
L’autre but est de
monter, mais accompagnés au piano par Ludovic-Amadeus Selmi, pianiste et
compositeur, des opéras.
L’opéra, c’est du
théâtre chanté et les sujets en sont le plus souvent tirés de romans ou de
pièces de théâtre célèbres : Les Noces de Figaro, Don Giovanni de Mozart, Traviata, Otello, Pelléas et Mélisande, etc, viennent, bien sûr, du
théâtre et, sous le livret, on retrouve Beaumarchais, Tirso de Molina, Dumas
fils, Shakespeare, Maeterlinck, etc.
Revenant à cette
origine, OPT entend fusionner opéra, théâtre et littérature : c’est-à-dire,
allégeant la partie vocale, toujours très longue, ce qu’on a éliminé de musique
est rempli par des passages théâtraux ou littéraires des œuvres originales dont
l’opéra est issu. Cela donne un éclairage nouveau intéressant à l’œuvre ainsi
présentée. C’est de cette sorte que le Don Giovanni de Mozart/da Ponte présenté l’an
dernier au Palais Longchamp, était allégé de ses récitatifs, et, à la place, il
y avait des extraits traduits du Don Juan originel espagnol de Tirso de Molina
et d’autres passages du Dom Juan de Molière. Sans être toujours entièrement convainquant,
c’était néanmoins fort intéressant. On attend donc la
suite avec cette Madame Butterfly de Puccini, chantée en italien, bien sûr, mais avec des
récits en français de la pièce originale de David Belasco Madame
Butterfly et du
roman de Pierre Lotti Madame Chrysanthème qui s’en inspire. On connaît l’histoire de cette
pauvre geisha issue d’une noble famille ruinée qu’un officier américain épouse
en passant, pour rire et jouir durant son séjour au Japon, avant de
l’abandonner avec un enfant né de leurs amours. Elle l’attend toujours du haut
de sa colline de Nagasaki mais,
quand il revient, marié à une de ses compatriotes américaines, c’est pour lui
reprendre leur enfant. Déshonorée, déja reniée par sa famille pour avoir épousé
un étranger, elle se fera hara-kiri.
On retrouva donc Leontina Vaduva le
1er août pour un concert lyrique avec les jeunes solistes d’OPT précédant
les 11 et 13, Madame Butterfly.
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