mercredi, novembre 20, 2019

VARSOVIE VERSANT AMOUR



Les Amants de Varsovie

Marseille, Théâtre des Arts
7 novembre

         Heureuse désinence, Varsovie, en français, appelle la rime « vie ». Mais la vie implique, fatalement la mort, et ce chant à l’amour, amoureusement chanté, n’y échappe pas, même dans la discrétion de deux chansons, une superbe cantilène, sûrement une ballade ancienne, dialoguée, a cappella, sur un mode plus aigu que la tessiture générale des chants, où la jeune femme, revenant chez elle, frappant à la porte, désespérée, implore sa mère de venir à son mariage : terrible réponse, la mère n’est plus là, mais dans la tombe ; ou cette dernière chanson d’amour d’un jeune compositeur à sa bien-aimée qui ne le reverra plus puisque, phares en face dans la nuit, ivresse amoureuse ou autre, sa voiture sera son cercueil.

Mais hors ces deux airs, c’est la vie qui est exaltée ici par Ewunia, à travers les traverses, les rues, les ruelles, l’errance, les déambulations, les promenades amoureuses d’un couple dans le soleil ou la brume de Varsovie, dans les rousseurs de l’automne polonais aux feuilles mortes à la pelle de Kosma, avec leurs étapes rituelles, un anachronique et humoristique cinéma muet exaltant Valentino, un café de coin de rue où Orphée cherche son Eurydice perdue sous l’œil (de Pluton ?) du chat noir : escales affectives inverses varsoviennes de celles, effectives sans affection, des marins des bateaux de la Vistule en bordée, bordel à bord, des bobards à la pute embobinée rêvant d’un mot d’amour qui l’étreint sous l’étreinte tarifée et déchire sa voix.

C’est l’amour banal, universel, avec ses joies, ses tristesses, ses langueurs, ses rancœurs, ses cœurs rancis de déceptions ou brisés, comme celui de Rebecca revenant dans son village, pour la rencontre amoureuse qui n’aura pas lieu, déçue, déchue de son rêve trop beau, à la solitude condamnée.  Même si « L’amour te pardonnera tout », il laisse des blessures mais, pour les romantiques, les plus désespérés des chants sont les chants les plus beaux.

Du chuchotement (Szeptem) de la douceur de l’aveu, du murmure de la confidence au cri de désespoir du la prostituée amère ou du tango lancinant de la séparation, Ewunia, quelques gestes sobres dessinés par la lumière, comédienne au visage expressif, chanteuse chaleureuse, voix large maîtrisée du lyrisme au parlando, envoûte de vocalité rayonnante dans sa robe polonaise fleurie, ou sa robe noire serrée de parodique vamp hollywoodienne des films noirs, sa blonde chevelure, flamboyant d’un éclair de projecteur dans l’ambiance sexy (« Le sexe est en moi»), propice et sombre de cabaret de ce nocturne varsovien. 

Bien sûr, Chopin est évoqué avec Sand, et autres couples franco-polonais aux amours célèbres, comme, on l’oublie trop, Louis XV, le Bien-Aimé éperdument amant de Marie Leszczynska sa femme, dont je rappelle que, lassée, excédée de sa frénétique passion érotique et de ses conséquences (« Toujours couchée, toujours accouchée »), elle lui ferma sa porte et son lit, les ouvrant en grand au troupeau des éphémères favorites. Rappelons aussi Balzac et Ewelina Hánska.



Mais point n’était besoin de ces amoureuses cautions pour aimer ce pont amoureux que tissait la chanteuse et diseuse entre sa Varsovie et la France : musiques belles sur la belle musique inconnue de la langue, dont elle traduisait les textes en partie, passant avec humour à l’anglais, relayée par un remarquable pianiste, solitaire et solidaire, brodant librement au-dessus commentant en dessous, partant en virtuoses dérives de rêve musical pour toujours revenir aborder, sans la saborder, pour la border amoureusement, à cette voix tendre ou tragique

 Marseille, Théâtre des Arts, 7 novembre 2019

Les Amants de Varsovie 

Ewunia - Ewa Adamusinska-Vouland – chant et textes ; Yves Dupuis : piano et arrangements.

Partenariat de l’Institut Polonais de Paris en juin 2019 (Festival « Varsovie s’invite à Paris »). En juillet 2019, Festival d’Avignon.

Prochaines représentations :

Aix-en-Provence, samedi 23 novembre à 15h00, Musée des Tapisseries.

Paris, Théâtre du Gymnase du 17 février au 28 avril 2020 tous les lundis et mardis.
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Portrait : © Karpati & Zarewicz
Le duo  : © Matthieu Wassik


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