Enregistrement
5/11/18, Culture en Provence
RADIO
DIALOGUE RCF
(Marseille :
89.9 FM, Aubagne ; Aix-Étang de Berre : 101.9)
N° 343,
semaine 45
11 novembre : commémoration du centenaire de l’Armistice de
la guerre de 14-18.
Le 14 juillet 2014, symboliquement, pour commémorer le centenaire
de la Grande Guerre, j’avais parlé des trois premiers CD de la débutante
collection lancée par les éditions Hortus : Les Musiciens et la Grande
Guerre. Nous avons suivi
pratiquement pas à pas cette collection, trente-deux enregistrements en date du 11 novembre 2018,
centenaire de l’Armistice où l’immense collection va se clore tout aussi
symboliquement.
Étrange sentiment à l’annonce de cette fin : d’un côté, on
éprouve comme un soulagement avec le souvenir de la fin de ce conflit
cataclysmique, et, en même temps, nous avons la sensation d’une perte de ce
monument pierre à pierre, disque à disque érigé, qui nous a accompagnés pendant
quatre ans, évoquant, dans la paix musicale, la guerre. La guerre par les
musiciens qui l’ont chantée, pour l’exalter d’abord dans la folie nationaliste
meurtrière des lendemains que l’on croit vainqueurs et chantants, puis, en
déchantant quand la guerre s’installe dans l’insoutenable durée, révélant son atroce
visage finalement l’abominable pour tout le monde, dans ses horreurs que même
la musique ne parvient pas à transcender.
Cette gigantesque anthologie s’était donnée pour but généreux et
ambitieux, de faire découvrir ou redécouvrir l’univers sonore des compositeurs,
interprètes et musiciens ayant vécu et subi cette guerre, mobilisés,
immobilisés dans leur œuvre, souvent blessés, souvent tués, exécuté
expéditivement comme l’héroïque Albéric
Magnard, mort coupable simplement de
patriotisme, dont la musique
innocente inaugurait la collection. Il y avait ceux restés hors du front à
cause de leur âge, de leur faiblesse constitutive comme Ravel, ambulancier malheureux, ou de leur maladie, comme Debussy,
qu’on appelait alors, Claude de France,
dans un nationalisme inévitable quand la patrie est en danger, mais
nationalisme, hélas, généralisé aux nations, qui amena cette catastrophe
mondiale.
D’autres livraisons discographiques avaient généreusement élargi l’horizon
et, passant, dépassant les odieuses frontières, prétextes aux revendications
territoriales meurtrières, nous ont offert un beau panorama de compositeurs
français, anglais, australiens du même camp, mais aussi allemands de l’autre,
qui avaient pressenti ou senti la catastrophe abattue aussi sur eux, alors
qu’ils étaient tous liés, alliés ou pas, par la fraternité universelle de la
musique, même sans se connaître.
Mais la guerre se déclare (et par qui et pourquoi ?) et l’on
devient l’ennemi officiel de celui qui est du mauvais côté de la frontière. Et
réciproquement : à chacun sa vérité, sa justice. « Plaisante justice qu’une
rivière borne, disait déjà Pascal : vérité en-deçà des Pyrénées, erreur
au-delà. »
Cette anthologie exceptionnelle, au
long de ces quatre années, disque à disque, parfois non sans résistance intime
à l’évocation de tant de malheur, nous a contraints à voir, revoir, à ne pas
oublier, en même temps que ce temps de douleur humaine, de guerre, ce que l’art
le plus épuré, la musique des hommes, même difficilement audible dans le fracas
des armes, porte d’inextinguible l’espérance à l’humanité.
Ainsi, du haut de ces 33 volumes déjà parus,
la collection, labellisée par la Mission du Centenaire en 2014, constitue un
corpus patrimonial impressionnant, cohérent dans sa pluralité diverse. C’est un
recueil de plus de deux-cents œuvres, dont près de quarante inédites, de
cent-vingt compositeurs de douze nationalités différentes.
Voici donc un rapide aperçu des deux
derniers reçus.
Inédit, du volume XXXII Ode à la France de Jacques de la Presle, sur des paroles de
René Dorin, écoutons un extrait
du Cri de guerre de le 6e
Division d’Infanterie par le Chœur Fiat Cantus dir. Thomas
Tacquet :
1) DISQUE 1, PLAGE 10
Seule l’horreur de la guerre peut
justifier ces horribles paroles, improvisées dans la tranchée, aspirant, invitant
au carnage et à la mort.
Nous quitterons cette magnifique
collection Hortus avec le CD, harpe, sur ces arpèges doux de Jacques Ibert :
2) DISQUE II, PLAGE 1
Éditions Hortus, collection les
musiciens et la Grande Guerre
La harpe consolatrice
Ibert - Tournier - Renié - La Presle - Roussel - Fauré
Pendant la Grande Guerre, la harpe par sa sonorité douce, légère et à connotation féminine est associée dans l’imaginaire aux infirmières tentant de calmer les souffrances des victimes. Les jeunes compositeurs mobilisés vont nous offrir dans leurs œuvres une vision intimiste, délicate mais souvent aussi profonde et émouvante. La grande harpiste Henriette Renié représente toutes ces femmes qui traversèrent discrètement la guerre dans la souffrance et les difficultés tout en défendant l’art à l’égal des hommes.
Programme détaillé | ||||
HORTUS 731 | CD DDD ℗ Hortus 2018 | T.T. 72'26 | ||||
Les Musiciens et la Grande Guerre, disque 31 | ||||
Jacques Ibert (1890-1962) | ||||
Six pièces | ||||
1. | Matin sur l’eau | 4'38 | ||
2. | Scherzetto | 3'51 | ||
3. | En barque, le soir... | 9'15 | ||
4. | Ballade | 5'35 | ||
5. | Reflets dans l’eau | 5'46 | ||
6. | Fantaisie | 8'47 | ||
Marcel Tournier (1879-1951) | ||||
4 Préludes | ||||
7. | Tranquille | 1'54 | ||
8. | Pas trop vite | 1'40 | ||
9. | Lent | 2'19 | ||
10. | Allegretto | 2'14 | ||
Henriette Renié (1875-1956) | ||||
6 Pièces brèves | ||||
11. | Conte de Noël | 1'33 | ||
12. | Recueillement | 1'32 | ||
13. | Air de danse | 0'55 | ||
14. | Invention dans le style ancien | 1'03 | ||
15. | Rêverie | 1'32 | ||
16. | Gavotte | 0'47 | ||
Jacques de La Presle (1888-1969) | ||||
17. | Le Jardin Mouillé | 6'17 | ||
Albert Roussel (1869-1937) | ||||
18. | Impromptu op. 21 | 6'36 | ||
Gabriel Fauré (1845-1924) | ||||
19. | Une châtelaine en sa tour op. 110 |
Ode à la France
Debussy - Bridge - Pierné - La Presle
La musique pour chœur exprime le plus souvent les sentiments d’une foule unie. Cette expression collective prend une connotation religieuse dans des œuvres permettant d’espérer le retour à la paix (A Prayer). Elle dépasse aussi le sentiment religieux pour s’inscrire dans l’histoire et l’unité nationale comme dans L’Ode à la France de Debussy ou Les Cathédrales de Pierné, une fois exprimé un véhément Cri de Guerre.
Delphine Guévar, soprano
Flore Merlin, piano
Benjamin Carré, piano
Luca Montebugnoli, piano
Boché Kaëlig, ténor
Florence Mestais, récitante
Choeur Fiat Cantus, choeur
Thomas Tacquet, direction
Flore Merlin, piano
Benjamin Carré, piano
Luca Montebugnoli, piano
Boché Kaëlig, ténor
Florence Mestais, récitante
Choeur Fiat Cantus, choeur
Thomas Tacquet, direction
Les Musiciens et la Grande Guerre, disque 32 | ||
Claude Debussy (1862-1918) | ||
1. | Ode à la France op. L. 141 | 12'53 |
2. | Noël des enfants qui n'ont plus de maison | 2'35 |
Gabriel Pierné (1863-1937) | ||
Les cathédrales | ||
3. | Prélude | 9'29 |
4. | Chanson picarde | 1'54 |
5. | Chœur alsacien | 1'05 |
6. | Reims | 4'12 |
7. | Épisode des Églises | 3'30 |
8. | Épisode des Flandres | 1'50 |
Franck Bridge (1879-1949) | ||
9. | A Prayer op. 140 | 18'21 |
Transcription pour choeur et piano | ||
Transcription : Frank Bridge | ||
Jacques de La Presle (1888-1969) | ||
10. | Cri de Guerre de la 6e division d’infanterie |