lundi, juin 04, 2018

BABYLONIEN


Enregistrement 24/5/2018, passage, semaine 4/6-9/18
RADIO DIALOGUE RCF (Marseille : 89.9 FM, Aubagne ; Aix-Étang de Berre : 101.9)
« LE BLOG-NOTE DE BENITO » N° 319
lundi : 18h45 ; mercredi : 20 h ; samedi : 17h30
Semaine 23

         L’Opéra de Toulon  a présenté le dimanche 3 juin  une remarquable production de Nabucco de Verdi (livret de Temistocle Solera) venue de Saint-Étienne. Il reste encore quelques jours pour la voir : le mardi 5 et le vendredi 8 juin à 20 heures. Avant de la détailler, en voici les lignes directrices.
Nabuchodonosor II, régna à Babylone, entre 604 et 562  avant J.C. C’est le roi bâtisseur des fameux jardins suspendus de Babylone, l’une des sept merveilles du monde de l’Antiquité. Il est immortalisé dans la Bible, par le Livre de Daniel. Son prestige demeure si grand que Saddam Hussein se considérait lui-même comme un successeur, héritier de la grandeur de Nabuchodonosor et avait placé l'inscription « Du roi Nabuchodonosor dans le règne de Saddam Hussein » sur les briques des murs de l'ancienne cité de Babylone (près de la Bagdad d’aujourd’hui) qu’il rêvait de reconstruire : tant de ruines dans cette Syrie d’aujourd’hui, Assyrie d'hier…
         Selon la Bible, vainqueur des Juifs, Nabuchodonosor les amena captifs à Babylone, mais, précise le livre sacré, « Daniel, Ananias et Misael, qui étaient de race royale, le roi de Babylone les fit élever à sa cour dans la langue et les sciences des Chaldéens, afin qu'ils pussent servir dans le palais. » On voit que ce monarque traite bien certains de ses captifs. Daniel, qui le raconte lui-même dans ce livre biblique, gagne la confiance de Nabuchodonosor, il devient pratiquement son conseiller : un jour, au réveil, il lui explique le songe qui l’épouvante, une fameuse statue immense, d’or, d’argent, d’airain, mais aux pieds d’argile qu’une petite pierre tombée de la montagne, réduit en poudre. D’où l’expression « un colosse aux pieds d’argile» pour dire une force apparente.
            Le roi conquérant, maître du monde, dans sa superbe ville de Babylone, près de laquelle déjà fut érigée, aux origines, la présomptueuse tour de Babel qui prétendait escalader le Ciel, méprisant la leçon de son rêve sur la statue colossale aux pieds d’argile, se fait construire une immense statue d’or, toujours selon Daniel, et défiant Dieu, se déifiant lui-même, il demande à être adoré comme seul dieu.
Ce Nabuchodonosor biblique, qui finit par reconnaître la grandeur du Dieu des Hébreux, était le thème bien connu de pièces sacrées et d’oratorios baroques. Pour un Verdi malheureux, frappé jusque-là par l’échec jusque-là et un terrible deuil familial, la perte de femme et enfants, c’est le premier succès, prémices des chefs-d’œuvre à venir :  Nabuchodonosor, à l’origine, est raccourci en Nabucco, créé en 1842 à la Scala de Milan.
Cette histoire antique est fondée sur le conflit, hélas toujours actuel entre Israël et les peuples voisins, en l’occurrence, ici, les  puissants Chaldéens et leur monarque Nabuchodonosor, qui prend d’assaut Jérusalem, et déporte à Babylone les Juifs : une déportation, déjà… Épisode biblique très romancé par une invraisemblable histoire amoureuse entre la fille de Nabucco, Fenena, otage des Hébreux et amoureuse de l’un d’eux, Ismaele, connu, symétrie forcée oblige, quand il était, lui, prisonnier à la cour de Babylone : en somme, une version  nouvelle, intercommunautaire et raciale de Pyrame et Thisbé, tragiques amants babyloniens, anticipation de Roméo et Juliette.
S’ajoute la passion frustrée pour le même bel Hébreux d’Abigaïlle, demi-sœur et rivale de Fenena. Par ailleurs, ambitieuse concurrente de son soi-disant père Nabucco, auquel elle ravit le trône, alors qu’elle n’est qu’une esclave. Nous l’écoutons exprimer sa soif de pouvoir, de vengeance mais aussi la nostalgie de son amour, par la voix de Renata Scotto dans l’enregistrement de Riccardo Muti dirigeant le Philharmonic  Opera et l’Ambrosian Opera chorus :
1) DISQUE I, Plage 15
Abigaïlle, ambitieuse pratiquement jusqu’au régicide, au parricide, au déicide, puisqu’elle détrône en Nabucco son roi, son père et un dieu tel qu’il s’est décrété.
Nabucco, revenu de sa folie dans sa prison, regrettant le décret que lui a extorqué Abigaïlle, condamnant tous les Juifs à mort, dont sa fille Fenena qui s’est convertie au judaïsme, supplie le Dieu d’Israël de l’aider, lui jurant même de reconstruire son temple qu’il avait détruit à Jérusalem.  Nous écoutons sa prière par Matteo Manuguerra :
2) DISQUE II, plage 14
Abigaïlle, consciente de ses crimes, se suicide en demandant pardon. Arraché à sa prison, Nabucco, béni par le grand prêtre d’Israël, libère les Hébreux. Dans cet opéra abondent les chœurs. C’est en effet le chœur, célèbre d’emblée, chanté par les Hébreux déportés et esclaves à Babylone, qui assura le succès de l’œuvre : « Va pensiero… », évoque tendrement et doucement, avec une poignante nostalgie, le pays lointain et perdu (« Ô, ma Patrie, si belle… »). Il devint vite l’hymne national et révolutionnaire d’une Italie pas encore unifiée, sous la coupe autrichienne : VIVA VERDI ! écrivaient sur les murs les Milanais insurgés contre l’Autriche. Il fallait comprendre, avec les majuscules seules en abrégé, comme « Viva Vittore Emmanuelle Re DItalia », le monarque qui fera l’unité italienne. Magnifique publicité pour le musicien patriote. Spontanément, les milliers d’Italiens suivant le cortège mortuaire de Verdi en 1901 entonnèrent ce chant devenu une sorte d’hymne national, sinon officiel, du cœur. Nous l’écoutons :

3) DISQUE II, PLAGE 10

Opéra de Toulon  dimanche 3 juin 14h30, 5 et le vendredi 8 juin à 20 h, l’opéra Nabucco de Verdi.
operadetoulon.fr

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