PORTRAIT D’INVA MULA,
SOPRANO
Nous l’avions déjà
applaudie à l’Opéra de Marseille à en 1999 dans le Falstaff de Verdi et, en 2000, dans l’Atlantide du Marseillais Henri Tomasi, aux côtés du
Marseillais Luca Lombardo. Nous venons de l’admirer chez nous dans sa prise de
rôle, la Desdemona d’Otello de
Verdi.
Partie de son Albanie natale pour une carrière internationale, la
soprano Inva Mula court le monde, de scène en scène prestigieuse mais nous
offre régulièrement la chance de la voir et de l’entendre dans notre région
puisqu’elle est une familière de l’Opéra d’Avignon et des Chorégies d’Orange.
Et il faut la voir et l’entendre pour le croire : cette délicate et petite
personne, une sorte de petit Tanagra, ces adorables statuettes grecques de
jeunes et jolies femmes fragiles et graciles, au pied du mur, au pied du mur
colossal du théâtre antique d’Orange, oui, il faut l’entendre emplir de la
douce rondeur de sa voix, sans forcer et sans rien perdre de sa délicatesse, le
demi-cercle de pierre grandiose de cet amphithéâtre de plein air à l’échelle
des titans. Miracle de la technique vocale qui défie les grands espaces, même
les vents contraires, pour nous apporter le bienfait apaisant de la brise de la
musique, du souffle du chant.
L’an dernier, à
Orange, lors de la Fête des musiques de
juin, elle fit encore l’admiration de tous car, à peine accouchée d’une petite
fille, elle était là pour fêter la musique et le public de sa blonde voix de
miel. Après le spectacle, on la retrouvait souriante, rayonnante, le panier
berceau de son enfant à la main, pour discuter aimablement avec ses
admirateurs.
Je la retrouve dans le foyer de l’Opéra
de Marseille pour les auditeurs de Radio Dialogue, et je retrouve encore le
charme de cette présence, de cette petite princesse de porcelaine, blonde aux
yeux bleus, souriante, modeste, qui n’accepte de s’avouer diva que sur scène et
dévoile, suavement, qu’elle est aussi maman aimante d’un jeune adolescent. Car
même les déesses éternelles de l’opéra ont des rêves éternels de femme simple :
une famille et des enfants à aimer. Elle, qui vole de succès en succès sait
lucidement les caprices du destin et les fins de carrière de certaines reines
de la scène à laquelle elles ont tout sacrifié, qui connaissent dramatiquement
l’éclipse du succès et l’échec d’une vie sans foyer, sans famille, sans
enfants. Un jour, taraudée du remords d’être une mère trop absente de la maison
pour suivre pas à pas la scolarité de son garçon, elle lui demanda s’il ne
préférait pas qu’elle abandonne ses tournées pour rester attentivement auprès
de lui. Fort heureusement pour nous,
ce jeune garçon, ce fils aimant, lui déclara fort généreusement qu’il
préférait que sa maman fût une star. Il faut dire que lui aussi se rêve
musicien. Digne tradition dans cette digne famille, l’époux de notre soprano
est Pirro Tchako, chanteur et
compositeur albanais aussi. Mais Inva n’exclut pas de tout abandonner un jour
pour s’occuper de sa toute petite Nina dont le berceau n’est pas très loin de
nous.
Écoutons-la, savourons la beauté si tendre de cette voix mœlleuse ne serait-ce que dans un extrait de Gianni
Schicchi de Puccini, dirigée par Ivo
Lipanoviç à la tête de
l’Orchestre Philharmonique de Zagreb, dans l'un de ses disque qui s’appelle Il bel
sogno , ‘le Beau rêve’, référence à un
air de la Rondine de Puccini.
Ici, c’est dans le rôle de Lauretta, dont l’air commence par « O mio babbino caro… » , ‘Ô,
mon cher papa’.
‘O, mon cher papa’… Rien ne pouvait mieux convenir à Inva dont le prénom même est un palindrome, c’est-à-dire un mot qu’on peut lire indifféremment de droite à gauche et inversement, comme Roma/Amor , baptisée en palindrome du prénom de son père : AVNI, qui a donné INVA, prénom qui est donc unique ! Et non seulement à cause de cela « O mio babbino caro… » : son père était un prestigieux baryton albanais, très populaire, ayant reçu la décoration suprême d’ « Honneur de la Nation ». Inva vient d’ailleurs de se voir décerné ce même titre que reçut Avni à l’occasion du grand concert qu’elle a organisé pour les cent ans de l’indépendance de l’Albanie, gagnée sur les Ottomans en 1912.
‘O, mon cher papa’… Rien ne pouvait mieux convenir à Inva dont le prénom même est un palindrome, c’est-à-dire un mot qu’on peut lire indifféremment de droite à gauche et inversement, comme Roma/Amor , baptisée en palindrome du prénom de son père : AVNI, qui a donné INVA, prénom qui est donc unique ! Et non seulement à cause de cela « O mio babbino caro… » : son père était un prestigieux baryton albanais, très populaire, ayant reçu la décoration suprême d’ « Honneur de la Nation ». Inva vient d’ailleurs de se voir décerné ce même titre que reçut Avni à l’occasion du grand concert qu’elle a organisé pour les cent ans de l’indépendance de l’Albanie, gagnée sur les Ottomans en 1912.
L’Albanie c’est ce
petit pays balkanique, « Pays des aigles » (qui nous envoie ce
rossignol), face à la botte italienne, entre la Grèce au sud, le Monténégro au nord
et le Kosovo et la Macédoine à l’est. Inva Mula naît à Tirana dans une famille
de musiciens et chanteurs puisque son père épouse une grande soprano russe,
Nina, (d’où le nom de sa petite fille), et ce couple lyrique est à l’origine,
en 1955, de ouverture de l’Opéra d’Albanie, y important et imposant le grand
répertoire. De sa mère, qui fut son professeur, Inva a hérité la technique et
la discipline rigoureuse de tous les jours pour cultiver sa voix. La mort de sa mère il y a deux ans,
bien que russe, eut les honneurs de funérailles pratiquement nationales tant
elle était appréciée en Albanie, non seulement pour ses qualités d’artiste mais
aussi humaines, puisque la maison de ces chanteurs était ouverte aux plus
nécessiteux aux heures sombres de la dictature.
Toute petite, étudiant
le piano comme sa sœur, Inva chantait toujours, si bien que son père se mit à
lui composer des chansons. Le résultat fut que la petite Inva, à dix ans, était
une star que les enfants reconnaissaient dans la rue, éclipsant la gloire
populaire de son père qui s’en émerveillait.
Très vite, la jeune Inva vole de ses propres ailes
comme soliste, accumule les lauriers de concours internationaux dont le fameux Operalia
de Plácido Domingo, le célébrissime ténor espagnol, ce qui lui vaut une
magnifique tournée internationale avec lui et, j’en témoigne, une maîtrise
parfaite de la langue espagnole : elle chante et l’Espagne l’accueille à
bras ouverts, de Madrid à Barcelone tant dans ses rôles d’opéra que des airs de
zarzuelas et des mélodies espagnoles. Mais, en France, à l’Opéra Bastille, elle
semble chez elle tout comme dans les plus fameuses scènes lyriques du monde, de
la Scala au Met en passant par le Covent Garden de Londres.
Inva Mula, aussi bonne
chanteuse que parfaite comédienne, a exploré avec succès tous les grands rôles
de soprano du grand répertoire lyrique italien et français notamment, de Manon,
à Micaëla, en passant par Marguerite, Gilda, Traviata, etc, sans parler de ses
concerts ouverts sur d’autres répertoires. Elle a aussi été l'interprète vocale
de Lucia di Lammermoor, chantée par la
diva Plava Laguna dans le Cinquième élément, le film de Luc Besson. Nombre de disques témoignent
de son talent, dont un de mélodies de Liszt et d’Obradors, compositeur espagnol
qui mérite d’être mieux connu en France. Nous la quittons à regret et l'on garde en mémoire un
dernier extrait de son disque des répertoires français
et italiens, Il Bel Sogno, chez Virgin Classics. Elle est Mimi, de la Bohème de Puccini, qui dit « Adieu, sans
rancœur… » et nous, nous lui disons, « Au revoir, de tout
cœur ».
Photos inva-mula©berisha.jp
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