LE CID DE MASSENET À L’OPÉRA DE MARSEILLE
(I)
LE CID*
Événement lyrique à Marseille, en France et dans quarante pays, le Cid de Massenet.
Le livret est tiré de la pièce de Corneille de 1636. Qui la tire des deux pièces du dramaturge espagnol Guillén de Castro, Las Mocedades del Cid (1618) qui les tire du romancero, qui le tire de la chanson de geste El cantar de myo Cid du XII e siècle (vers 1140) qui narre les exploits de ce héros historique, national, épique de l’Espagne du XIe siècle. Remontons donc à la source. Qui était le Cid ?
LE CID
Un vrai personnage historique dont témoignent les chroniques chrétiennes et arabes dans cette Espagne médiévale où les royaumes chrétiens du nord ne cessent de repousser et de grignoter, conquérir, les principautés musulmanes, les taïfas, très opulentes mais affaiblies, durant cette longue croisade qu’on appelle la Reconquista, la reconquête.
Celui que les maures d’Espagne qu’il combat appelleront le Cid, Sidi), ‘seigneur’ pour sa noblesse et sa magnanimité en signe de respect, s’appelle Ruy Díaz de Bivar (Ruy est le prénom Rodrigo abrégé devant les noms toujours à rallonge, Ruy Blas, de V. Hugo, c’est aussi Rodrigo Blas). Il naît près de Burgos, dans la Vieille Castille (1030/1040-1099). Il est infanzón, c’est-à-dire de petite noblesse, mais comme souvent tout petit nobliau, il est envoyé à la cour où il s’élève avec les infants, les fils du roi, pour y servir probablement de page avant d’être écuyer et, finalement, être armé chevalier.
Campeador
Pour sa force et sa bravoure, il deviendra la champion du roi de Castille, c’est-à-dire celui qui le représentait dans des combats singuliers contre un autre champion d’un autre monarque, ce qui permettait de régler un conflit par un duel à outrance, à mort, entre deux hommes lieu d’une coûteuse guerre ouverte entre deux armées. Cela lui vaudra le nom de Campeador, celui qui triomphe sur le champ de bataille.
Cantar de mío Cid
Un siècle après sa mort il est le héros déjà légendaire d’une célèbre chanson de geste, La chanson du Cid, dont la première partie, celle traitant de sa jeunesse est perdue. La seconde commençant par son exil de Castille.
À la différence de la française Chanson de Roland, où le héros, blessé à mort à Roncevaux, soufflant dans son olifant pour prévenir Charlemagne, parvient encore à tuer des milliers de maures, loin de cette exagération épique, la geste espagnole du Cid est réaliste, concrète, proche de la vérité historique. On a pu vérifier historiquement l’itinéraire parcouru par le Cid et ses conquêtes. Il est célébré, pour sa droiture, sa générosité et, dans cette chanson de geste, il manifeste trois grandes qualités qu’on lui reconnaît : il est le bon vassal, fidèle même à son injuste et ingrat suzerain (il fera pour lui la conquête de Valence bien qu’il l’ait exilé), il est bon mari (il respecte et protège Chimène) et bon père : il aime ses deux filles, Doña Elvira et Doña Sol.
Il les mariera à deux infants détestables, qui pour l’humilier car il est moins noble qu’eux, dénudent leurs femmes, les fouettent, les attachent à un arbre et les abandonnent en pleine steppe castillane. On imagine le Cid, au sommet de sa gloire, avide de vengeance, poursuivant ses gendres vils et lâches. Non, il est légaliste et ne requiert pas le sang mais la justice du roi devant lequel il porte plainte. Les infants infâmes seront châtiés, mais non par lui. Le Cid épique est un grand héros qui a quelque chose de bourgeois dans sa modération.
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