L’HEURE DU THÉ DE MAI
Opéra de Marseille
Une étoile est née
Une autre dirait-on, de la jolie constellation que le CNIPAL, le Centre National d’Insertion Professionnelle d’Artistes Lyriques de Marseille a déjà mis en orbite dans le monde de l’opéra : le Coréen Ji Hyun Kim, qui sortira de cette solide école pour rejoindre les prestiges de Covent Garden où tel autre de ses condisciples l’a précédé l’an dernier. On déjà eu l’occasion de dire les mérites de ce jeune ténor non seulement doté d’une belle voix lumineuse, souple, égale sur toute sa tessiture, mais doué d’une capacité émotionnelle rare, directe et sensible sans rien forcer, avec un naturel absolu. Il faisait ses adieux à ce public qui l’adore dans un programme de zarzuelas très vocales et, en seconde partie, d’extraits de comédies américaines et, avec le même bonheur , il passe des unes aux autres, d’un accent à l’autre sans problème, bouleversant Tony de simplicité poétique dans West side story de Berstein.
Il est vrai qu’il ne pouvait qu’être inspiré par sa jolie partenaire en Marie, Erminie Blondel, sourire rayonnant, soprano franco-américaine au timbre satiné, semblant être chez elle dans cet univers de Broadway, sachant plier sa voix lyrique aux rêves et aveux murmurés de The man I love de Gershwin, avec ce qu’il faut d’abandon langoureux, de nostalgique sensualité. À un petit « serrage » près dans l’attaque des redoutables gruppetti de l’air « De España vengo » du Niño judío de Pablo Luna, vite rattrapés, elle se montra également fort à l’aise dans les zarzuelas, affrontant vaillamment, malgré un trac sensible, les terribles pièges techniques de la musique vocale espagnole, agrémentés agressivement d’une vocalité rossinienne parodique dans la cadence du fandango « Me llaman la primorosa » du Barbero de Sevilla de Gerónimo Giménez y Bellido.
Troisième comparse, et nouveau aussi comme la soprano, le baryton Benjamin Colin a la chance d’une voix solide, pleine, très personnelle par le timbre, assortie à un physique à la gouaille sympathique, avec quelque chose de picaresque qui convient en couleur à la musique espagnole. Il se tire fort bien des roulades à pleine voix de ce style pas tellement aisé, qui ne permet pas la tricherie. Il accompagne plaisamment d’une peu hispanique mandoline sa jota du Guitarrico, la petite guitare, d’Agustín Pérez Soriano. La comédie américaine semble tout aussi bien convenir à son genre de personnage et de voix
Bref, on aura autant de plaisir et de curiosité à entendre les deux nouveaux qui restent que de regrets pour celui qui part mais que nos vœux accompagnent. Mais cette dernière Heure du thé de la saison, savourée avec plaisir, n’eût pas été complète sans la pièce que Nino Pavlenichvili, accompagnatrice attentive, offrit, l’Hommage à Albéniz de Rodion Shchedrin, ou plutôt, Chtchedrine, compositeur russe (1932), époux de la célèbre danseuse Maïa Plissetskaïa, œuvre dans l’humeur et l’humour du complexe compositeur espagnol mais hérissée de rythmes brisés, de grappes terribles de notes, dont la pianiste slave se tira avec une aisance toute hispanique.
M’aimez-vous bien, le prochain spectacle de la promotion Villazón en représentation à l’Opéra-Théâtre d’Avignon le 4 juin 2010, le sera au Théâtre de Mérignac le 22 et à l’Opéra de Marseille le 25 juin 2010.
L’Heure du thé
Opéra de Marseille, 20 et 21 mai, récital repris à L’Heure exquise de l’opéra de Toulon le 27 et à L’Aper’Opéra d’Avignon le 29 mai.
Photos :
1. Blondel;
2. Kim;
3. Colin;
4. Pavlenichvili.
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