vendredi, mars 09, 2007

Disques

SÉLECTION DE CD


BEETHOVEN : Concert pour violon et orchestre ; les 2 romances.
Régis Pasquier, violon. Baltic Chamber Orchestra, direction Emmanuel Leducq-Barôme. Disque Calliope.
Si toute la musique de Mozart disparaissait, ce serait, certes, un cataclysme culturel, le monde serait plus sombre : la musique serait à jamais mutilée. Mais cela ne changerait rien à l’histoire de la musique. En effet Mozart s’est plié à toutes les conventions de son temps, n’a pratiquement pas innové : mais son génie a sublimé tous les genres canoniques qu’il a touchés, les a tous dépassés en sorte que, malgré la profusion musicale de son temps, le nombre de grands musiciens qui l’entoure, à les entendre et à l’écouter, on a le sentiment qu’il y a Mozart et les autres. Un autre génie de la musique, Haydn, ne s’y trompait qui disait à Léopold Mozart, le père, : « Ton fils nous dépassera tous. » Il en va autrement avec Beethoven : admirateur de Mozart, bien sûr, s’il part souvent de lui, des mêmes cadres formels, il dépasse aussi tous les genres, mais en les brisant, en les transformant, au grand désarroi des auditeurs de son époque, en créant, par sa révolte contre les moules étriqués, une révolution qui ouvre, dès le début du XIX e siècle, toute la musique de l’avenir.
C’est ce que vient nous rappeler opportunément le grand violoniste Régis Pasquier, couvert de lauriers, de récompenses. Ce Concert pour violon et orchestre, ébauché entre 1790-1792, part donc d’une esthétique encore mozartienne, sensible dans sa claire architecture. Mais, achevé en 1806, on a déjà tout le devenir orchestral beethovénien, entre douceur et violence, impatience de secouer les carcans des habitudes d’écoute. Beauté chaleureuse du thème, passion des élans orchestraux, tout cela est rendu avec bonheur dans ce disque dans la lumineuse clarté des plans dessinés par le chef, par le ciselé amoureux de la ligne du violon, l’ivresse virtuose des cadences, et cet impétueux et généreux essor musical jamais débordé par un inutile pathos.
Les deux romances pour violon, solaires et sereines, font du violon une voix humaine auréolée de la grâce d’un effectif orchestral plus léger : léger drapé sur le charme rêveur d’une diva, le violon.

LA NAISSANCE D’OSIRIS. Jean-Philippe Rameau. La Simphonie du Marais, direction Hugo Reyne. Éditions : Musiques à la Chabotterie.
Avec ce nom de conte de fées, la Chabotterie, (chat botté ?) avec son Festival qui en est à fêter ses 10 ans, créée son propre label discographique, heureuse initiative qui nous permet de goûter, sur le vif, sinon sur le vivant de notre absence, les moments féeriques de ce magique lieu, ce château où la musique a trouvé son cadre enchanteur. En tous les cas, on ne se plaindra pas de voir et d’entendre inaugurer avec Rameau une série de disques, tant la richesse de ce compositeur cartésien et philosophe demeure encore largement méconnue. Par la volonté d’H. Reyne, qui dirige La Simphonie [sic] du Marais, augmentée des remarquables Solistes et du chœur du Marais, voici donc le premier numéro d’une collection vouée à Rameau, compositeur des Lumières. Il s’agit ici d’une œuvre reconstituée musicologiquement dans son intégrité par Reyne, restituant des scènes omises lors de la création, à l’occasion de la naissance de Louis XVI, en 1754, de La Naissance d’Osiris. Sur un livret de Cahusac, encyclopédiste, spécialiste de danse et plusieurs fois collaborateur de Rameau, il s’agit d’un ballet allégorique dans le goût déjà égyptien du temps et on pense à l’invocation à Isis et Osiris du Sarastro franc-maçon de La Flûte enchantée. Mais, à connaître le sort de ce dieu, découpé en morceaux (même s’il est reconstitué par sa sœur Isis), on ne peut s’empêcher à la coupure fatale du cou du futur roi dont cette légende célèbre la naissance. Quoiqu’il en soit, nous avons ici tout le charme élégant et un peu fou de Rameau dans cette bergerie, ces tambourins, ces musettes, ces airs tendres ou exaltés, enguirlandés et fleuris de vocalises voluptueuses par le timbre fruité de Stéphanie Révidat, entourée de la brillante phalange vocale des Solistes du Marais. Après les heureuses prémices de ce régal gourmand, on attend impatiemment la suite.

Benito Pelegrín

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire