samedi, octobre 28, 2006

WAGNER BLOND ET NOIR (Opéra de Marseille)

Rentrée symphonique et lyrique à Marseille, un concert Wagner, prélude automnal au programme wagnérien printanier, « la Walkyrie ». Solennité particulière, notre scène marseillaise recevait pour la première fois, non pour chanter car elle ne fut impardonnablement jamais invitée chez nous mais pour un juste mais tardif hommage, la grande Christa Ludwig désormais retirée de l’opéra, ayant cependant offert son expérience aux stagiaires du CNIPAL. Cérémonie sous les auspices des Cercles wagnériens et le patronage de la Ville, qui remettait sa médaille à cette grande dame du chant, émue de l’accueil, elle qui nous a offert tant de belles émotions. L’Orchestre philharmonique de Marseille, à son meilleur, fut transcendée par un chef d’exception, le Danois Michael Schonwandt, aussi minutieux et fouillé dans les détails, les couleurs instrumentales, qu’impétueux mais limpide dans les ensembles fracassants de l’orchestre, étageant les plans et conduisant les crescendi avec une rare maîtrise. D’entrée, l’ouverture de Tannhäuseur manifestait ces qualités : douceur des cuivres, transparence impalpable des cordes, atmosphère rêveuse de légende, comme une auréole de saint de tableau médiéval, avant le tourbillon voluptueux du « Vénusberg ». Même finesse impondérable des attaques, nimbées de nostalgie, même irrésistibles montées de houle passionnelle dans le Prélude de Tristan, adoucissement des couleurs sans dissoudre la ligne dans Parsifal et le chaos si construit du Götterdammerung : un Wagner délivré des pesanteurs néo-romantiques et bismarckiennes, rendu à sa finesse originelle.Eva Johansson, Danoise aussi, blonde, yeux bleus et de bleu vêtue, est, physiquement et vocalement une héroïne wagnérienne, peut-être déjà trop héroïque pour la douceur virginale d’Élisabeth, mais sa voix d’airain, d’acier trempé, donna corps et âme à son Isolde très intériorisée, déjà ailleurs, dans un autre monde, drapée d’abord de vent dans la tempête musicale, fondue merveilleusement dans les flots de l’orchestre, déjà mythique et tendrement et follement sacrificielle dans la dernière et grandiose scène du Crépuscule des Dieux et de l’aube des hommes.
9 septembre 06

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