mercredi, mai 15, 2019

UN KARAOKÉ AU SUBLIME NIVEAU




Enregistrement 2/5/2019

RADIO DIALOGUE RCF

(Marseille : 89.9 FM, Aubagne ; Aix-Étang de Berre : 101.9)

N° 371, semaine 18


TOURNE-DISQUE



AMADEUS par le quatuor féminin Zaïde

La Flûte enchantée par le Quatuor à cordes Zaïde K. 620, label NoMadMusic


Voici un disque dont on dira, sans doute un peu facilement, mais justement, qu’il chante. Et qui nous fait chanter de bonheur
 Et pourtant, cette version de La Flûte enchantée, n’est pas chantée. Elle est simplement —mais peut-on dire « simplement » quand c’est du Mozart, même quand il fond l’expression la plus simple à la plus savante comme dans cet opéra œuvre ? Oui, simplement musicale. Et peut-on encore parle de simplicité, sinon souveraine, de cette étrange version musicale, relevée de variations magnifiques, par le brillant quatuor à cordes féminin, Zaïde ?  Ce joli quadrille féminin s’est donné le nom, déjà programmatique, d’un opéra de jeunesse de Mozart.  Écoutez :



1) PLAGE 3 



         Vous avez sans doute reconnu l’air populaire, la chansonnette de Papageno. Oui, répétons, la simplicité souveraine, suprême élégance de Mozart. Cette partition, une transcription inédite de l’opéra, date de 1801, pratiquement contemporaine de Mozart, mort dix ans avant. Elle est d’une remarquable fidélité, avec les nécessaires transcriptions des cordes vocales, aux cordes frottées des instruments. Mystère de la gestation. Dix ans après la première en 1791, la Flûte , mort le compositeur, résonne donc encore, ce qui est exceptionnel en son temps, et dans une version qui la diffuse, comme œuvre infuse déjà dans la mémoire musicale de son temps. Miracle d’un succès continu, que Mozart n’aura pas connu, de son ultime opéra.

         On avance amoureusement dans cette œuvre, en pays ami où l’on reconnaît le paysage humain qui nous parle sans mot dire, pure émotion de les retrouver tous, à l’exception que l’on regrettera, de l’adorable Papagena : pages perdues ? Car, jusque-là, on suit parfaitement la trame de l’opéra, l’épopée sentimentale de tous les personnages.  

Cette version a été retrouvée chez un antiquaire, et le Quatuor Zaïde fête ses dix ans avec cet enregistrement inédit sur cette partition qu’on rêve, rétrospectivement maintenant aussi, comme un dixième anniversaire de la création, hommage à Mozart mort, hélas.

Mais revenons à cette année 1791, fatale et merveilleuse par la mort du compositeur et son testament immortel : Mozart végète, malade et sans travail.

Mozart est franc-maçon ; son frère en maçonnerie Emanuel Schikaneder, directeur d’un théâtre de quartier, lui avait soumis un livret qu’il avait écrit pour des acteurs chanteurs plus que de grands chanteurs, lui-même étant un amateur, d’où le rôle simple vocalement simple (mais quelle sublime simplicité encore !) de Papageno qui lui écrit Mozart. C’est donc une féerie inspirée de contes orientaux à la mode alors, ouvrage naïf et populaire qui n’enchante d’abord pas Mozart.



         La thématique maçonnique est bien connue : le thème trinitaire, le mi bémol majeur avec ses trois bémols à la clé, ses trois accords de l’ouverture, les trois Dames, les trois Garçons, ; les trois épreuves des deux héros Tamino et Pamina dans le Temple de Sarastro sont empruntées au rituel d'initiation de la franc-maçonnerie : c’est le parcours de l’ombre (La Reine de la Nuit) à la lumière, vers le Bien.  Il y a aussi un serpent, le méchant Monostatos pour les forces du mal et, entre Bien et Mal, les bien terriens Papageno et Papagena.

Bref, au seuil de la mort, c’est l’enfant Mozart qui remonte, s’exprime, dans l’enchantement d’une musique sublime et populaire : elle s’adresse au plus haut et au plus simple de l’homme. Et de la femme, cela va sans dire ! que dire ici puisque nous devons cette version de La Flûte enchantée, au quatuor à cordes féminin. Voici d’ailleurs leur approche de la Reine de la Nuit, les terribles accents meurtriers de ses imprécations sur les stries d’éclairs des cordes aiguës :



2) PLAGE 14 :



On va lui opposer aussitôt la noblesse du sage Sarastro qui fait frémir les cordes graves :



3) PLAGE 11 



Mais il faut entendre aussi la joie dansante du Prince Tamino jouant de la flûte enchantée qui lui a été confiée :



4) PLAGE  



Et comment n’être pas ému au désir de suicide de Pamina  se croyant abandonnée? « Ach, ich fülh’s, es ist verschwunden… », ce lamento descendant dans la gamme du désespoir ?



5) PLAGE 17 



Ce beau disque, est complété par un quatuor à cordes de Mozart dédié à Haydn, le numéro 14, K 387. Par ailleurs, il est agrémenté d’un joli abécédaire mozartien : de À à Z, des thèmes explicatifs en rapport avec le compositeur. On ne le quittera pas sur le thème de la mort de Pamina mais sur celui de la vie, exprimé encore par Papageno rêvant d’une petite femme, rêvant tous deux d’une couvée sans fin d’enfants :



6) PLAGE 19 



On admire vraiment le musicien inconnu qui a fait de cette chanson touchante, par ses variations, une œuvre virtuose, originale. Œuvre de qualité, servie avec bonheur, pour le nôtre.


AMADEUS par le quatuor féminin Zaïde Charlotte Maclet (premier violon), Leslie Boulin Raulet (deuxième violon), Juliette Salmona (violoncelle) et Sarah Chenaf (alto). La Flûte enchantée et le Quatuor à cordes K. 620, label NoMadMusic

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