vendredi, juin 30, 2017
lundi, juin 19, 2017
MUSIQUE ANCIENNE DANS UNE VIEILLE ABBAYE TOUJOURS NEUVE
Les Rencontres Internationales du Thoronet
Académie & concerts de musique ancienne
20 au 28 juillet 2017 - Abbaye du Thoronet
Var
27e édition
Lieu magique à l’acoustique exceptionnelle, la prestigieuse nef de l’abbaye cistercienne du Thoronet est l’écrin de l’un des plus grands festivals européens de musique ancienne : les Rencontres Internationales du Thoronet, dans le Var. Pour cette 27ème édition des concerts seront également donnés sur l'ensemble du territoire à Saint-Raphaël, Brignoles et Cotignac. Le festival a reçu les ensembles prestigieux dans le domaine de la musique du Moyen-Age.
Si la musique du Moyen-âge reste la période centrale, les musiques traditionnelles - portes ouvertes sur le monde - sont toujours mises en regard de celle-ci, apportant d'intéressantes perspectives d'interprétation des répertoires anciens. Dorénavant, le festival s'ouvre également à des concerts portant sur la Renaissance et le début du17è siècle. Les Rencontres offrent ainsi au public une immersion dans le courant musical qui a pris sa source dans le chant grégorien, au 9è siècle, et qui a connu au cours de l'Histoire diverses évolutions stylistiques.
Dominique Vellard, directeur artistique du festival, réalise chaque année la programmation.
SOLISTES & CHOEURS DE L'ACADEMIE DE MUSIQUE ANCIENNE
« Les Vêpres de la Vierge » de Claudio Monteverdi
Jeudi 20 Juillet 21h - Saint-Raphaël
Vendredi 21 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
Samedi 22 Juillet - Brignole
Académie du 12 au 22 juillet 2017
ENSEMBLE RUMORUM
« Fair weder» - Musiques anglaises, 12è-14è siècles
Dimanche 23 Juillet 21h - Cotignac
MUSICA NOVA
« Descendi in ortum meum » - France & Angleterre, 15è s.
Lundi 24 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
LE MIROIR DE MUSIQUE
« Sulla lira » - la voix d'Orphée
Mercredi 26 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
Waed BOUHASSOUN, Kudsi ERGUNER
Pierre RIGOPOULOS
Répertoires traditionnels de Syrie et de Turquie
Jeudi 27 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
ENSEMBLE GILLES BINCHOIS
« Fons luminis » - Manuscrit du monastère Santa Maria la Real de Las Huelgas, 14è siècle
Vendredi 28 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
http://musique-medievale.fr/
Arielle Berthoud |Attachée de presse
Tél. : 00 33 (0)6 09 70 72 18
arielle.berthoud@noos.fr
Académie & concerts de musique ancienne
20 au 28 juillet 2017 - Abbaye du Thoronet
Var
27e édition
Lieu magique à l’acoustique exceptionnelle, la prestigieuse nef de l’abbaye cistercienne du Thoronet est l’écrin de l’un des plus grands festivals européens de musique ancienne : les Rencontres Internationales du Thoronet, dans le Var. Pour cette 27ème édition des concerts seront également donnés sur l'ensemble du territoire à Saint-Raphaël, Brignoles et Cotignac. Le festival a reçu les ensembles prestigieux dans le domaine de la musique du Moyen-Age.
Si la musique du Moyen-âge reste la période centrale, les musiques traditionnelles - portes ouvertes sur le monde - sont toujours mises en regard de celle-ci, apportant d'intéressantes perspectives d'interprétation des répertoires anciens. Dorénavant, le festival s'ouvre également à des concerts portant sur la Renaissance et le début du17è siècle. Les Rencontres offrent ainsi au public une immersion dans le courant musical qui a pris sa source dans le chant grégorien, au 9è siècle, et qui a connu au cours de l'Histoire diverses évolutions stylistiques.
Dominique Vellard, directeur artistique du festival, réalise chaque année la programmation.
SOLISTES & CHOEURS DE L'ACADEMIE DE MUSIQUE ANCIENNE
« Les Vêpres de la Vierge » de Claudio Monteverdi
Jeudi 20 Juillet 21h - Saint-Raphaël
Vendredi 21 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
Samedi 22 Juillet - Brignole
Académie du 12 au 22 juillet 2017
ENSEMBLE RUMORUM
« Fair weder» - Musiques anglaises, 12è-14è siècles
Dimanche 23 Juillet 21h - Cotignac
MUSICA NOVA
« Descendi in ortum meum » - France & Angleterre, 15è s.
Lundi 24 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
LE MIROIR DE MUSIQUE
« Sulla lira » - la voix d'Orphée
Mercredi 26 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
Waed BOUHASSOUN, Kudsi ERGUNER
Pierre RIGOPOULOS
Répertoires traditionnels de Syrie et de Turquie
Jeudi 27 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
ENSEMBLE GILLES BINCHOIS
« Fons luminis » - Manuscrit du monastère Santa Maria la Real de Las Huelgas, 14è siècle
Vendredi 28 Juillet 21h - Abbaye du Thoronet
http://musique-medievale.fr/
Arielle Berthoud |Attachée de presse
Tél. : 00 33 (0)6 09 70 72 18
arielle.berthoud@noos.fr
ORPHÉE FESTIF À MARSEILLE
Les Festes d’Orphée
Ensemble baroque
« Musiques patrimoniales de la Provence baroque » Direction : Guy Laurent
XXXe Anniversaire
« Musiques patrimoniales de la Provence baroque » Direction : Guy Laurent
XXXe Anniversaire
Vendredi 23 juin, 20h30
Temple, 15, rue Grignan 13006 Marseille
« Concert : Motets festifs à grand-chœur »
par le Grand-chœur & l’Ensemble instrumental des Festes d’Orphée
RENSEIGNEMENTS :
Les Festes d’Orphée
2, montée du château 13880 Velaux
04 42 99 37 11
www.orphee.org orphee@orphee.org
VENTE DES BILLETS :
45 minutes avant le début des concerts
Tous nos concerts (sauf les Mardis Musicaux) sont en vente sur le réseau FNAC, Carrefour, France Billet
08 93 68 36 22 / www.fnac.com
samedi, juin 17, 2017
MERCI RAYMOND, MERCI DUFFAUT : FAU(S)T
Il
a régné pendant trente-cinq sur les romaines Chorégies d’Orange dont il a fait
un empire indiscuté du chant, et en a démissionné dignement pour des raisons
politiques, disons, éthiques, avant terme, en mars 2016. En popularisant en ce lieu l’opéra, en le
popularisant par les médias, Duffaut a su incarner, pour des millions de
spectateurs, cet élitisme pour tous dont rêvait Malraux. Un élitisme
républicain d'une qualité à l'échelle du lieu, à tous niveaux : mises en
scène, lumières, et, surtout artistes, voix que son oreille infaillible a su
dénicher et porter aux nôtres pour leur permettre d'ici un envol primordial. Et
d’abord, par le banc d’essai de la scène d’Avignon. Car pendant quarante-trois ans, il a présidé aux
destinées artistiques de l’Opéra d’Avignon, devenu justement Grand Avignon, qu’il
a élevé en royaume lyrique tout aussi indiscutable, le dotant d’un orchestre, d’un
chœur et d’un ballet permanents, rare privilège aujourd’hui. Un bilan
extraordinaire : quatre-mille cinq-cents spectacles et quelque
quatre millions de spectateurs, heureux, reconnaissants. Qui le lui ont prouvé
par des ovations interminables lors de deux mémorables soirées.
D’abord,
la dernière de Faust qui, il n’y a
pas de hasard, selon son simple et touchant aveu, avait ouvert ses yeux et ses
oreilles d’enfant, en 1949, au monde lyrique et qui clôt, ce jour, sa longue
carrière militante en ce lieu. Puis, « Avant de quitter ces lieux », le concert exceptionnel,
cadeau surprise du 16 juin d’un nombre, innommable par la quantité, une cinquantaine
d’artistes, chefs, chanteurs lyriques, sans oublier les danseurs, qu’il a
lancés ou contribué à leur carrière internationale, qui ont tenu à venir lui
témoigner leur, disons-le, affection et fidélité. Un concert, organisé par
Nadine et Sophie Duffaut, présenté par Alain Duault, commencé à 18h30, terminé à
près de une heure du matin, et poursuivi ensuite avec un cocktail amical,
familial.
Raymond Duffaut reste Président du Centre français de promotion lyrique :
au service toujours des jeunes talents.
Ce Faust marque aussi la fermeture de l'Opéra Grand Avignon pour deux ans, pour travaux.
Ce Faust marque aussi la fermeture de l'Opéra Grand Avignon pour deux ans, pour travaux.
Sous l’égide de l’association des « Amis
du Théâtre Lyrique »
FAUST
(1859)
Opéra en cinq actes
Livret de Jules Barbier et
Michel Carré
d’après
Faust, eine Tragödie (1808)
de
Johann Wolfgang von Goethe
Musique de Charles Gounod
I.
L’œuvre
Diables d’hommes
Sur l’homme vendant son âme
au diable contre l’amour d’une jeune femme, l’Espagne connaissait déjà quelques
pièces de théâtre, El esclavo del demonio (1612), ‘L’esclave du démon’, de Mira de Amescua et, entre autres plus tardives, El mágico prodigioso, ‘La magicien prodigieux’ (1637)[1]
de Pedro Calderón de la Barca, inspirée de la légende des saints Cyprien
et Justine, martyrs d’Antioche, IIIe
siècle : pour l’amour de la jeune chrétienne, le jeune savant païen, qui
s’interrogeait sur le pouvoir absolu d’un Dieu unique contre la pluralité
dissolue du panthéon des dieux antiques, signe un pacte avec le Diable. C’est
aux écrivains allemands du Sturm und
Drang, dont Herder, Schiller et Goethe, férus de culture espagnole antidote
au classicisme français, que l’on doit le renouveau de l’intérêt pour la poésie
du Siècle d’Or espagnol (Goethe en adaptera des poèmes) et son théâtre, dont
s’abreuvera aussi Hugo.
Il est probable que Goethe y ait
puisé, pour sa fameuse tragédie, l’enjeu de la femme dans le pacte avec le
diable, absente dans le livre source, Historia
von Dr. Johann Fausten dem weitbeschreyten Zauberer und Schwarzkünstler…, couramment
appelé Faustbuch, ‘le Livre de
Faust’, paru à Francfort en 1587. Ce recueil populaire s’inspirait des légendes
ténébreuses entourant le réel Docteur Johann Georg Faust (1480-1540), alchimiste allemand, astrologue, astrologue, nécroman, c’est-à-dire magicien. Un musée lui est consacré à Knittlingen,
sa ville natale.
La science
rationnelle moderne, n’était pas encore sortie de la gangue des sciences
occultes dans lesquelles, astrologue et astronome confondus, dans les secrets
encore incompréhensibles, on voit souvent, par crainte et superstition, la
main, la griffe du diable. Ainsi, la mort du savant Docteur Faust en 1540, dans
une explosion due sans doute à ses recherches chimiques ou alchimiques, passera
pour le résultat de ses expériences diaboliques, du pacte qu’il aurait passé avec
le Diable, signé de son sang, pour retrouver la jeunesse sinon l’amour.[2]
Ce livre, qui sera aussi
traduit avec succès en français en 1598, sera adapté, d’après la traduction anglaise,
par Christopher Marlowe dans sa pièce La Tragique Histoire du docteur Faust (1604) et, donc, deux
siècle après, par Johann Wolfgang von Goethe dans son premier Faust (1808), qui fixera
dans l’imagerie romantique, la touchante figure de Marguerite au rouet :
séduite, enceinte, abandonnée, matricide, infanticide enfin : condamnée à mort, et
refusant d’être sauvée avec la complicité de Méphistophélès, pour le salut de
son âme. Son contemporain Gotthold Ephraim Lessing, avait aussi commencé, sans l’achever, une pièce sur
Faust en 1759.
Berlioz avait représenté à
Paris, sans guère de succès, en 1846, La Damnation de Faust [3]d’après
la célèbre pièce de Goethe traduite en 1828 par Gérard de Nerval :
« Pour la ‘Chanson du rat’, il n’y
avait pas un chat dans la salle », constatera cruellement Rossini. Ruiné,
Berlioz s’exile. Gounod sera plus heureux. Hanté par le thème, gratifié du bon
livret que lui écrivit Jules Barbier,
la contribution de Michel Carré, auteur d'un drame intitulé Faust et Marguerite, se limitant à l'air du Roi de Thulé et à la ronde du
veau d'or. Après des remaniements, l’opéra triompha en 1859, et rivalise en
popularité dans le monde avec la Carmen
de Bizet.
II. Réalisation
Faust sans
faste
Vaste demeure dévastée de l’hiver d’une vie à
vau-l’eau : vanité des vœux, des rêves du savoir, des souvenirs évanouis à
l’heure des bilans, des faillites. Vautré, avachi sur un immense prie-Dieu, un
lit, dont la traverse est une croix, le vieux Docteur Faust se lamente avant
d’être relayé par le jeune, vivifié par le pacte de sang ou transfusion sanguine
salvateur élixir de jouvence. Efficace scénographie unique d’Emmanuelle Favre dans des clair-obscur,
au sens précis du terme, mélange de lumière et d’ombre à la Rembrandt, virant
parfois aux contrastes rasants caravagesques (lumières de Philippe Grosperrin), qui arrachent à la pénombre les têtes
d’une foule de spectres goyesques, cauchemar plein de choses inconnues, funèbre
carnaval émergeant, surgissant des trappes, sinon des enfers, des arrière-fonds,
des bas-fonds de l’âme sans doute, comme un retour du refoulé. Surplombant la
scène, théâtre dans le théâtre, une autre scène ou tableau : un Christ de
profil et, apparaissant dans le cadre, divers personnages, le vieux Faust
omniprésent témoin de cet épisode de sa vie, Méphistophélès, Marguerite en
portrait.
Tout est terreux, ruineux,
grisâtre, brunâtre, les costumes (Gérard
Audier), et le seul éclat sera celui de Marguerite, toute blondeur et robe
vichy bleu à la Brigitte Bardot, apparemment seule vivante dans ce monde
fantomatique, escortée de Dame Marthe, rieuse en austère tailleur noir. Une
marionnette géante descendant des cintres de la manipulation diabolique
symbolise la jeune fille. Le Faust jeune, aura l’éclat d’une chemise blanche
sur ses jeans et Méphisto, en blouson de cuir, arbore des souliers rouges comme
signe de son origine, comme le coffre et non coffret des bijoux, dont on
s’étonne que Gretchen ne l’ait pas vu du premier coup d’œil tant il accapare
l’espace et la vue. Jolie trouvaille, le bracelet dont se pare la jeune fille
est vraiment « une main qui sur [son] bras se pose », surgie
magiquement de la marionnette. C’est la poupée mécanique, menaçante, de
l’univers fantastique des Contes romantiques d’Hoffmann par la
manipulation du Diable.
Des projections —pas
forcément heureuses— de fleurs sur les murs lépreux figurent le jardin et le
bouquet d’un jeune Siebel masculin éclopé, expliquant sans doute sa réforme, il
ne part pas à l’armée ; plus dramatiquement
parlantes, celles d’actualités cinématographiques de nébuleux soldats du retour
des troupes qui (dé)chanteront une gloire discutable des aïeux dont la mise en
scène de Nadine Duffaut, loin de
donner dans le cliché de la guerre jolie, montre la vérité, les blessés, les estropiés,
les gueules cassées, les morts : sous le regard du Christ semblant
regarder de biais et non de front le monde, sous l’écrasante croix, on
se pose inévitablement la question de ce « Dieu bon » que priera
Marguerite à la fin qui permet cet enfer sur terre, autorise finalement ce Démon tout puissant,
encore que terrassé parfois comme un vampire par l’ombre ou la lumière de la
croix qui le crucifie.
En somme, refusant le faste
facile, néfaste souvent au drame, la mise en scène propose une lecture nouvelle
de cette tragédie, parlant plus à l’esprit que séduisant les yeux.
II. Interprétation
L’Orchestre régional Avignon-Provence, transcendé par
l’exceptionnelle soirée qui clôt un cycle historique Duffaut et clôture pour
deux ans de l’Opéra d’Avignon, sonne exceptionnellement, et sans doute
l’accueillons-nous à l’unissons émotif d’une écoute vibrante. Il est vrai que,
d’entrée, la battue dynamique d’Alain
Guingal bat en brèche, dynamite toutes les sucreries romanticoïdes qui
peuvent affecter une œuvre enrubannée par une tradition bourgeoise au bon ton
et teinte consensuels ; sa vivacité juvénile donne une fraîcheur
printanière à ces visions automnales de la scène, lui répondent a contrario :
pas un temps mort, pas de complaisance mais un flot continu de vie sonore
courant, course à l’abîme, vers sa fin tragique et lumineuse, sans presque rien
céder de temps pour les applaudissements après les airs, qui retardent
l’action. À peine éprouve-t-on, effet d’une suffocante chaleur, comme un peu
long le ballet du Walpurgis de l’acte IV, concession d’époque aux messieurs du
sélect Jockey Club, venus après dîner, pour admirer leur « danseuse »
lever la jambe. Il est donné en son entier, juste hommage aussi d’un des rares
corps de ballet persistant encore dans une maison d’Opéra grâce à Duffaut, dans une belle chorégraphie d’Éric Bélaud qui
offre la palette de son talent et de ces danseurs, danse par ailleurs, en
contrepoint physique maillée, émaillée d’acrobates du plus bel effet graphique,
perchés sur la croix du prie-Dieu devenu lit de débauche multi-libertine pour
un heureux Faust repu plus qu’en repos, Méphisto badinant multi-sexe
apparemment.
Les chœurs, préparés par Aurore Marchand,
semblent également transcendés pour cette soirée dont chacun semble ressentir le moment historique.
L’un des problèmes du théâtre, c’est sans
doute la présentation d’un personnage à deux âges de sa vie, doublé ici par la
difficulté que la métamorphose de fait à vue. Loin de grimer et de dégrimer
ostensiblement le vieil héros prêt à se faire une injection mortelle de drogue
et piqué sans doute à l’élixir de vie par Méphisto (la scène nous échappe un
peu d’une loge de fond), de ce même sang qui est la signature du pacte
infernal, Nadine Duffaut a opté pour deux Faust, le vieux, Antoine Normand,
voix expressivement fatiguée, émouvant dans ses regrets et adieu à la vie, Faust
encore sans faute, qui restera sur scène en témoin accablé de sa fautive vie sous le
regard d’un Christ douloureux, sous l’ombre portée de la croix, poids de son
péché, éternel stigmate de sa damnation, ou rédemption par ce regard qui semble
le hanter dans ce théâtre des ombres du monde. Et soudain, sans solution de
continuité, c’est le crédible jeune Faust qui surgit, bondit, insolent et
insultant de jeunesse physique et vocale, un Florian Laconi au mieux de
sa forme, métal ardent de la voix égale dans tous ses registres, solaire,
triomphante dans l’aigu dès l’effet méphistophélique non méphitique mais bénéfique de Méphisto. Et voilà notre vieillard savant, oublieux des grands
mystères du monde qui faisaient sa sublime ambition, qui chante, tout
guilleret, un couplet digne d’un épicurien bourgeois d’Offenbach, Brésilien ou
Baron, qui borne, ou au contraire chante une insatiable ambition très Second
Empire, « s’en fourrer jusque-là », avide de plaisirs terrestres et
non plus spirituels ou intellectuels :
À moi, les plaisirs,
Les jeunes maîtresses,
À moi leurs caresses […]
Et la folle orgie
Du cœur et des sens.
Laconi, dont on sait aussi le talent et l’humour très
opérette, donne cette dimension charnelle à son personnage, qu’il saura
attendrir de demi-teintes émouvantes face à Marguerite. Elle, c’est Nathalie Manfrino, en pleine possession
contrôlée de ses moyens, voix onctueuse, moelleuse, d’une touchante douceur,
dans le vague poétique de la chanson du roi de Thulé, l’émerveillement perlé
des terribles vocalises de l’air des bijoux, la pudique douceur de la rencontre
ou la passion de la vierge devenant femme du jardin à la chambre, ou fille et
mère meurtrie et meurtrière dans sa prison : la redoutable ascension vers
les aigus d’« Anges purs, anges radieux… » est une montée du calvaire
humain et vocal rédimé par la grâce qui émane toute d’elle et que nous lui
accordons tant elle nous émeut.
On ne s’étonnera
pas que le Diable n’ait pas de célestes aigus : Méphistophélè, c’est la
basse Jérôme Varnier,
entendu quelques jours plus tôt, lors de la cérémonie de remise à Marie-Ange
Todorovitch de la médaille de Chevalier dans l’Ordre des Arts et Lettres
par Raymond Duffaut, tonnant diablement en voix. Le timbre est âpre, rêche
ou rocailleux dans le grave, ce qui convient à cet anti-héros des abysses
infernaux, très expressif, comme dans son jeu, servi par sa longue et souple silhouette
inquiétante. Cependant, fatigue, chaleur, trop de répétitions, méchant rhume ou
allergie, son aigu ne s’épanouit pas dans « la ronde du Veau d’or »,
il est vrai d’une tessiture tendue sur la corde haute, ils sont démoniaques même
pour un diable, qui se tire bien des ricanements en fa effleurés de la sérénade
satanique et sardonique, et on lui accorde volontiers l’absolution.
Marie-Ange Todorovitch est une accorte Dame Marthe,
savoureuse, voluptueuse, veuve vite joyeuse, aguichante, élément de comédie, d’opéra-bouffe,
la sensualité éclatant sous l’uniforme trop étroit de la duègne austère, vite
maquerelle, faisant couple, sinon accouplée au fuyant Méphisto qui ne succombe
pas à la tentation, tenté sans doute par d’autres types d’amours comme semble
le suggérer le pluri-sexe Walpurgis. Le baryton belge Lionel Lhote remporte
tous les suffrages en Valentin : beauté égale d’une voix héroïque et pleine,
son grand air « Avant de quitter
ces lieux » montre bien au contraire qu’il habite parfaitement cet ambitus
large et généreux, émouvant dans sa malédiction finale et désespérée à sa sœur.
Autre baryton, Philippe
Ermelier est un Wagner de taverne digne compagnon sinon d’embauche
guerrière de débauche de bière ou vin. Enfin autre originalité, le pénible
aujourd’hui rôle travesti de Siébel, dévolu à un mezzo léger, est rendu à sa
vérité théâtrale de jeune homme amoureux et il faut dire que Samy Camps,
jeune, tendre et touchant, bien qu’affublé d’une prothèse d’éclopé —sans doute
blessure de quelque aventure militaire qui montre que la guerre est bien contre
toute éthique et esthétique, contre la morale, la bonté, la beauté. Sa voix de
ténor a une fraîcheur correspondant à son physique et à son âge et il incarne dans une
vérité immédiate, l’amour désintéressé, la compréhension, la compassion humaine
et chrétienne envers la Marguerite rejetée par la communauté.
Un Faust peut-être non sans défaut, mais qui fermait en très grande
qualité quarante-trois ans de mandat artistique d’un Raymond Duffaut
ovationné, rideau tiré, par tout le personnel, artistes et techniciens, ces
obscurs sinon sans grade participant d’ailleurs aux saluts, dans la légitimité
d’un travail sans lequel n’existerait pas la magie éphémère de la scène mais qui
nous hantera longtemps.
Opéra Grand Avignon
9 et 11 juin
Faust, de
Charles Gounod
Direction musicale : Alain GUINGAL
Direction
des chœurs : Aurore MARCHAND
Études musicales : Hélène
BLANIC
Mise en scène : Nadine
DUFFAUT
Assistant à la mise en scène : Franck LICARI
ChorégraphiE :
Eric BELAUD
Décors : Emmanuelle FAVRE
CostumES : Gérard AUDIER
Lumières : Philippe GROSPERRIN
DISTRIBUTION
Marguerite : Nathalie MANFRINO
Dame Marthe : Marie-Ange TODOROVITCH
Faust : Florian LACONI
Méphistophélès : Jérôme
VARNIER
Valentin : Lionel LHOTE
Siebe : Samy
CAMPS
Wagner : Philippe ERMELIER
Le vieux Faust : Antoine
NORMAND
ORCHESTRE RÉGIONAL
AVIGNON-PROVENCE
CHŒUR ET CHŒUR
SUPPLÉMENTAIRE DE L’OPÉRA GRAND AVIGNON
Direction : Aurore MARCHAND
BALLET
DE L’OPÉRA GRAND AVIGNON
Direction : Éric BELAUD
Photos
© ACM-Studio Delestrade :
1. Méphisto (Varnier) :
2. Méphisto à la taverne ;
3. Marguerite et le coffre à bijoux (Manfrino, Todorovitch, Laconi) ;
4. Le lit prie-Dieu ;
5. Marguerite, en prison refuse Faust (Manfrino, Laconi).
[1] J’ai adapté cette pièce
sous le titre de Faust vainqueur ou le
procès de Dieu à la demande du metteur en scène Adán Sandoval.
[2] Sur
les divers Faust, je renvoie à mon livre Figurations
de l’infini. L’âge baroque européen, Prix de la prose et de l’essai 2000,
le Seuil, 1999, « De Dieu le Père au Père-Dieu », « La fin des
thaumaturges », p.389-399.
[3] Berlioz
ne devait pas ignorer la pièce de Calderón, si admiré par Wagner qui dit, dans
une lettre à Liszt, qu’il le lit pour maintenir l’inspiration de son Tristan.
En tous les cas, l’invocation à la nature de son Faust est très
proche de la tirade lyrique de Cyprien découvrant sa puissance diabolique dans Le Magicien prodigieux. Cf mon livre, Figurations de l’infini, op. cit. , p. 398.
vendredi, juin 09, 2017
LE VRAI DON CARLOS : ENFANT GÂTÉ, PRINCE GÂTEUX
Enregistrement 29/5/2017,
passage, semaine du 12-17/6/17
RADIO DIALOGUE RCF
(Marseille : 89.9 FM, Aubagne ; Aix-Étang de
Berre : 101.9)
«LE BLOG-NOTE DE BENITO » N° 275
lundi : 12h15 et 18h15 ; samedi : 17h30
Semaine 24
DON CARLO
` L’Opéra de Marseille termine sa saison avec Don Carlo de Giuseppe Verdi donné le
jeudi 8, le mercredi 14 et le samedi 17 à 20 h, le dimanche 11 en matinée à
14h30. La mise en scène est du Marseillais Charles Roubaud et la distribution
est prestigieuse.
Don Carlos, dans
son nom espagnol, était une commande, en français , de l’Opéra de Paris, montée
en 1867, révisée en 1884 puis traduit en italien.
Le livret fut écrit par Joseph
Méry et Camille
du Locle, d'après la tragédie Don
Karlos, Infant von Spanien, ‘Don Carlos, Infant d’Espagne’, de Friedrich von Schiller, de 1787. Sur certains détails historiques vrais, c’est une affabulation
romantique qui narre la supposée rivalité entre le prince héritier Don Carlos
et son père le roi Philippe II d’Espagne qui a épousé, il est vrai, pour des
raisons politiques, la fiancée qu’il lui avait d’abord destinée, Élisabeth de
Valois, fille d’Henri II et de Catherine de Médicis, pour sceller la paix entre
l’Espagne et la France. L’action
se déroule sur fond de révolte des
Flandres contre l’Espagne, historiquement vraie, mais conflit postérieur à la mort
de l’infant.
Don Carlos |
Mais
la pièce et l’opéra donc, inventent une idylle préalable entre l’Infant
espagnol et la jeune princesse française qui se seraient rencontrés à
Fontainebleau, érigeant Don Carlo en héros romantique amoureux trahi par son
propre père, et par ailleurs désireux d’arracher les Pays-Bas à la souveraineté
espagnole. Il est vrai aussi, pour alimenter la légende, qu’Élisabeth de Valois
et Don Carlos naissent et meurent la même année (1544-1568), à 23 ans, à
quelques mois d’intervalle. Mais ils n’avaient que 14 ans lors du fameux
mariage royal de 1559, par procuration, qui ne sera par ailleurs consommé que
deux ans plus tard eu égard à la jeunesse de la princesse française.
Autre vérité historique : l’habitude des
mariages inégaux en âge étant presque une norme, le mari toujours plus âgé que
l’épouse, lorsqu’Élisabeth arriva en Espagne pour rejoindre enfin son époux, à
la jeune princesse, sans doute agréablement surprise en le voyant, Philippe II
dit en souriant : « Vous regardez si j'ai des cheveux blancs ? »
Il n’avait que 32 ans.
La pièce, s’emparant de ce trait d’humour, le renverse et en
fait le constat dramatique d’un homme âgé, malheureux de cette différence d’âge
avec la jeune femme qu’il aime et qui ne l’aime pas. C’est le moment sans doute le plus poignant
de l’opéra de Verdi. Seul dans son cabinet, ayant travaillé des dossiers toute
la nuit, voyant poindre l’aurore, Philippe II revoit l’arrivée d’Élisabeth en
Espagne, découvrant tristement ses cheveux blancs, et il médite sur cet amour
déçu et sur la solitude du pouvoir. L’air est introduit par un long prélude de
violoncelle qui chante déjà la mélancolie du roi. Nous écoutons cette
introduction par l’Orchestra dell‘ Accademia
di Santa Cecilia dirigé par Tullio Serafin :
1) DISQUE I, PLAGE 5 (1)
Élisabeth de Valois |
Nous y reviendrons, centrant
cette émission sur lui. Non, Philippe II n’était pas un vieillard lorsqu’il
épousa Élisabeth de Valois qu’il aurait arrachée, contre son gré, à son
immature adolescent de fils. Mais la légende, tragique, est si belle que l’on a
du mal à lui opposer la vérité historique, dramatique certes, mais moins
romanesque. Qui fut ce don Carlos magnifié par le théâtre et l’opéra ?
LE
VRAI DON CARLOS, FUT UN ENFANT GÂTÉ, ET UN PRINCE GÂTEUX. ET ODIEUX.
Il
en est des familles comme des peuples et des cultures : le mélange des sangs
les régénère, les rajeunit et la fermeture des frontières raciales et
culturelles les anémie, les appauvrit, faute d’oxygène et du bénéfique renouvellement
génétique des mélanges, des métissages. Ce fut le drame des longues dynasties
royales, usées par des mariages endogamiques, consanguins, entre membres
proches d’une même famille. Ce fut, à terme, la tragédie pas si lointaine des
Romanov, des Habsbourg d’Autriche et, d’abord, des Habsbourg d’Espagne.
Carlos
naît du premier mariage de Philippe II avec sa double cousine germaine,
maternelle et paternelle, Marie de Portugal, qui meurt quelques jours après la
naissance. La famille est si mêlée qu’il a seulement quatre
arrière-grands-parents au lieu des huit
pour une famille normale. Philippe, n’a pas encore hérité l’empire de son
père Charles Quint qui abdiquera en 1555 ; il voyage, d’Italie en Flandres
en passant par la Bourgogne et la Franche-Comté, dans ses futurs états
européens puis s’installe en Angleterre où il a épousé en 1554 sa grand tante Marie Tudor, régnant avec
elle jusqu’à sa mort en 1558, une femme plus âgée que lui à l’inverse de son
futur mariage, l’année suivante, avec Élisabeth. Mais la fiction de Verdi, le
fait beaucoup plus âgé que la réalité et il se lamente.
Nous
écoutons la suite du morceau, la méditation de Philippe II, chantée par Cesare Siepi :
2) PLAGE 5 (2)
L’infant Don Carlos, seul en Espagne, a été
élevé par ses tantes, qui lui passent tout : enfant gâté, il est maladif,
difforme, débile mental, d’une effroyable cruauté qui épouvante autour de lui.
Il joue à brûler vif des animaux, crève les yeux des chevaux, oblige un bottier
à manger sa botte, hurle, tempête, prompt à jouer de sa dague, manquant tuer
son oncle, le superbe et héroïque Don Juan d’Autriche (1547-1578), fils bâtard
de Charles Quint, souche saine d’une union non consanguine, futur vainqueur de
la bataille de Lépante contre les Turcs (1571), que son frère Philippe nommera
gouverneur des Pays-Bas.
Philippe II par Titien |
Philippe
II (1527-1598), déplorait lucidement, à la fin de sa vie : « Dieu, qui m’a donné tant de
royaumes, m’a refusé un fils capable de les gouverner. » Ce fut le
drame de ce grand et puissant monarque régnant sur tous les continents, le
soleil ne se couchait jamais sur son empire. Il prévoyait fatalement, à la fin
de ses jours, que son successeur, Philippe III, issu également d'un dernier mariage consanguin avec sa nièce autrichienne, abandonnerait le pouvoir aux
mains de favoris, mais il demeurait blessé du douloureux souvenir de son
premier fils du premier lit, maladif, à demi fou, incapable de monter sur le
trône : en 1568, il fut contraint d’enfermer Don Carlos qui avait peut-être
même attenté à ses propres jours, en tous les cas, voulu s’emparer des Pays-Bas.
Ce sont les protestants hollandais insurgés contre l'Espagne catholique qui, pour des raisons politiques et religieuses, cherchant leur indépendance, créeront la légende noire de Philippe II, relayée par les Anglais et les Français en guerre contre le puissant Empire espagnol invaincu pendant un siècle.
Le
mariage du roi avec Élisabeth fut heureux mais elle mourut en couches et
Philippe en fut très affecté. De ce mariage, enfin avec un sang renouvelé, non
consanguin, naquit une saine princesse, une fille très aimée, Isabel Clara
Eugenia, à laquelle Philippe II offrit le gouvernement des Pays-Bas où elle
régna à la satisfaction de son peuple. On voit d’ailleurs à Bruxelles, sa
capitale, des témoignages de l’estime qu’on portait à Isabelle Claire-Eugénie
(1566-1633). Du monarque le plus puissant de son temps, contraint de masquer
toute manifestation de sensibilité, on dit qu’il grimpa au sommet d’une tour
pour voir jusqu’au bout le carrosse de sa fille bien-aimée qu’il ne devait plus
jamais revoir, et qu’il éclata en sanglots.
Isabel Clara Eugenia |
Nous
nous quittons aux accents douloureux que Verdi prête à Philippe II :
3) PLAGE 5 de à fin
Opéra
de Marseille Don Carlo de Giuseppe
Verdi qui sera donné le jeudi 8, le mercredi 14 et le samedi 17 à 20 h, le
dimanche 11 en matinée à 14h30.
Par téléphone
04 91 55 11 10 – 04 91 55 20 43
opera.marseille.fr
DON CARLO,
de Giuseppe Verdi
Opéra en 4 actes, version de Milan
Livret de Joseph MÉRY et Camille du LOCLE d'après Friedrich SCHILLER, révisé par Charles NUITTER et traduit en italien par Angelo ZANARDINI.
Livret de Joseph MÉRY et Camille du LOCLE d'après Friedrich SCHILLER, révisé par Charles NUITTER et traduit en italien par Angelo ZANARDINI.
Création à Milan, Teatro alla Scala, le 10 janvier
1884.
Dernière représentation à l'Opéra de Marseille, le 5 octobre 1997
COPRODUCTION OPÉRA NATIONAL DE BORDEAUX / OPÉRA DE MARSEILLE
Dernière représentation à l'Opéra de Marseille, le 5 octobre 1997
COPRODUCTION OPÉRA NATIONAL DE BORDEAUX / OPÉRA DE MARSEILLE
Direction musicale Lawrence FOSTER
Mise en scène Charles ROUBAUD
Scénographie Emmanuelle FAVRE
Costumes Katia DUFLOT
Lumières Marc DELAMÉZIÈRE
Vidéos Virgile KOERING
Mise en scène Charles ROUBAUD
Scénographie Emmanuelle FAVRE
Costumes Katia DUFLOT
Lumières Marc DELAMÉZIÈRE
Vidéos Virgile KOERING
Elisabetta Yolanda AUYANET
Eboli Sonia GANASSI
Tebaldo Carine SECHAYE
Une Voix céleste Anaïs CONSTANS
Eboli Sonia GANASSI
Tebaldo Carine SECHAYE
Une Voix céleste Anaïs CONSTANS
Don Carlo Teodor ILINCAI
Philippe II Nicolas COURJAL
Rodrigo Jean-François LAPOINTE
Le Grand Inquisiteur Wojtek SMILEK
Un Moine Patrick BOLLEIRE
Comte de Lerma Éric VIGNAU
Députés Flamands Guy BONFIGLIO, Lionel DELBRUYERE, Jean-Marie DELPAS, Alain HERRIAU, Anas SEGUIN, Michel VAISSIÈRE
Un héraut Camille TRESMONTANT
Philippe II Nicolas COURJAL
Rodrigo Jean-François LAPOINTE
Le Grand Inquisiteur Wojtek SMILEK
Un Moine Patrick BOLLEIRE
Comte de Lerma Éric VIGNAU
Députés Flamands Guy BONFIGLIO, Lionel DELBRUYERE, Jean-Marie DELPAS, Alain HERRIAU, Anas SEGUIN, Michel VAISSIÈRE
Un héraut Camille TRESMONTANT
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille
mardi, juin 06, 2017
BOUQUET FINAL À L’ODÉON
VIOLETTES IMPÉRIALES
(1948)
Opérette de Vincent Scotto
Livret de Paul Achard, René Jeanne
et Henri Varna
21 mai 2017
Comme dans les feux d’artifices, ce
spectacle, joli bouquet final, aura couronné brillamment la belle gerbe
d’opérettes et de récitals lyriques dans ce temple du chant et du jeu qu’est
devenu l’Odéon, dignifiant d’opéra l’opérette.
Déjà La Veuve joyeuse de Franz
Lehár nous avait laissés la joie à cœur et à jardin ensuite fleuri par ces
violettes embaumées : déjà une équipe de chanteurs acteurs remarquables
des premiers aux derniers rôles, tous solidairement soudés par une mise en
scène réglée au cordeau d’Olivier
Lepelletier, tous dignes d’éloges et trop nombreux pour être cités.
Même pari réussi par cette dernière
floraison, sous la baguette badine de Bruno
Conti pour la fosse et la férule fleurie de Jack Gervais pour le plateau. On sourira, en touriste, de cette
Espagne de carton-pâte, plate carte-postale, si l’on peut rire, en espagnol, de
ces « Madonna ! » italiens et en rien hispaniques et cette
impensable et impossible église romane à Séville. En guise d’autres décors,
d’accord, de simples toiles peintes, pimpantes (Loran Martinel), quelques souvenirs de Goya dans de vagues tableaux.
Bon, rire, sourire, mais pas de ricanement : les temps sont durs pour les
décors en… D’autant que la fastueuse débauche de costumes, si l’on passe sur
les chemisiers des hommes de l’acte I, plus propres du Carnaval de Rio que de
l’austère Andalousie, est souvent d’une grande beauté et d’une grande justesse
et raffinement à la fois hispanique et historique, jusque dans la teinte parme,
violette, de ceux situés au cœur du Paris du Second Empire et ses robes à crinolines
et tournures bien tournées qui font des femmes des fleurs corolles retournées à
tourner les têtes dans les valses. La Maison
Grout qui les fournit mérite des applaudissements pour son bon goût.
Le thème de la vendeuse de
violettes, qui vivra un conte de fée, était à la mode depuis la chanson
espagnole La violetera de José Padilla (1914), popularisée par la
chanteuse et actrice Raquel Meller,
mélodie si célèbre mondialement que Chaplin
l’inclut dans ses Lumières de la ville
(1931). L’intrigue, de l’opérette corse la banale historiette d’amour en la recoupant
avec la grande Histoire, la prédiction, semble-t-il authentique, faite à
Eugénie de Montijo (à Grenade et non Séville) qu’elle serait un jour « plus
que reine » : Impératrice donc. Ici, la gitane du légendaire présage
est en fait une modeste vendeuse de violettes sévillane séduite par un
aristocrate local, la bergère et le Prince. Leurs amours, traversées par
l’intransigeante mère de l’amant (une Simone
Burle méconnaissable en altière douairière inflexible) seront enfin
couronnées grâce à une Eugénie à couronne impériale reconnaissante envers sa
prophétesse.
Dépits amoureux, un comte, des comptes à régler, prises, surprises
et méprises, travestissements et autres facéties : comme dans un bon
vaudeville, tout le monde, amants mécontents, manants, aristos, filous et
filature, se retrouvera à Paris, chez la généreuse Eugénie (la délicieuse Perrine Cabassud) ayant épousé Napoléon
III (Cyril Cosson, rôle muet). C’est
simple mais sympathique et drôle et drôlement joué par une troupe menée tambour
battant par le chef et le metteur en scène, sans un temps mort, remarquable
prouesse eu égard aux nombreux changements de costumes, au rythme soutenu, sans
un temps mort même avec les nombreux passages dansés, chorégraphiés avec grâce
et culture par Estelle Lelièvre-Danvers,
qui sait même passer avec élégance de la danse du peuple andalou à cette danse
andalouse popularisée enfin dans les nobles salons : séguedilles,
fandangos et boléros, même danse classique pour l’épisode parisien, servi par
une admirable troupe de danseurs, dont elle-même à pied, à point, à pointe
d’œuvre.
Cette opérette
est une espagnolade sans malice, une musique savamment peuple de Vincent
Scotto, enchaînant des airs entraînants, une marche pour la marchande
(« Qui veut mon bouquet de violettes ? »), un chœur de
l’anisette, du Guadalquivir, les couplets de l’amoureux (« C’est pour toi
que je chante ») et un tourbillon de valses au milieu des espagnoles, même
un chahut-cancan parisien (danse en fait dérivée de la cachucha d’Espagne interprétée par la danseuse Fanny Elssler qui fit sensation à Paris en 1836) dont les danseurs
se tirent encore, jonglant avec ces styles, avec une tonique virtuosité et
rivalité qui n’a sans doute rien à envier aux célèbres Goulue ou Valentin le
désossé immortalisés par Toulouse-Lautrec.
Violeta est
campée, cambrée avec grâce par Cécile
Arbel, souple soprano, qui s’offre le luxe de chanter, distribuant au
public ses violettes, en parcourant la salle, sans perte de timbre dans
l’acoustique pourtant ingrate d’une vaste salle feutrée de moquette et
fauteuils veloutés. Don Juan, est le solide et chaleureux baryton Lionel Delabruyère : couple crédible
et bien audible de jeunes premiers. Mais, en jeunes seconds de comédie, le
couple Rosette et Loquito, Julie Morgane,
délicieuse en robe de petite fille modèle d’abord, et son amoureux, Grégory Juppin, sont dignes de la
comédie musicale américaine, jouant, chantant, et joliment, mais, en plus
dansant mieux que bien, acrobatiques.
Tous les
comparses sont à citer : Sabrina Kilouli, Pepa, la morgue des
mères nobles (Simone Burles et Silvi Abovici, en Madame de Montijo
pincée —qui fut maîtresse de Mérimée…), Michel
Delfaud. De Serafina, Jeanne-Marie
Lévy fait un solide rôle de grande comédie, drue et drôle, faisant Comte et
mécompte et finalement fière paire, beau numéro, avec le Picadouros toujours
irrésistible de Dominique Desmons.
Quant à Claude Deschamps, Estampillo
multiforme, aux multiples travestis mais toujours égal à lui-même, son visage,
sa voix, ses gestes, en à peine quelques répliques, une expression, une
inflexion, un mouvement, sans même se poser ni chercher à s’imposer, il est
comédie, théâtre.
De grands
artistes qui prouvent qu’il n’y a pas de grande et petite œuvre, opéra ou
opérette, mais des spectacles dignifiés par le travail et le talent.
Violettes impériales
de Francis Lopez,
Marseille, théâtre Odéon,
20 et 21 mai
Direction musicale : Bruno
CONTI
Chef de chant : Caroline OLIVEROS
Mise en scène : Jack GERVAIS
Assistant mise en scène : Sébastien OLIVEROS
Chorégraphie : Estelle LELIEVRE-DANVERS
Chef de chant : Caroline OLIVEROS
Mise en scène : Jack GERVAIS
Assistant mise en scène : Sébastien OLIVEROS
Chorégraphie : Estelle LELIEVRE-DANVERS
Distribution
Violeta : Cécilia
ARBEL
Eugénie : Perrine CABASSUD
Sérafina : Jeanne-Marie LÉVY
Rosette : Julie MORGANE
Madame d'Ascaniz : Simone BURLES
Eugénie : Perrine CABASSUD
Sérafina : Jeanne-Marie LÉVY
Rosette : Julie MORGANE
Madame d'Ascaniz : Simone BURLES
Don Juan :Lionel
DELBRUYERE
Picadouros : Dominique DESMONS
Estampillo : Claude DESCHAMPS
Loquito : Grégory JUPPIN
Macard : Michel DELFAUD
Napoleon III : Cyril COSSON
Picadouros : Dominique DESMONS
Estampillo : Claude DESCHAMPS
Loquito : Grégory JUPPIN
Macard : Michel DELFAUD
Napoleon III : Cyril COSSON
Chœur Phocéen, chef de chœur :
Rémy LITTOLFF
Orchestre du Théâtre de l'Odéon/
Orchestre du Théâtre de l'Odéon/
Photos :
Christian Dresse
1. Danses sur la place ;
2. Danses de salon ;
3. Les travestis (Desmons, Lévy, ) ;
4. Chanteurs, danseurs (Morgane, Juppin) ;
5. Couple impérial et couple d'amoureux (Cosson, Cabassud et Arbel, Delbruyère) ;
6. Saluts.
1. Danses sur la place ;
2. Danses de salon ;
3. Les travestis (Desmons, Lévy, ) ;
4. Chanteurs, danseurs (Morgane, Juppin) ;
5. Couple impérial et couple d'amoureux (Cosson, Cabassud et Arbel, Delbruyère) ;
6. Saluts.