mercredi, mai 22, 2013

Paz, Salam & Shalom


 PAZ, SALAM ET SHALOM


PAZ, SALAM ET SHALOM
par canticum novum



Voici onze ans déjà que la belle association multiculturelle Horizontes del sur (http://horizontesdelsur.fr/) de Marseille, infatigablement animée, corps et âme, par Jocelyne Faessel, s'intéresse à l'Espagne multi-confessionnelle du Moyen-Âge dont elle fait le symbole d'une possible et paisible coexistence entre diverses cultures et religions dans une ville marquée, parfois au fer rouge aujourd'hui, par cette facture ou parfois fracture de la diversité.  Des associations espagnoles, juive, musulmanes, comme concrétisant ce rêve d'union des trois grandes religions du Livre, si souvent affrontées, se sont alliées et ralliées à cette initiative pour donner à cet événement une résonance particulière en cette année de Marseille Capitale européenne de la Culture 2013. 
Du  21 mai au 10 juin vont de la sorte se succéder concerts, spectacles de contes, conférences, cafés littéraires et cinéma, rencontres avec des écrivains,  débats avec des spécialistes. La musique n'est pas la parente pauvre, populaire  comme A vuelo de voz qui interrogera l'héritage d'Al Andalus en Amérique latine, avec la chanteuse Gisèle Abadia qui partira de contes ponctués de chants sépharades et Sandra Rivas-Dávila, chanteuse et poétesse vénézuélienne, accompagnée par Simón Bolzinger au piano, le 6 juin à 19 heures à l'Hôtel de la Région, 61, la Canebière.
  


Mais un moment fort sera constitué par l'invitation faite à Canticum novum de présenter son concert le samedi 25 mai à 21h30 à l'Espace Julien, 39, Cours Julien. J'avais parlé longuement de leur  disque, couronné d'un prix, je le reprends ici.
 Beau message pacifique que nous adresse en trois langues, mais en commun la langue universelle de la musique, avec un beau disque, un groupe de musiciens au nom latin, Canticum novum, ’Chant nouveau’, ou ‘Nouveau chant’, sous la direction d’Emmanuel Bardon. On entonnerait volontiers avec joie, avec eux, comme des vœux de bonne nouvelle année, le titre de leur disque : Paz, Salam et Shalom, ‘Paix’, déclinée en espagnol, en arabe et en hébreu.  En somme, trois cultures du Livre, monothéistes, avec une origine commune, dont on rêve qu’elles passeraient de l’embrasement passionnel et guerrier à l’embrassement fraternel, du conflit, de la dissonance à la concorde, à l’accord, à l’harmonie. Car ces trois religions et leur culture, si elles se sont combattues et, malheureusement, semblent encore prêtes à se combattre, ont eu des parenthèses heureuses de coexistence pacifique, notamment dans l’Espagne médiévale, ce que vient nous rappeler Canticum novum.


En effet, dans un heureux métissage sonore, Canticum novum mêle de la sorte, pour notre bonheur musical, des chansons séfarades anciennes, c’est-à-dire judéo-espagnoles, des musiques instrumentales d’Algérie et de Turquie, musulmanes, et des chants chrétiens, des cantigas d’Alphonse X le Savant ou le Sage, en galaico-portugais.

Alphonse X le Savant
Et c’est là un hommage symbolique à ce grand monarque éclairé avant la lettre, roi de Castilla et Léon (Tolède, 1221 - Séville, 1284). Son règne finit en désastre politique, son fils, à la tête de la noblesse, se révolta même contre lui, le dépouillant de ses pouvoirs. Mais il est passé à la postérité comme le savant auteur ou, plutôt, commanditaire d’ouvrages capitaux pour la culture de son temps et bien au-delà.


Roi juriste, il fit adapter et remanier le code romain et laissa, avec les Siete Partidas, un monument juridique à l’Espagne, qui régentait toute la société. Roi astronome, ses Tables astronomiques dites Tables alphonsines sur la position des astres, précieuses pour la géographie et la navigation, avec des corrections postérieures, furent en usage jusqu’au XVIII e siècle. Il écrivit aussi un livre d’astrologie, astrologie et astronomie étant considérés comme la même science. Roi historien, il fit écrire une Chronique d’Espagne et une Histoire universelle. Par ailleurs, un livre de jeux et de divertissements, un autre sur les pierres précieuses et leur pouvoir magique.
Autour de lui, à Tolède, il avait réuni un groupe de savants arabes, hébreux et latins, créant des écoles de traducteurs, demeurées fameuses, dans les langues des trois cultures, capital travail de divulgation en Europe du savoir antique dont les Arabes d’Espagne avaient sauvé l’héritage (notamment Aristote) et de la science et de la philosophie arabes et hébraïques. C‘est dire qu’il fit coexister, comme déjà dans la Cordoue musulmane auparavant, et ce que les Maures appelèrent al-Andalus, les trois grandes cultures, se nommant même « Roi des trois religions.
Mais, s’il figure dans ce disque, c’est au titre du monument musical qu’il légua à la postérité, les fameuses Cantigas de Santa María, ‘chansons ou cantiques à Sainte Marie’, en galaico-portugais, la langue lyrique de la Péninsule ibérique au Moyen-Âge où le castillan était réservé d’abord essentiellement à la poésie épique. C’est une somme exceptionnelle de quelque 418 compositions musicales, précédées d’un prologue et d’une introduction, illustrées de 40 enluminures, des miniatures dont certaines représentent des musiciens avec leurs divers instruments, ce qui est précieux pour connaître l’organographie, les instruments de l’époque , le XIII e siècle. Et l’on y découvre aussi le roi entouré de ses musiciens, dont on reconnaît au moins un juif et des arabes.
Si ce roi artiste n’a pas composé à lui tout seul cet ouvrage qu’il a tout de même dirigé, il est possible qu’il soit l’auteur de la première cantiga où il se présente comme le troubadour de la Dame la plus parfaite, la Vierge Marie. J’en traduis le début :

Je veux être ce jour
son troubadour,
et la prie de m’agréer pour tel,
et qu’elle veuille recevoir mon chant d’amour
car par lui je veux montrer toujours
son miracle éternel.

Les cantigas sont donc des poèmes narratifs sur des miracles de la Vierge ou des récits sur elle. Mais il y a aussi des Cantigas de loor, des cantiques de louanges, mystiques. La musique, savante ou populaire, est une somme de son temps et même de ce qui précède, et va du grégorien, des chants de troubadours aux danses parfois processionnaires.
Quatre cantigas éclairent ce disque, la 15, strictement musicale, la 37 et la 209 qui narrent deux miracles, dont la dernière, sur la personne du roi Alphonse lui-même, gravement malade et guéri par l’imposition sur lui du volume des Cantigas. On en conserve quatre manuscrits, quatre codex, dont le second est le plus complet, ce qui suppose que cette cantiga, où le roi témoigne personnellement du pouvoir de la Vierge, fut ajoutée au volume en confection et qu’il se déplaçait, ici à Vitoria, au Pays Basque, avec sa cour de musiciens et cette somme de musique mariale. Mais, dans le disque, on ne résiste pas au charme poétique et mystique de la cantiga 100, Santa María, strela do día,  dont voici le refrain :

Sainte Marie, étoile du matin,
Montre-nous
Le chemin
Vers Dieu et guide-nous.

Ladino, séfarades
Les autres morceaux chantés du disque sont en ladino. C’est quoi ? Comme le son même l’indique, un t intervocalique qui devient normalement un d en castillan populaire, le ladino, c’est le « latino » et se disait du castillan ancien. Mais les juifs d’Espagne appelaient également ainsi la langue castillane de leurs livres religieux qu’ils avaient exactement calquée sur la syntaxe et le vocabulaire des textes bibliques en hébreux traduits littéralement, car ces textes sacrés ne pouvaient admettre la moindre distorsion lexicale ou grammaticale. Par extension, ils appelèrent « ladino » la langue espagnole qu’ils parlaient en Espagne, pour la distinguer ainsi de l’hébreu domestique.
Quand, en 1492, les Juifs furent expulsés d’Espagne, qu’ils appelaient Séfarad, ils prirent le nom de séfarades. Ils emportèrent, avec la terrible nostalgie d’un pays aimé dont on les arrachait à la force, et dont ils prirent le nom, nombre de traditions hispaniques, des vieux romances, des poèmes et des chants, et cette langue castillane de la fin du XVe siècle, qu’il continuèrent à parler dans leur exil, jusque de nos jours, avec la prononciation de l’époque, contaminée à peine par quelques mots empruntés aux terres d’accueil, Maghreb, Balkans, Turquie, mais fortement imprégnée des cultures musicales locales.
Au XVIIIsiècle, mais surtout au XIX e, avec le réveil du nationalisme juif, des chercheurs commencèrent à collecter auprès des minorités séfarades qui les pratiquaient encore, ces trésors conservés oralement depuis la diaspora hispanique, au Maroc (la tradition la plus pure, car proche de l’ancienne patrie), à Smyrne, Salonique, Istanbul, Jérusalem, etc, en faisant des recueils. Ces transcriptions sont plus ou moins exactes à cause des aléas et accidents de la mémoire, contaminée par les langues locales, la perte inévitable du sens, de la correction grammaticale parfois, mais faciles à corriger quand on en connaît le précis départ espagnol.


C’est pourquoi on peut regretter la transcription à l’évidence erronée de la célèbre A la una nazí yo qui garde, dans une version plus fidèle, le souvenir du « tristique  monorime » (trois vers avec la même rime, ici, « yo nazí », « me engrandezí », « me casí », avec les z  et s intervocalique originaux, graphie et prononciation exacte du XVe siècle) qui est un souvenir du vieux zéjel, forme poétique hispano-mauresque remontant au IXe siècle, dont on connaît même l’inventeur, el Ciego de Cabra, ‘l’Aveugle de Cabra’. Forme métrique ancienne pour une musique qui l’est ici beaucoup moins, tonale, en rien médiévale.
Depuis longtemps déjà, de grands chanteurs espagnols, comme Victoria de los Ángeles, se sont penchés sur ces merveilles, en ont enregistrées, sauvé de l’oubli. Plus récemment, Jordi Savall et son épouse regrettée, Montserrat Figueras, en ont donné des versions volontiers orientalisantes.


Cependant, on se laissera porter par le charme avec lequel Emmanuel Bardon et son Canticum novum, digne héritier de Savall, interprète, instrumentalise ces airs avec goût, grâce à des interprètes très engagés, mêlant habilement les instruments médiévaux et orientaux, vièle, lire d’archet (Valérie Dulac), flûtes à bec (Gwenaël Bihan), vièle et kamancheh (Emmanuelle Guigues), oud (Philippe Roche), oud, bandolium (Rémi Cortial), kanun (Aroussiak Guevorguian) et bien sûr, percussions (Henri-Charles Caget, Ismaïl Mesbahi). Pour le chant, on apprécie les voix de la soprano Barbara Kusa, la basse d’Yves Bergé et l’étrange couleur et saveur que donne  la voix de haute dontre d’Emmanuel Bardon à la belle mélopée aux ondulations orientales lascives de l’une des versions du fameux poème Aquel rey de Francia.
On a simplement la mélodie de ces chansons, monodiques au départ, mais, après tout, rien n’empêche, comme ici, de les partager en voix comme le récit de ces trois sœurs agitées dans leur lit, traversées de rêves voluptueux d’amour ou de châteaux -en Espagne forcément- où la voix de basse sonne comme le fantasme de l’amant.
Un disque plein de saveur, de couleur joliment réussi.

Paz, Salam et Shalom, Canticum Novum. Direction Emmanuel Bardon, CD Ambronay, éditions référence AMY033. 1h 15mn.

Photos :

1. Emmanuel Bardon ;

2. Le roi Alphonse X au milieu de sa cour musicale (enluminures du codes des Cantigas de Santa María).
3. Canticum novo, photo Bertrand Pichène.

mercredi, mai 01, 2013

OPÉRA DE CHAMBRE


Médée Kali,
un opéra de chambre 
(version de concert)

Nouvelle création de Lionel Ginoux
D'après la pièce Médée Kali de Laurent Gaudé 

Mercredi 15 mai 2013 à 19h00

Archives et Bibliothèque Départementale Gaston Defferre (Marseille)
20, rue Mirès, 13003 Marseille

Métro 2 (Désirée Clary) - Tram 2 (Euroméditerranée Gantès)
Les Musiques 2013, un festival éclaté 
du gmem-CNCM-Marseille
Distribution :

Bénédicte Roussenq, soprano ; Joël Versavaud, saxophone ; Laurent Camatte, alto ;  Adeline Lecce, violoncelle ;  Marion Liotard, piano

Réservations & renseignements : gmem - 04 96 20 60 10 
Une production Actʼtempo (Marseille), co-production gmem-CNCM-Marseille, avec lʼaide du conseil régional PACA, de la SPEDIDAM. Ce projet bénéficie du soutien de l'association Beaumarchais-SACD En résidence à La Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon (30) et au Studio Alys (05)


CHRONIQUE DE DISQUES






Belle moisson printanière de disques ! D’abord,
Mélodies de Francis Poulenc « du côté d'Apollinaire » par David Lefort, ténor, 
Philippe Guilhon-Herbert piano, un disque SAPHIR productions.

Judicieuse réédition ou tirage nouveau de ce disque de 2004 en cette année où l’on commémore le cinquantième anniversaire de la mort de Francis Poulenc (1899-1963). Compositeur et pianiste, Poulenc est auteur de près de deux cents mélodies ou chansons, accompagnées pour la plupart au piano. Lui-même écrivait ceci :

« Si l’on mettait sur ma tombe : ‘‘ci-gît Francis Poulenc, le musicien d’Apollinaire et d’Éluard’’, il me semble que ce serait mon plus beau titre de gloire. »

Excessive affirmation sans doute si l’on considère l’abondance et la qualité de sa production instrumentale, son opéra mondialement célébré Le Dialogue des carmélites, sa lyrique Voix humaine sur un texte de Cocteau, mais vraie sans doute par son évidente passion pour la poésie avec ces deux références, Apollinaire, dont il mettra en musique Les mamelles de Tirésias, un opéra-bouffe (sous-titré par le poète « drame surréaliste »), et une cantate sur des poèmes d’Éluard : en somme, un poète qui illustre une première modernité surréaliste pendant la Première Guerre mondiale jusqu’à celui qui en sera une incarnation à l’orée de la Seconde.
Néanmoins, le choix de ce disque se place « du côté d’Apollinaire » qui se taille la part du lion avec quatorze poèmes mis en musique sur trente-deux mélodies retenues par le CD, pratiquement la moitié. Mais l’on y trouve aussi Max Jacob avec deux poèmes (Parisiana), un brévissime texte de Raymond Radiguet, le tout jeune auteur du scandaleux Diable au corps, un Portrait en prose de Colette, le Dernier poème de Robert Desnos, d’autres de Maurice Carême, pour finir six poèmes de Ronsard. Bel éventail poétique et musical dont nous signalons, en particulier, l’émouvant poème Bleuet d’Apollinaire. Le poète est au front pendant la Grande guerre, sans doute dans une tranchée où il recevra une blessure à la tête en 1916 et, affaibli, il mourra pratiquement deux jours de l’Armistice du 11 novembre 1918. Loin de s’attendrir sur lui, il s’adresse, dans une rêverie mélancolique, à ce «  jeune homme de vingt ans/ Qui a[s] vu des choses affreuses », qui ne sait « pas ce que c’est que la vie », qui connaît « mieux la mort que la vie ».

Bouleversante interprétation faite de simplicité du ténor David Lefort, accompagné au piano par Philippe Guilhon-Herbert. Cette voix qui sonne si jeune, au timbre clair et doux, se plie sensiblement au texte d’Apollinaire et à la musique de Poulenc. Venu tardivement au chant, le ténor David Lefort a justement remporté en 2001 le Prix Francis Poulenc au Concours Le Triptyque, s’étant mérité par ailleurs une mention spéciale en 2002 au concours Pierre Bernac, grand mélodiste français qui reste un modèle. On apprécie la clarté, l’intelligibilité de la diction, qui ne se démentiront pas tout au long de ces trente-deux mélodies.
Avec le lieu commun usé de « style français », pour ce qui est de la mélodie française, on a l’habitude d’interprétations salonardes, précieuses et affétées, d’une vocalité affectée confinant à la fadeur. On ne dira pas que David Lefort y échappe complètement ne serait-ce qu’avec ces r roulés et ces e muets un peu trop audibles qui donnent quelque chose de désuet, une patine d’époque, de Belle époque révolue en arrière-plan de son interprétation. Pourquoi pas ?, puisque, justement, le clin d’œil du titre, « du côté d’Apollinaire » renvoie aux « Du côté de chez Swann » et « Du côté des Guermantes » du contemporain Proust de À la recherche du temps perdu. Cependant, s’il n’est pas toujours celui qu’on a l’habitude d’entendre dans ce répertoire aux trop nombreuses références, le ténor, tout en évitant évanescences et déliquescences, crée un climat bien personnel fait de fraîcheur, d’une certaine naïveté touchante qui le sauve des maniérismes agaçants, glacés de ce « bon goût » qui serait prétendument l’apanage de la France, mais qui réduirait alors sa musique à un provincialisme à l’échelle mondiale, contredisant son universalité. Au contraire, la couleur du timbre, élégiaque souvent, la douceur de ses attaques, la palette pastellisée de ses nombreuses nuances, demi-teintes, voix mixte, sans appui excessif —au risque parfois d’un certain sentiment d’instabilité vocale— prêtent à l’ensemble une vraie cohérence et une personnalité attachante. Le piano de Philippe Guilhon-Herbert a l’amicale complicité de ne pas rivaliser de présence avec le ténor au risque, lui, de sembler au second plan parfois. Cependant encore, il y a une jolie connivence et cohérence de niveau qui fait que le disque tire son charme d’une certaine fragilité qui sied bien à la poésie en musique ici servie.


Le second disque, THE CHIVERS COLLECTION, Masterpieces for guitar, chefs-d’œuvrs pour la guitare, a une triple originalité : il met en parallèle deux grands compositeurs du XXe siècle, le Catalan Federico Mompou (1893-1987), connu surtout tour son œuvre pianistique, le Britannique Benjamin Britten (1913-1976), honorant de leur musique un instrument insolite dans leur œuvre : la guitare. Dans ce CD, ils font trio de haut niveau avec Manuel Ponce le Mexicain (1882-1948) et, à leur service, le guitariste classique virtuose et producteur Dana Chivers. Conseillant ce beau disque, on invitera à une écoute attentive « Cuna », tiré de la Suite compostelana de Mompou composée en 1962,  douce berceuse d’un ascétisme musical minimaliste, une note et un écho arpégé, que Chivers produit avec un simplicité monacale.
Beau parcours de Dana Chivers, Californien universel : étudiant en Espagne la guitare auprès des meilleurs maîtres, se perfectionnant en France auprès de la grande Nadia Boulanger, plié à tous les styles de musique, de la baroque (Monteverdi) à la contemporaine (Penderecki et Boulez), il est désormais établi près d’Aix d’où il rayonne par ses concerts auxquels s’intègre souvent son fils David, violoniste virtuose, formant le Duo Chivers. Ils ont signé trois disques originaux encore, révélant des musiques et des compositeurs inconnus ou mal connus. Ici, c’est la surprise du magnifique Nocturnal op. 70  (1962) de Britten, toujours poétique, qu’on n’attendait pas dans cet instrument si marqué par l’Espagne.
Les deux composteurs hispaniques, Mompou et Ponce, ont en facteur commun leur travail avec l’illustre guitariste Andrés Segovia (1893-1987), à qui l’on doit le renouveau de la guitare classique au XXe siècle. Il est le commanditaire et le conseiller de Ponce pour ces  21 Variations sur la Folie d’Espagne, thème fameux pendant les XVII e et XVIIIe siècle qui revit ici sous les doigts délicats et puissants de Dana Chivers. 
Un reproche, les plages du disques ont une numérotation par œuvre et non continue, ce qui ne facilite pas la réécoute.
Rappelons d'autres disques de Chivers, l'un en soliste, l'autre, avec son fils David :